Depuis le 17 janvier 1975, la loi Veil autorise légalement l’interruption volontaire de grossesse en France. Quarante ans plus tard, on essaye encore de faire bouger les choses. Ce 16 janvier 2015, Marisol Touraine, la ministre de la Santé, et Pascale Boistard, secrétaire d’État chargée des Droits des femmes, ont annoncé le lancement d’un « Programme national d’action pour améliorer l’accès à l’IVG ». Le but est de faciliter les démarches et l’accès à l’information pour les gens qui souhaitent avorter.
Car l’IVG concerne encore un grand nombre de personnes en France : en 2013, environ 217 000 avortements ont été réalisés dans le pays, d’après le ministère des Droits des femmes, et ce chiffre n’a pas tellement bougé sur les dix dernières années.
La plupart des mesures s’appliqueront à partir de l’automne 2015. Voici les principaux points qui peuvent t’intéresser.
Les démarches d’avortement mieux remboursées et facilitées
- Depuis 2013, l’IVG est théoriquement à 100% remboursée par la sécurité sociale. Désormais, tous les actes médicaux nécessaires à la réalisation de l’IVG seront eux aussi intégralement remboursés. Bref, on est vraiment dans le 100%.
Le terme « acte » recouvre les échographies de datation pré-IVG (non prises en charge jusqu’alors) et échographies de contrôle, les examens de biologie médicale et ceux de biologie de suivi, et la consultation de recueil du consentement. La prise en charge sera donc la même pour les actes d’IVG effectués par des gynécos et médecins généralistes (habilités à pratiquer l’IVG médicamenteuse) et ceux réalisés par les établissements de santé.
- Une procédure va être élaborée pour gérer plus efficacement les IVG entre 10 et 12 semaines de grossesse. Car au-delà de 7 semaines de grossesse, la loi française n’autorise plus que les avortements par voie chirurgicale, et ce jusqu’à 12 semaines. Et les praticien•ne•s se montrent parfois réticents, ce qui conduit encore trop de personnes à aller avorter à l’étranger une fois le délai dépassé.
Plus de professionnel•le•s pourront pratiquer une IVG
- En plus des médecins en ville, les sages-femmes vont pouvoir pratiquer l’avortement médicamenteux.
- Les médecins qui travaillent dans les centres de santé, vont pouvoir réaliser des IVG par voie chirurgicale, dans les conditions définies par la Haute Autorité de Santé. Jusque là, seuls les établissements de santé en avaient le droit.
- Des guides de « bonnes pratiques » vont être diffusés aux professionnel•le•s de santé qui reçoivent les personnes souhaitant effectuer une IVG, afin que ceux et celles-ci ne puissent « ni influencer leurs choix, ni les culpabiliser ». Une bonne chose, quand on sait qu’il existe des dérives dans certains centres…
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Un nouveau numéro pour s’informer
- Un numéro national unique va être créé pour répondre aux demandes d’information et de conseil sur la sexualité en général, mais aussi sur la contraception et l’IVG. Il sera non surtaxé, anonyme, et surtout ouvert 7 jours sur 7, à partir de septembre 2015.
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- En septembre 2015, une campagne d’information sera lancée par le ministère sur la sexualité, notamment pour faire connaître ce numéro d’appel et rappeler l’existence de la plateforme ivg.gouv.fr (que je t’invite vivement à consulter, même si tu n’es pas concernée pour l’instant). Le gouvernement prévoit également de lancer un second site qui parlera plus largement des questions de sexualité.
Des progrès… mais pas de situation parfaite
Bref, ces nouvelles mesures ont l’air plutôt encourageantes. Même si, évidemment, tout n’est pas encore parfait, comme le relève les collectifs Féministes en mouvement et Osez le féminisme. Il n’est pas question, par exemple de la réouverture des 130 centres IVG qui ont fermé depuis le milieu des années 2000. Or ces centres sont les seuls autorisés à pratiquer des avortements chirurgicaux, et sont débordés.
Osez le féminisme souligne que le programme n’inclut aucune mesure concernant les médecins qui évoquent encore abusivement la « clause de conscience » pour refuser de pratiquer une IVG, c’est-à-dire le droit de refuser la réalisation d’un acte médical autorisé par la loi mais qu’ils estiment contraire à leurs convictions.
Le Haut Collectif pour l’Égalité entre les hommes et les femmes signale quant à lui que le programme n’évoque pas le droit à l’anonymat (qui n’est pas toujours respecté), et souhaiterait voir mises en place des mesures spécifiques pour les personnes mineures ayant recours à l’IVG.
Quelques pistes pour agir dès maintenant
En plus de te réjouir de ces nouvelles mesures, tu peux aussi participer à l’amélioration de la situation ! Ce week-end, le collectif Féministes en mouvement profite de l’anniversaire de la loi Veil pour lancer une pétition européenne. Elle réclame la reconnaissance du droit à l’avortement comme un droit fondamental, et son inscription dans la Charte européenne des droits fondamentaux. Pour la signer, rendez-vous par ici.
Si tu habites Paris, le collectif organise aussi, ce 17 janvier, une journée de discussion et d’information autour de l’IVG. Différentes tables rondes sont organisées, auxquelles participeront plusieurs intervenantes féministes, notamment Isabelle Alonso des Chiennes de Garde, et des personnalités politiques. Au-delà de la France, les organisateurs évoqueront les problématiques liées à l’IVG en Europe et dans le monde, en particulier en Afrique.
Le programme complet de la journée est dispo par là.
À lire aussi…
- L’histoire de la loi Veil, sur le site de l’Assemblée nationale
- Venez parler de l’IVG sur le forum !
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Les Commentaires
La clause de conscience ne menace pas le droit à l'IVG, puisque s'il refuse, le médecin doit rediriger sa patiente vers un de ses collègues qui pratique l'IVG.
Par contre il faudrait une bonne vérification des médecins, pour éviter ceux qui mentent afin d'empêcher la patiente d'avorter (en prétendant que c'est une fausse alerte ou que l'embryon est mort et qu'il y aura une fausse couche naturelle et ce jusqu'au bout du délais légal).
Je n'ai absolument pas entendu parler de la marche, je suis dégoutée! =(