L’annonce d’un nouveau Michel Gondry, c’est toujours un peu la fête pour moi, depuis qu’en sortant d’une salle de cinéma, à l’hiver 2004, j’ai réalisé que je venais de me prendre une grosse claque sans avoir pourtant tout compris à l’histoire devant Eternal Sunshine of the Spotless Mind (que j’ai revu mille fois depuis, et bel et bien saisi). La Science des Rêves (je trouvais le personnage de Stéphane trop creepy, d’une certaine façon) et Green Hornet (non.) mis à part, j’ai aimé tous ses films. Ils m’ont rempli de bonheur et d’enthousiasme pour des semaines toute entière !
Alors quand j’ai vu que Gondry sortait un nouveau long-métrage intitulé Microbe & Gasoil, j’ai fait un tour de chaise de joie. J’y suis allée sans attendre « le film de l’année », sans craindre d’être déçue. Et j’ai passé un vrai bon moment toute en rigolade, en identification et en légère tristesse.
Microbe et Gasoil, c’est l’histoire de Daniel (surnommé Microbe) et de Théo (surnommé Gasoil). Ils se rencontrent quand ce dernier débarque dans la classe du premier. Tous deux sont marginalisés par le reste des élèves et se lient d’une amitié faite de créativité, de respect mutuel, de bienveillance et de questions existentielles. Daniel est couvé, voire étouffé par sa mère, tandis que Théo est beaucoup plus livré à lui-même et a bien plus de liberté.
Lorsque les grandes vacances arrivent, ils décident, puisqu’ils n’ont aucune envie de rester deux mois avec leurs familles, de fabriquer leur propre voiture et de partir à l’aventure. Jean-Michel et Guy Yolo, les mecs.
Microbe & Gasoil, un film avec des adolescents réalists
Des films avec des adolescents en personnages principaux, il en existe plein. Avec des adolescents réalistes, il en existe également beaucoup. Souvent, ce sont des histoires dramatiques (Dog Pound, Le Monde de Charlie), humoristiques « à l’américaine » (Lolita Malgré Moi
), ou des films qui racontent les petits problèmes du quotidien d’adolescents vivant dans les beaux quartiers de Paris (Lol). Ce sont des réalités, ce n’est pas LA réalité — parce que LA réalité universelle n’existe pas.
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Microbe & Gasoil, c’est un film qui prend son indépendance, loin des clichés sur les ados comme on peut souvent en voir dans les films. Lui raconte l’amitié entre deux garçons qui vivent à Versailles sans pour autant être issus de la classe aisée (du coup, même moi qui ai grandi en Picardie, j’ai eu l’impression d’y retrouver l’ambiance un peu pourrie de mon collège). Ils sont considérés comme différents de leurs camarades de classe (comme, grosso modo, un adolescent sur deux l’est) et se lient presque instantanément, créant une complicité à la cool.
Ils ne sont pas les bégé du collège, leurs camarades de classe ne sont pas mannequins pour La Redoute, ils ne sont pas victimes de harcèlement scolaire à proprement parler mais sont moqués pour des détails à la con, et violentés, une fois. Ces moqueries les empêchent de rentrer dans le moule de l’adolescent-type qui n’existe pas. Elles les ennuieraient sûrement, séparément, mais dès qu’ils sont deux, ça va : Théo et Daniel ont l’air de gérer.
En fait, quand je suis sortie du cinéma après avoir vu Microbe & Gasoil, un truc m’a frappée : j’y ai reconnu mon adolescence. J’attendais pas forcément de reconnaître mon quotidien de l’époque, mes fous rires et mes questionnements de quand j’avais 14 ans — sur le cul, l’amour, la masturbation, l’envie d’être conforme aux autres… J’en avais pas besoin, mais ça m’a quand même fait drôlement plaisir.
Alors, bien sûr, là où Microbe et Gasoil construisent une maison sur roues et décident de prendre des vacances en France, ma meilleure pote et moi enregistrions une émission de radio avec un micro nul entre deux écritures de poèmes scato, mais même malgré cette notable différence, tout de même, le pouvoir d’identification est là. Les dialogues sonnent juste et sont intemporels.
Une aventure dans son jaccuzi je reste dans ma jalousie
Et c’est pas parce que c’est vraisemblable que c’est pas une aventure de zinzin ! Dans leur quête d’indépendance, parce qu’ils ne se sentent pas en phase avec leur famille, Théo et Daniel décident donc, hop là, de partir sur les (petites) routes de France à bord de leur maison qui roule. Si, en voyant le film, tu te mets pas à les envier très fort, fais-moi signe.
Personnellement c’était comme un miroir de ce dont je rêvais à l’époque où les poils me poussaient. Partir à l’aventure avec le/la meilleur-e des ami-e-s, conduire une voiture, avec le confort d’un vrai lit juste à l’arrière… J’envie d’autant plus Microbe et Gasoil que je sais qu’Ange Dargent et Théophile Baquet, les acteurs principaux, ont VRAIMENT conduit ce véhicule pendant le tournage !
Ah tiens, en parlant d’eux : ils sont absolument formidables, et vraiment impressionnants de naturel. J’veux dire, encore plus pour des acteurs aussi jeunes, dont celui qui joue Daniel pour qui c’est la première expérience. Même les personnages secondaires d’adolescents, avec tantôt un cheveu sur la langue, tantôt un peu d’acné, sont crédibles : on est si loin des soeurs Olsen… et crois-moi, je vais pas bouder mon plaisir.
Mais Microbe & Gasoil, c’est surtout VRAIMENT drôle. On ne se roule pas par terre en bavant toutes les trois secondes, mais on sourit, on pouffe, on souffle par le nez, et on rit franchement avec ces deux héros ! On ne retrouve peut-être pas l’univers onirique auquel certains fans de Michel Gondry sont habitués, mais on sent que ce film est très cher au réalisateur qui dit s’être inspiré de sa propre adolescence.
Microbe & Gasoil est drôlement réussi, et au moins aussi rafraîchissant qu’un Mister Freeze framboise. Courez-y, ça sort le 8 juillet 2015 !
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Les Commentaires
C'est peut-être question d’expérience personnelle?
Au contraire avec mes amis, on s'est vraiment beaucoup reconnus dans ces personnages, les "outsiders" qui se disent anti-comformistes parce que les autres sont trop immatures et suivent la masse. Des phrases comme on en trouve dans le film, c'est exactement ce qu'on disait à l'époque. Et justement, le personnage de Théo, je vois bien cet ami qui se donnait de grands airs (au final c'est beaucoup du jeu).
J'ai beaucoup été touchée par ce film, je l'ai trouvé très juste: les films ados me parlent rarement justement, parce que trop cliché, trop extrême; là je me suis vraiment retrouvée, j'ai retrouvé mes amis. Un vrai coup de cœur.