J’ai vite compris pendant mes études et au travers de mes expériences professionnelles, que je souhaitais faire un métier en contact avec les gens. Je ne me vois pas passer 8h par jour seule sans voir personne car j’ai besoin d’interactions humaines pour m’épanouir. Le management m’a toujours intéressé, notamment pour cet aspect social. Il y a un an, j’ai donc postulé pour être cheffe d’équipe en usine.
En prenant mon poste, j’ai réalisé que la théorie et la pratique n’ont rien à voir. J’ai changé de galaxie à la manière de Buzz l’éclair quand je suis passée de l’autre côté de la barrière. Et même si ça a été passionnant et très enrichissant, j’ai surtout eu de nombreux challenges à relever pour faire ma place et tenter de devenir une bonne cheffe.
Conseil n°1 : savoir écouter
C’est le conseil le plus bateau que l’on donne aux nouveaux managers. Quand je l’ai lu dans un manuel de management avant de commencer ce nouveau job, je me suis dit que c’était évident. Bien sûr qu’il faut écouter les gens, sinon comment puis-je faire correctement mon travail ? Ecouter les gens, c’est s’assurer d’avoir toutes les informations au bon moment pour évaluer correctement la situation. Par exemple : est-ce que l’usine va exploser ou ai-je le temps de finir mon sandwich ? (Réponse : on a toujours le temps de finir un sandwich, surtout s’il y a du fromage dedans).
Mais j’ai aussi appris qu’il faut s’intéresser sincèrement à la vie de ses collaborateurs car nous ne sommes pas des machines. Quand quelqu’un va travailler, il vient avec son histoire, ses joies, ses soucis (et ses nuits sans sommeils pour cause de nouveau-né). Il ne s’agit pas de devenir le confident de son équipe mais bien de créer une relation de confiance et de bienveillance pour que les gens osent s’exprimer et qu’on puisse intervenir s’ils ont besoin d’aide.
Parfois, être à l’écoute ne suffit pas, et il faut aussi apprendre à observer et à se mettre à la place de l’autre. J’ai été, par exemple, surprise quand un de mes collègues m’a signalé une personne qui avait plus de difficultés à lire. Ça m’’était arrivée auparavant d’être agacée quand quelqu’un ne suivait pas les consignes écrites, car je n’avais pas compris le problème. Lire me paraissait tellement évident et naturel que j’en avais oublié que tout le monde n’a pas eu ma chance en matière d’éducation.
Conseil n°2 : s’adapter à son équipe
Comme chacun de nous est unique, avec ses forces et ses faiblesses, je pense qu’on ne peut pas avoir une seule forme de management, tout dépend de son interlocuteur. Par exemple, certaines personnes sont motivées et très impliquées, et j’ai donc en tant que manager naturellement envie de leur donner plus de responsabilités. Je sais que je peux leur faire confiance : elles ne réussiront pas forcément tout mais elles feront de leur mieux, communiqueront, et demanderont de l’aide si besoin.
Avec d’autres personnes plus “blasées”, toute la difficulté est d’essayer de créer un lien pour les impliquer. Elles ne travaillent pas pour la beauté de la mission ou de l’entreprise, mais elles peuvent être plus impliquées si elles trouvent un intérêt à venir bosser, par exemple de la reconnaissance, ou le fait de passer un bon moment.
Enfin, il y a les cas difficiles, ceux que personne n’aime pas avoir dans son équipe, même si bien entendu, je ne le crie pas haut et fort. Ceux qui cachent leurs lacunes sous des excuses ou des mensonges, ceux en qui je ne peux pas avoir confiance. C’est d’autant plus dommage que ça va être pénible pour eux et pour moi en tant que manager puisque je vais devoir les surveiller.
Les cas difficiles incluent également les personnes qui mettent clairement de la mauvaise volonté dans leur travail, et peuvent même se montrer agressives. La position de manager fait qu’on ne peut pas fermer les yeux, et qu’on doit faire des retours négatifs quand c’est nécessaire. C’est là que le dialogue et l’écoute sont importants. J’ai déjà rencontré des personnes agressives pour cacher leurs faiblesses, ou blasées parce qu’on ne leur donne pas les moyens de faire correctement leur travail.
Conseil n°3 : bien s’exprimer
Manager implique de donner des ordres et je trouve ça parfois compliqué. J’ai appris à éviter les formulations du type “il faut, tu dois…” qui peuvent être perçues comme agressives. Le ton est également important. Par expérience, je sais que c’est essentiel d’être convaincu·e de ce qu’on dit, mais sans être vindicatif·ve, afin de laisser la place au commentaire ou à la question, tout en réussissant à s’imposer.
Selon les cas de figure et les personnes, je n’ai pas du tout la même approche. Généralement, j’utilise des techniques de CNV (communication non violente). Je formule mes demandes sous forme de question : “est-ce que tu peux faire ça ?”, “tu peux t’en occuper ?”. Quand je demande un coup de main, je peux finir ma phrase par “ok, on t’attend” pour bien souligner ma demande.
Parfois, quand la personne discute, je recentre la discussion avec ce genre de formule : “Je comprends ce que tu me dis, mais moi je te demande de faire ça” ou encore « Oui, je comprends mais je préfère qu’on fasse comme ça”. C’est assez directif tout en restant poli et respectueux de l’opinion de l’autre. Généralement, j’explique ensuite mes raisons.
En règle générale, j’écoute les arguments des autres, j’y réfléchis, et je me remets en question. Mais je sais aussi m’écouter et suivre mes intuitions. Mes arguments et la vision globale que je peux avoir ont autant de valeur que les leurs, et permettent parfois de gagner du temps ou de l’énergie.
Quand certains sont frustrés ou s’énervent, je pense que c’est important de ne pas rentrer dans leur jeu et de ne pas leur balancer leurs quatre vérités. En plus de ne pas faire avancer le schmilblick (oui, j’utilise des expressions de grand-mère et j’assume), on risque de se mettre la personne à dos. Écouter son égo n’est pas faire preuve de maturité, ça empire juste la situation. D’autant qu’une fois redescendue en pression, il arrive que la personne revienne s’excuser. Donc je reste calme et j’explique posément ce qui ne me convient pas, quitte à prendre mes distances un instant si le dialogue n’avance pas.
Conseil n°4 : faire des retours négatifs… et positifs !
Je considère que c’est le plus dur. Une fois, je me suis enlisée dans une discussion de 20 minutes parce que l’autre ne voulait pas lâcher l’affaire alors que j’avais des preuves. Donc je recommande l’effet sandwich. Je commence par dire ce que j’apprécie dans le travail de la personne : “je sais que tu es sérieux” ou “je vois que tu essayes de bien faire”. Puis je continue sur le constat : “je t’ai demandé de faire ça, tu ne l’as pas fait et c’est un problème pour x raisons”. Enfin, je remonte le moral : “bon ce qui est fait est fait, maintenant je te demande de rectifier la situation” ou alors “tant pis, c’est fini maintenant, je te fais confiance pour faire mieux la prochaine fois /ou me demander en cas de besoin”.
Cela évite de culpabiliser la personne. On fait tous des erreurs, le plus important est d’en apprendre quelque chose. Enfin, si ça se reproduit trop fréquemment, on peut mettre la personne en garde, puis faire remonter la situation auprès de son N+2 (c’est-à-dire de notre manager). J’avoue que dans le feu de l’action, l’effet sandwich est parfois un peu délicat à mettre en pratique quand on découvre que quelque chose n’a pas été fait et qu’on veut tout de suite comprendre pourquoi. Un de mes collègues m’a un jour conseillé de laisser les choses en l’état si possible, pour y revenir plus tard avec l’esprit clair.
Faire des retours positifs est aussi très important, mais on l’oublie souvent parce qu’on a tendance à se focaliser sur le négatif. C’est pourtant l’une des choses que je préfère : valoriser ses collaborateurs en citant leurs qualités et voir le sourire illuminer leur visage, ça n’a pas de prix. Quand quelqu’un fait quelque chose de cool ou que j’ai apprécié travailler avec lui/elle, je lui dis car ça fait du bien de l’entendre, ça motive et ça met une bonne ambiance.
Conseil n°5 : gérer son stress
Pendant un stage, j’ai rencontré un directeur d’usine, qui avait des méga responsabilités et avec qui c’était pourtant très agréable de travailler. Évidemment, il me demandait des résultats et j’avais une certaine pression mais il n’y avait jamais d’agressivité en lui, et surtout il me donnait les moyens de réussir en m’expliquant ce qu’il voulait et comment faire.
Le pire manager que j’ai eu ne savait pas maîtriser son stress et était agressif. Ça me rendait nerveuse, au point parfois de faire des erreurs. À mes débuts dans mon poste, j’ai eu du mal à gérer la pression et j’avais tendance à l’insuffler à mon équipe sans le vouloir. Ils me l’ont fait remonter et même si ce n’était pas agréable à entendre, cela m’a permis de prendre du recul.
J’ai compris que j’avais tendance à m’impliquer beaucoup dans mon travail, sans doute parce que je venais d’être embauché·e et que je voulais bien faire. Aujourd’hui, j’ai compris que mon travail ne me définit pas. Je peux faire des erreurs et rester une personne bienveillante et compétente. La clef pour moi a été de moins m’impliquer émotionnellement tout en restant sérieuse et professionnelle.
J’ai aussi nourri ma vie en-dehors du boulot pour avoir un bon équilibre. J’ai pris du temps pour me faire plaisir (je ne parle pas de masturbation coquin∙e, même si ça peut en faire partie) : aller se balader ou courir dans un parc, sortir avec des amis, dessiner, lire… Ces activités me font du bien et me rechargent. C’est d’autant plus facile de prendre du recul au travail, si ta vie ne tourne pas juste autour de ça.
Pour conclure, je pense que le plus important c’est d’être bienveillant et humble. Si tu commences à manager une équipe, tu vas sûrement te louper plusieurs fois. C’est normal, alors accepte-le sans te blâmer et construis sur tes erreurs. Le plus important est d’être à l’écoute, de faire de ton mieux et d’avoir à cœur de prendre soin de ton équipe.
Toi aussi tu as la responsabilité d’une équipe ? Tu as d’autres conseils à ajouter ? Ou au contraire, tu a déjà eu de mauvais·es managers, et tu en as tiré des leçons ? Viens en parler dans les commentaires !
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