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Ma mère est pour l’avortement… mais contre le mien

Quand elle a choisi d’avorter, une jeune étudiante en a parlé à sa mère qu’elle pensait prête à accepter ce choix. Elle raconte sa terrible déception face à sa réaction.

Il y a 4 mois je me suis retrouvée face à un choix. Un choix qui en soi n’a pas été compliqué à faire, mais compliqué à gérer.

J’ai choisi d’avorter.

Ma famille et mère « pour l’IVG »

J’ai grandi dans une famille ouverte, où tous les sujets peuvent être abordés (si à 5 ans j’avais demandé à mon père ce qu’est une fellation, je sais qu’il m’aurait répondu, par exemple) et où l’on peut en débattre.

Du coup, la sexualité, ses dangers et leurs conséquences étaient des sujets absolument pas tabous chez moi, et dont j’ai été au courant dès mon plus jeune âge.

Très tôt, j’ai considéré que les femmes faisaient bien ce qu’elles voulaient de leur corps, et donc que l’avortement faisait partie de leurs droits fondamentaux.

Ce discours venait aussi de ma mère, que j’ai toujours entendu dire que c’était monstrueux d’empêcher des femmes d’y avoir accès.

Depuis que j’ai su que sa mère a failli mourir d’un avortement clandestin, j’étais persuadée que c’était un sujet qui lui tenait à coeur, qu’elle pensait tout ce qu’elle disait.

Comme je me suis trompée…

Une grossesse non désirée et l’annonce à ma mère

Revenons donc à il y a 4 mois.

Retard de règles, sentiment étrange vis-à-vis de mon corps, deux tests de grossesse positifs, je suis enceinte. Un mur me tombe sur la tronche et me dévaste de l’intérieur, mais je sais déjà que je ne peux pas le garder.

Je suis soutenue par mon copain, à ce niveau, tout va bien.

Il m’accompagne chez le médecin qui nous dirige vers l’hôpital.

Sur le chemin pour rentrer chez moi je me dis que je ne peux pas le cacher à ma mère, je vis chez elle, elle verra bien que quelque chose ne va pas, et je me dis que de toutes façons je la connais, elle va me soutenir.

Je rentre donc chez moi, prends mon courage à deux mains et une grande inspiration, et lui annonce :

« Maman, il faut que je te dise quelque chose. C’est pas grave, ne t’inquiète pas… Je suis enceinte. »

Elle fond en larmes et finit par me dire après quelques secondes :

« C’est pas grave ».

(Bon, alors, déjà je pense que si tu as besoin de dire ça à quelqu’un qui t’annonce ça c’est que si, il doit bien y avoir un souci quelque part)

Je veux avorter mais ma mère veut élever le bébé

Comme elle n’arrête pas de pleurer, je m’approche pour la prendre dans mes bras et la calmer. Elle finit par me faire la bise, et elle est à deux doigts de me féliciter ! Je l’arrête instantanément.

« Maman, je vais pas le garder… »

Enfin, c’est évident non ?

J’ai 24 ans, je vis chez ma mère, qui n’a même pas de chambre pour m’accueillir, je suis étudiante, je n’ai pas de boulot, aucun revenu, mon copain vit chez sa mère et n’a aucun revenu non plus.

On est déjà en train de galérer pour essayer de s’en sortir alors on ne va pas en plus se mettre un bébé dans les pattes, et pour lui offrir quelle vie ?

Je ne dis pas tout ça pour justifier mon choix, seulement pour expliquer pourquoi je pense que ma mère manque totalement de sens commun.

Et là vient le coup auquel je ne m’attendais pas du tout. Mais alors vraiment pas.

Elle me balance :

« Mais je suis là moi, je vais m’en occuper… »

Bah bien sûr, dans 20m² et avec une toute petite retraite ! Et ensuite de me le reprocher, après avoir essayé de me convaincre de le garder ?

Elle m’a dit notamment :

« — Mais c’est ton premier.

— Bah non le premier ce sera celui que j’aurai décidé d’avoir, lui ai-je répondu.

— Mais moi je saurai que ça aurait dû être lui, le premier. »

Ah, quelle horreur de me dire ça !

En fait, elle ne voyait pas le fait que je pourrais devenir mère, ce qui pour moi serait une catastrophe à l’heure actuelle, mais le fait qu’elle pourrait être à nouveau grand-mère.

Elle passe son temps à mettre la pression à ma sœur et moi parce que « oh mon dieu » elle a déjà 64 ans (et 3 petits-fils…), il serait peut-être temps qu’on lui fasse des petits-enfants nous aussi

Peu de soutien pendant l’avortement

Moi qui pensais que pendant toute la procédure ce serait le personnel médical qui me ferait culpabiliser, finalement ce fut ma mère.

Mis à part l’interne qui s’est permis un « vous avez voulu jouer ? » et la suivante qui n’avait pas lu le dossier en entier qui m’a demandé « qui va suivre la grossesse ? », tout s’est bien passé.

À lire aussi : J’ai avorté clandestinement, et aidé d’autres femmes à faire de même

Et entre tous les rendez-vous médicaux, je me retrouvais chez ma mère, qui me parlait des symptômes, des odeurs, des douleurs aux seins ; alors que je lui avais dis que je n’avais pas envie d’en parler.

Elle mettait Baby Boom à la télé alors qu’elle ne supporte pas cette émission, ne me soutenait pas du tout et ne s’inquiétait même pas de savoir si j’étais allée à l’hôpital toute seule pour l’intervention.

Elle a fini par parler de ma grossesse à mes sœurs, à qui je ne l’avais pas dit, et sans mon autorisation. C’était probablement pour chercher du soutien allant dans son sens.

J’essaye d’éviter d’imaginer la scène, pour ne pas penser à ce qu’elle a pu leur dire.

Chassée de la maison par ma mère après l’avortement

Et comble du « soutien », 2 jours après l’intervention, alors que je souffrais énormément, elle m’a demandé de ne pas rentrer à la maison.

Elle m’a dit qu’elle n’avait pas envie de me voir et que tout ça faisait vraiment beaucoup pour elle, qu’elle avait du mal à gérer la situation…

Tout ce que je voulais pendant ces 3 semaines, c’était être chez moi, qu’on m’en parle le moins possible et qu’on me soutienne.

Finalement, j’ai quasiment passé tout ce temps chez mon copain tellement je me sentais mal chez moi à cause d’elle.

En fait, c’est là que j’ai compris que ma mère était pour le droit à l’avortement, mais plus par principe, et tant que ça ne la concerne vraiment pas. En réalité elle est contre.

Je ne sais pas ce qui est pire ; savoir que l’on ne sera pas soutenue par sa famille en faisant un tel choix et ne pas en parler, ou penser que l’on va être soutenue, en parler et ne pas l’être au final.

À lire aussi : Mon « IVG de confort » a été un parcours de combattante


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Les Commentaires

78
Avatar de MarieLouise
12 juin 2023 à 11h06
MarieLouise
Pour rappel, une femme qui tombe enceinte,
- alors qu'elle a pris un risque conscient de ne pas se protéger
- alors qu'elle essayait d'avoir un enfant activement
- alors qu'elle laissait "faire les choses naturellement"
- alors qu'elle pensait qu'elle ou son conjoint était stérile
cette femme a le DROIT d'avorter, sans jugement.
Elle a le droit de changer d'avis, elle a le droit de s'être trompée, elle a le droit de vouloir un enfant, mais dans six mois seulement. ça la regarde, elle et personne d'autre.
26
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