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Moi, moi et moi

Que faire face aux mensonges perpétuels – Chroniques de l’Intranquillité

Il y a ceux qui mentent un petit peu chaque jour dans les limites du raisonnable et il y a les autres; les baratineurs de haute envergure. Ce dimanche, Ophélie nous parle des gros menteurs, des mythomanes, ces pinocchios fascinants dont la vie ressemble à celle d’un personnage de roman.

Selon une étude hautement scientifique dont je n’ai gardé en mémoire que très peu d’informations, nous mentons en moyenne deux fois par jour. À titre personnel je ne mens jamais, je trouve que la dissimulation est une posture sociale assez vulgaire; toutefois j’ai tendance à penser que cette étude est fausse ou qu’il s’agit encore une fois d’un mensonge éhonté.

J’ai peut-être l’esprit frondeur mais je pense que tout le monde ment en permanence car je doute de tout. Vous avais-je déjà parlé du doute cartésien qui m’habite à chaque seconde ?

Je doute quand quelqu’un m’informe sur la météo du jour, je doute quand je demande l’avis de quelqu’un sur quelque chose ou des informations sur un sujet x ou y. Je me dis sans cesse «c’est SON avis et seulement SA vision des choses, étant donné que l’avis unique et suprême n’existe pas, tout n’est qu’interprétation personnelle, réalité intime et subjective, L’avis, LA vérité n’existent donc pas : en ce bas monde, la vérité des uns est condamnée à être le mensonge des autres.»

Bref, je ne vais pas jusqu’à accuser le monde entier d’être mythomane et j’use de ce terme à la légère (je le précise à l’intention des deux du fond qui ont fait psycho et qui vont m’accuser d’imposture : je ne suis pas habilitée à diagnostiquer ce symptôme sérieusement). Mais comme vous pouvez le constater au fil de ces chroniques, ma vie est un enfer social pavé d’intentions, ni bonnes ni mauvaises, sur lesquelles je trébuche souvent.

Le mensonge et la mythomanie sont des thèmes qui m’ont toujours préoccupée, encore plus depuis que, pour mon plus grand bonheur, je compte dans mon entourage professionnel un affabulateur pathologique de haut niveau.

Comment reconnaître un mythomane

Le mythomane possède un aplomb infrangible qui mettra en doute notre propre interprétation des choses, quitte à nous rendre fous. J’ai déjà été en contact avec un mythomane capable de me faire douter de ce que je voyais. (exemple : « tu sais moi avec mes yeux verts … » « mais t’as les yeux marrons » « non non ils sont verts » « ah. » « ils changent avec la lumière du jour. » « Ah, et là c’est l’heure du marron » « oui mais ce matin ils étaient verts. » « ah. »)

    • Plus vous réfuterez les affirmations du mythomane, plus le mythomane mythonnera. Un bon mensonge est un mensonge qui doit être suffisamment inconséquent pour qu’on ne le remarque pas ou suffisamment énorme pour que, de part son caractère extraordinaire, il bénéficie d’une totale impunité. (« plus c’est gros, plus ça passe » comme le disait plus élégamment l’ami Joseph Goebbels, grand expert dans le domaine du mensonge et de l’extermination de masse.)
    • Il arrive toujours quelque chose à un mythomane, que ce soit par le drame ou par héroïsme, sa vie est jalonnée de péripéties épatantes dignes d’une épopée romanesque à gros budget. Le banal n’existe pas dans son quotidien; posez lui de simples questions telles que « Ça va ? » ou encore le périlleux « Quoi de neuf ? » et vous en aurez pour deux heures de cinéma gratuit en trois dimensions et en couleurs. Une fois que vous avez débusqué un mythomane invétéré dans votre entourage, que faire ? Où aller ? Qui consulter ? Faut il appeler la police ?
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Il ne faut rien faire, sauf s’il agit de quelqu’un dont on se soucie assez pour avoir envie de l’aider (ce n’est pas mon cas). Tout comme on ne réveillera pas un somnambule au milieu de sa nuit, nous nous abstiendrons, en général, d’accabler un mythomane en pleine crise de démence sociale. Si nous sommes du genre conciliant nous pouvons éventuellement écouter ce que le mythomane nous raconte, il n’est cependant pas conseillé de lui répondre afin d’éviter de l’encourager dans son délire pathologique.

Nous mentons tous (sauf moi, car je ne mens jamais – faut-il encore le rappeler ? – et je ne côtoie jamais personne – je vis dans une grotte) et nous savons très bien quelles raisons nous poussent à ces petites trahisons du réel : nous voulons nous valoriser socialement, nier une faute commise, obtenir un avantage, ne pas faire de peine à autrui, sauver notre peau où tout simplement rendre respirable la vie sociale.

Le mensonge, quand nous le proférons, semble avoir un but à court ou moyen terme et c’est ce qui nous distingue probablement du mythomane ou du menteur compulsif qui paraît mentir sans raisons particulières. On est forcé d’admettre que ces mensonges n’ont aucun but ni aucun sens lorsqu’on analyse leur inconséquence et leur inintérêt prodigieux.

Ils semblent former une armure globale contre la réalité, un peu comme un autiste mon mythomane vit dans son monde, sans se soucier de la perception des autres, sans même remarquer que personne n’est dupe de son manège.

Parfois je vois dans ses yeux marrons (qui sont verts mais hélas, jamais quand je les regarde) la panique soudaine due à un excès d’esbroufe et d’inventivité. Car à force de s’inventer des vies et un passé si complexe et mystérieux, le mythomane lui même peut s’embrouiller dans ses salades.

Cependant, le fait d’occasionnellement mentir ne fait pas de nous des mythomanes ni des imposteurs en puissance, c’est seulement une parure et une protection que l’on revêt presque toujours dès que nous sommes en société et c’est ce qui rend le rapport à l’autre si pénible (pour moi) : en grande partie faussé par le jeu des conventions.

Alors soyons honnêtes, si le mensonge est infâme et que la vérité l’est parfois tout autant; si tout n’est qu’affaire de perceptions et d’interprétations, moi je ne sais plus quoi faire, que penser, ni comment vivre.

Malheureusement je ne mens jamais, sinon j’aurai bien essayé de devenir mythomane. C’est que je ressens beaucoup de pitié et un grand sentiment de désolation quand j’écoute les bobards de celui que je connais, mais il semble tellement indifférent à tout ce qui existe en dehors de son monde que, parfois, je le soupçonne d’être beaucoup plus heureux que moi.

— À relire sur le même thème : le papier « C’est pas beau de mentir » par Émilie Laystary


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Les Commentaires

17
Avatar de ielosubmarine
22 février 2012 à 00h02
ielosubmarine
la différence entre menteur et mythomane se joue la dessus: est ce que la personne croit à ses mensonges?

Tu m'aurais mise devant le fait accompli j'aurais nié, de toute ma force j'aurais nié mais pas parce que j'y croyais. Parce que j'avais peur et honte.

Après, j'avoue ne jamais être arrivée au point de ton ami, j'étais plus subtile et malheureusement beaucoup plus douée...
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Voir les 17 commentaires

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