Tout juste quelques semaines après l’annonce d’une plainte contre Jean-Jacques Bourdin pour tentative d’agression sexuelle, Mediapart publie une enquête sur le journaliste politique.
Les journalistes Dan Israel et Marine Turchi (que nous avons rencontré dans le cadre de son livre enquête sur les violences sexuelles Faute de Preuves), ont recueilli plusieurs témoignages montrant « la face sombre » de l’animateur de la matinale de BFM TV et RMC.
Plusieurs femmes témoignent des comportements de Jean-Jacques Bourdin
Il y a d’abord le témoignage de la journaliste Fanny Agostini, qui voyant les révélations sur Nicolas Hulot et Patrick Poivre d’Arvor, a décidé de parler à son tour et de porter plainte.
Auprès de Mediapart, elle raconte les accès de rage du présentateur à son encontre en 2009, lorsqu’elle arrive à RMC pour animer la météo et l’info sur le trafic automobile. L’évitant du mieux qu’elle peut, elle finit par rejoindre BFM deux ans plus tard.
Sa route croise à nouveau celle de Jean-Jacques Bourdin en 2013, alors qu’elle est invitée à l’Open de pétanque de Calvi par le PDG du groupe. Le ton a changé de la part du journaliste. Mais aussi son attitude. Fanny Agostini raconte un rapprochement, des regards appuyés qui la mettent « mal à l’aise ».
Un matin, alors qu’elle nage à la piscine de l’hôtel, il la rejoint :
« Selon son récit, l’animateur se serait rapproché “très rapidement”, l’aurait “attrapée par le cou, sur le côté”, et l’aurait “attirée vers lui brusquement” en essayant de l’embrasser “à plusieurs reprises”. Elle raconte avoir été “complètement prise de court”, n’avoir “pas crié”, mais s’être “débattue” et être parvenue à sortir de l’eau.
Jean-Jacques Bourdin lui aurait alors lancé : “J’obtiens toujours ce que je veux”. Une phrase qui “a ponctué [ses] cauchemars pendant des années”. Et qu’elle a vécue “comme une menace de la part de quelqu’un qui avait un ascendant hiérarchique sur [elle]”, a-t-elle déclaré aux policiers. »
Une scène qu’elle décrit aujourd’hui à Mediapart et dont elle n’a osé parler à l’époque qu’à quelques proches.
De retour à BFM quelques années plus tard, elle reçoit de la part de Jean-Jacques Bourdin des messages à connotation sexuelle. Elle finit par quitter la matinale en 2015. Officiellement, à cause d’horaires trop difficiles — « Mais ce qui entravait ma santé, c’était Jean-Jacques Bourdin. »
Après le témoignage de Fanny Agostini, d’autres femmes parlent
D’autres femmes évoquent un homme charismatique les ayant approché en prétextant vouloir les aider dans leur carrière, avant de leur faire des avances plus ou moins explicites. Elles parlent aussi de cette peur d’être grillée, de perdre leur boulot ou des opportunités professionnelles, si elles parlent de ses comportements.
Il y a aussi des conversations à caractère sexuel passant par le compte Twitter du journaliste entre 2011 et 2018. Un « secret de Polichinelle », puisque le compte a vocation à annoncer les invités de la matinale Jean-Jacques Bourdin et que des journalistes pouvaient être amenés à l’utiliser…
« Toute la rédaction ou presque savait qu’il répondait à des jeunes femmes sur son compte. Il ne faisait pas très attention, il le laissait parfois ouvert sur un ordinateur après son émission. Et les messages pouvaient être très crus » raconte un témoin.
Blagues sexistes et allusions sexuelles étaient aussi monnaie courante, relate Carol Isoux, qui a été l’assistante directe de Jean-Jacques Bourdin entre 2003 et 2006 et estime qu’il s’agit du « procès d’une époque dans les médias. Celui de la sexualisation constante des jeunes femmes ».
D’autres témoins soutiennent Jean-Jacques Bourdin, le décrivent comme un séducteur ou un homme à femmes, mais pas capable d’être un agresseur, selon l’enquête de France Info sortie aujourd’hui.
Sollicité par Mediapart, Jean-Jacques Bourdin n’a pas souhaité répondre.
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Crédit photo : RMC/BFMTV (capture)
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