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Inceste // Source : Canva
Société

#MeTooInceste : ce qu’il faut retenir du dernier rapport de la CIIVISE

Alors que la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles ne sait toujours pas si elle sera renouvelée, elle présente ce vendredi 17 novembre ce qui pourrait bien être son dernier rapport. Et restitue le fruit du travail essentiel qu’elle mène depuis trois ans.

Voilà maintenant trois ans que la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants sillonne la France pour recueillir la parole d’adultes anciennement victimes. Trois ans que cette commission, coprésidée par le Juge Édouard Durand, produit des préconisations pour aiguiller les politiques publiques et renforcer la chaine de protection des enfants et de leur parent confident, malmenés par les institutions.

Dans ce nouveau rapport, intitulé « Violences sexuelles faites aux enfants : on vous croit », publié le 17 novembre, la CIIVISE « restitue ces trois années d’engagement » et livre 82 préconisations, dans l’espoir que son travail, qui répond à un besoin vital pour les victimes et essentiel pour l’ensemble de la société, ne s’arrête pas là. Incertaine d’être reconduite, la commission sera en effet fixée sur son sort lundi 20 novembre. Voici les quatre grands axes à retenir.

Mieux repérer

Premier pilier du rapport, savoir identifier les enfants victimes. Pour cela, la CIIVISE préconise « d’organiser le repérage par le questionnement systématique des violences sexuelles ». Cela signifie donc qu’il ne faut « pas attendre que l’enfant parle », mais bien « lui permettre de révéler les violences en lui inspirant confiance ». Face au silence que lui imposerait l’agresseur, « tout professionnel doit permettre la révélation des violences et amorcer la mise en sécurité de l’enfant ».

La CIIVISE préconise également d’automatiser ce questionnement dans certaines situations spécifiques, comme dans le cas d’une grossesse adolescente, ou pour les jeunes hospitalisés après une tentative de suicide.

Enfin, dans un effort de multiplier les espaces de confiance pour que se déploie la parole de l’enfant, « la CIIVISE préconise que soit créé pour tous les enfants et adolescents un rendez-vous annuel de dépistage et de prévention centré sur l’évaluation de son bien-être et de son développement et intégrant le repérage systématique des violences sexuelles ».

À lire aussi : Inceste : 36 sénateurs demandent le maintien de la Ciivise

Améliorer le traitement judiciaire

Autre axe majeur de ce nouveau rapport, la réponse des institutions. La CIIVISE demande une évolution législative essentielle : « déclarer imprescriptibles les viols et agressions sexuelles commis contre les enfants ». Comme le rappelaient les signataires d’une tribune sur le même sujet publiée lundi 13 novembre sur le site du Huffpost, « un temps long est nécessaire [aux victimes] pour prendre conscience des crimes sexuels subis, puis pour les dénoncer ». Chose que le principe de prescription, inadapté aux violences sexuelles, met à mal.

La CIIVISE appelle aussi à la création d’une « ordonnance de sûreté de l’enfant (OSE) permettant au juge des affaires familiales de statuer en urgence sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale en cas d’inceste vraisemblable ». Cette mesure est primordiale pour renforcer la chaine de protection et éviter par ailleurs que l’enfant ne soit placé chez l’agresseur.

La commission préconise de « suspendre de plein droit l’exercice de l’autorité parentale et du droit de visite et d’hébergement du parent faisant l’objet de poursuites pénales pour inceste et de les retirer automatiquement au moment de la condamnation. Une proposition de loi est en cours de discussion au Parlement pour que ces préconisations soient insérées dans le Code civil. Il faut aller plus loin, pour rendre possible la protection effective et durable de l’enfant victime dès la révélation des violences ».

À l’échelle législative, la CIIVISE demande que soit « reconnu le caractère incestueux des violences sexuelles lorsqu’elles sont commises par le cousin ou la cousine de la victime ».

Repenser le parcours de soin

Aujourd’hui, le parcours de soin des victimes n’est pas suffisamment spécialisé, et trop peu d’experts sont formés en psychopathologie des maltraitances, notamment pour les violences sexuelles subies dans l’enfance.

« L’existence de soins spécialisés est largement décrite dans la littérature scientifique et fait l’objet d’un consensus international. Pourtant, les victimes de violences sexuelles n’en bénéficient pas ou de façon trop aléatoire, selon la formation du thérapeute vers lequel elles sont orientées, ou l’état des dispositifs institutionnels susceptibles de les dispenser. La définition d’un parcours de soins spécialisés est d’abord un impératif collectif à l’égard de chaque victime. C’est aussi un objectif de santé publique »

Rapport de la CIIVISE, 17 novembre 2023

Pour y remédier, la CIIVISE préconise donc « la mise en place et le financement d’un parcours de soins spécialisés en psychotraumatisme de 20 à 33 séances réparties sur une année et renouvelables selon les besoins des victimes ». Un parcours qui se doit d’être accessible pour tous•te•s et dont les frais doivent être couverts par la Solidarité nationale.

Renforcer la prévention

Dernier axe central du rapport, la prévention face aux risques de récidive. Pour cela, la CIIVISE appelle à renforcer le contrôle des antécédents, grâce au FIJAISV (Fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes). Son utilisation doit permettre de « prévenir le renouvellement des infractions ; faciliter l’identification des agresseurs ; permettre leur localisation ».

Aujourd’hui, l’efficacité du FIJAISV est insuffisante, selon la CIIVISE, qui propose plusieurs pistes pour renforcer son fonctionnement. Parmi elles, le fait de faciliter « l’accès au FIJAISV lors des recrutements pour des activités mettant en contact avec des enfants ».


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