Une livre plutôt épais, une couverture immaculée, le cliché de deux hommes pris sur le vif – une étonnante impression de mimétisme -, et un titre comme une signature, quelque chose que l’on grifonnerait à la fin d’une lettre (d’adieu ?) : Merci Karl !
Aux éditions Calmann-Lévy
Mais Kââârl, qui est Kââârl ?
Karl Lagerfeld, l’homme au catogan et aux lunettes fumées, l’homme à l’accent germanique si chic (ou pas), au parler franc, parfois acerbe, mais souvent juste et bien formulé. Il est aussi, accessoirement, directeur artistique chez Chanel, Fendi et créateur de la Lagerfeld Gallery. Rien que ça, oui !
Bref, Karl c’est un talent incontestable et une personnalité intriguante… Pas étonnant qu’il suscite la curiosité, et surtout la mienne !
Voilà ce que me promet la quatrième de couverture : « Pour la première fois, un créateur nous entraîne dans les coulisses interdites d’une grande maison : sous les paillettes, la couture se dévoile. A l’abri des podiums, l’excellence est souveraine. Les ambitions se tissent, les idées se piquent, les réputations s’entaillent et les petites mains s’acharnent à petits points. » Moi, ça me parle…
Durant quelques 250 pages (englouties en trois jours, un régal) et à travers le regard d’Arnaud Maillard, on découvre le quotidien, presque jour après jour, d’une grande maison de couture, sans tabou ni faux-semblant. Un documentaire, presque.
Immédiatement, je me suis prise d’affection pour l’auteur et ex-assistant de Lagerfeld. Il commence son incroyable histoire par le récit de sa première approche de Chanel, alors qu’il est encore adolescent. On découvre l’époustouflante motivation du jeune homme, passionné par le dessin et la couture. Un jour, en devoir de mathématiques, plutôt que de rendre feuille blanche, il préfère esquisser une dizaine de silhouettes de mode et rendre sa copie ainsi ! Les anectodes révélent un tempérament parfois naïf, mais toujours touchant.
Depuis son entrée à la prestigieuse Ecole de la Chambre Syndicale de la Couture (qui a compté, parmi ses plus célèbres élèves, Valentino et autres Saint-Laurent…) jusqu’à son arrivée au sommet, à la direction de la Lagerfeld Gallery, il en a fait du chemin ! Au-delà du monde de la mode, l’auteur incarne ici un parcours professionnel fulgurant, un modèle d’ambition que l’on ne peut que saluer.
Eloge à part, le propos de Merci Karl ! est intéressant et pertinent. On y découvre le fonctionnement du milieu de la mode (si tant est qu’il y en ait un !), et le quotidien d’un jeune étudiant, puis d’un stagiaire qui ne servait alors qu’à calligraphier les enveloppes des invitations, d’un assistant-styliste (et il faut le dire, parfois, celui d’un homme à tout faire) et enfin, d’un directeur qui essaie d’y évoluer. Tout y passe : les rares amitiés qui se créent, celles qui se défont, le pouvoir qui change les personnes, les pressions qui se répercutent comme un écho, mais aussi les rires, les souvenirs émouvants qu’il couche sur le papier avec une grande précision.
Une des grandes réussite de cette ouvrage, c’est aussi que jamais le propos n’est déplacé. Rien n’est dit sur la vie privée de Karl (mais en a-t-il vraiment une ?).
Un léger bémol, tout de même. La quatrième de couv’ annonce un « témoignage tendre et pétillant comme un ultime remerciement« . Un témoignage pétillant, peut-être, mais sûrement pas tendre ! Certaines phrases m’ont paru amères, piquantes.
Mais on ne peut pas en vouloir à Arnaud Maillard. D’abord, parce qu’il n’a pas dû sortir vraiment indemne de ces quinze années passées dans l’univers de la haute-couture. Et enfin, parce que l’on découvre de quelle manière il fût « remercié » par Karl Lagerfeld lui-même.
Si tu veux en apprendre davantage sur le personnage, retrouve le portrait de Karl Lagerfeld dans notre rubrique Icônes de Mode.
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
Les Commentaires