Je porte le doux prénom de Marguerite-Marie. Pour ma mère je devais obligatoirement m’appeler Marie pour rendre hommage à la Sainte Vierge. Dix jours après ma naissance je fus baptisée.
Mes divertissements durant mon enfance
À la maison, ma vie était rythmée par la religion. Je n’avais pas le droit de regarder la télé : trop d’images sataniques déferlent sur le petit écran selon ma mère. Je ne pouvais regarder qu’un film par semaine, soit un Disney, un western de John Wayne ou encore un film de Sissi l’impératrice. La censure religieuse faisait rage. Les seuls livres que j’aie lus pendant mon enfance sont ceux de la comtesse de Ségur et les Fables de La Fontaine. Tout était mis en œuvre pour que je grandisse dans la plus grande chasteté, loin des perversions de ce bas monde.
Ensuite, durant mon temps libre étant petite, j’écoutais sans relâche les cassettes audio des contes de Grimm mais aussi de la vie des saints. Je connaissais par cœur leur histoire : j’apprécie en particulier celle de St Antoine de Padou qui avait décidé d’évangéliser les poissons car les hommes ne l’écoutaient pas. Je lisais aussi énormément de BD sur la vie des saints ; les autres, je ne pouvais les lire que le dimanche. De plus, ma mère, pour pratiquement tous mes anniversaires (jusqu’à aujourd’hui), m’achetait quantité de livres religieux afin de parfaire mon éducation.
Ma vie de petite fille tournée vers la dévotion
Chaque soir, je me réunissais avec ma famille pour faire un chapelet. J’allais bien entendu à la messe tous les dimanches. Le samedi, je me rendais au catéchisme des enfants adorateurs à Montmartre. Je vivais dans un HLM du 93 et je me trouvais dans cet univers complètement différent du mien, mais je suivais sans cesse ma mère. Je n’avais pas mon mot à dire. Elle m’affublait de grandes robes Jacadi ou C&A qui donnaient l’illusion que j’appartenais à la bourgeoisie pour me conduire dans le XVIIIème. Je n’entendais rien à l’adoration, mais j’aimais les images pieuses que l’on me donnait, et je suivais ma mère sans protester.
Le week-end, ma mère courait les conférences – qui traitaient toutes de Dieu, bien entendu. J’ai entendu parler des prophètes de tous genres. L’un d’eux prédisait la fin du monde en l’an 2000. Il avait dit que les guerres feraient rage et nous avait même élaboré une liste de tous les aliments nécessaires pour survivre à la fin du monde. J’avais été effrayée suite à ce discours apocalyptique : j’avais sept ans et ma mère me laissait écouter des choses pareilles. J’avais réellement peur de mourir dans un massacre. À la suite de cette conférence, j’ai changé. J’avais enfin pris conscience de ma mort. Et la peur de mourir ne me quitta plus pendant de longues années.
Ma relation avec Dieu… ou plutôt avec le Démon
Ma mère a toujours été fascinée par le côté obscur de la religion
. Elle me montrait dans le grand livre de catéchisme, datant des années 1950, des illustrations réalisées sous formes de gravures, des représentations de l’Enfer. Le Démon était omniprésent dans ce livre. Elle me disait qu’à chaque péché, je me prosternais devant son trône. J’avais peur. La nuit, je ne trouvais pas le sommeil ; persuadée d’être entourée de démons voulant ma perte, je ne voulais jamais dormir seule.
Mon adolescence ou le renoncement à Dieu
Mon adolescence fut très perturbée. Je me détestais. Rien ne me donnait goût à la vie. J’étais étouffée par toutes ces bondieuseries. Je n’étais pas heureuse. Même si je savais que l’amour était au centre du catholicisme, ma mère m’irritait de plus en plus. Je la tenais pour folle. Elle se cachait derrière la religion pour masquer le vide de sa vie, essayait de panser ses blessures à base d’eau bénite, de pèlerinages à Fatima, Rome, Lourdes… Elle trouvait en Dieu un but. Il donnait un sens à sa vie dont les jours s’égrenaient comme les boules d’un chapelet. Sa vision des choses était limitée par ce que disait l’Église. Ce que je détestais le plus, c’était sa façon de tout ramener à Dieu. J’allais à la messe, aux pèlerinages, à la confession, au rosaire tous les mois pour lui faire plaisir. Cependant, le cœur n’y était pas. Assise à côté d’elle, je pouvais percevoir qu’elle récitait des rosaires sans y croire, et je m’ennuyais mortellement.
J’avais horreur de rester des heures assise à « prier ». Dans ma tête, je divaguais. Je pensais à mes problèmes. Je réfléchissais sur l’utilité de ma vie, sur ma fin prochaine, sur le fait que je ne croyais plus. Je n’ai jamais pensé, à cette époque, dire que je voulais stopper toutes ces simagrées. J’étais sa fille. Je lui obéissais au doigt et à l’œil. Ma mère sentait mon désintérêt grandissant pour la foi : elle me disait parfois que je devais croire, et qu’elle aussi, à l’adolescence, elle ne croyait plus.
Pour ma part, je sentais un vide dans mon cœur. Je me disais que seul l’amour pouvait le combler. J’étais sèche et je m’enfonçais dans un profond mutisme. Dieu m’avait abandonnée, ma présence sur Terre était vaine. Je voulais disparaître. À cette époque, de nombreuses pensées suicidaires me traversaient l’esprit. Ma mère ne m’aimait pas pour ce que j’étais. Elle ne voulait pas me voir heureuse. Elle n’avait pas de rêve quant à ma carrière, mes études. Elle désirait juste me voir être catholique. Alors je lui donnais cette illusion en pratiquant la religion comme elle me l’avait enseigné. Elle savait que j’étais fausse dans cette démarche, mais elle acceptait mon double jeu, faute d’espérer mieux.
L’âge adulte
Aujourd’hui je crois en Dieu. Ma religion ? Je n’en ai pas. Je crois au Dieu tout-puissant. Il se fiche de savoir si je vais à la messe tous les dimanches, si je prie bien cinq fois par jour à heure fixe ou si j’allume l’électricité le jour du sabbat. Pourquoi se pencherait-il sur des détails aussi insignifiants ? Et si cela importe réellement, que j’aille sur-le-champ rôtir pour l’éternité dans les flammes de l’Enfer. Mes dogmes ? L’amour, le bonheur et le partage avec autrui.
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Les Commentaires
Un adulte qui devient catholique et veut être baptisé doit faire un long travail et prouver au prêtre qu'il veut être catholique. C'est long et fastidieux.
Baptiser un bébé est plus simple, ainsi il n'aura pas à faire tout ça.
Faut pas oublier que ça a un coté très social : on invite la famille, les proches, on choisi des parrains et des marraines ( et si c'est fait dans la religion, on ne peut normalement pas être parrain ou marraine si on n'est pas soi-même catholique ! )
Sinon pour ma part j'ai grandit avec une grand-mère intégriste religieuse (catholique également) et j'ai eu le malheur d'être gauchère : nombre de fois je me suis prise une tramp ou me suis faite attachée la main dans le dos pour me forcer à écrire de la main droite.
J'en garde une haine assez féroce envers tout ce qui est monothéisme.
Ho, et j'écris avec la main gauche =d