Après deux reports à cause du Covid-19, le film Kaamelott est enfin sorti au cinéma ce 21 juillet. Douze ans après la fin de la série qui a propulsé Alexandre Astier, les fans n’en pouvaient plus d’attendre. On doit l’admettre : nous aussi on avait bien envie de voir ce que ça allait donner. Après tant d’années, on espérait un nouveau traitement des personnages féminins dans l’histoire du roi Arthur. Malheureusement, ils sont toujours ici juste bons à être des femmes ou filles de, et surtout à être moquées et insultées…
Le film démarre alors que Lancelot du Lac règne depuis une dizaine d’années en tyran sur le royaume de Logres. Le roi Arthur a quitté ses terres pour un lieu inconnu et une résistance bancale tente tant bien que mal de s’organiser. Lancelot a mis à prix sa tête et celle de tous les chevaliers de la table ronde. Malgré lui, Arthur Pendragon est amené à réapparaître dans son ancien royaume, au plus grand bonheur de tous ses anciens compagnons.
Une série (et un film) par et pour les mecs
Kaamelott est souvent cité comme une série culte. Certes, toujours par les mêmes : depuis le début, on sait que c’est une série faite par un mec pour des mecs. L’excuse de l’époque (le Moyen-Âge n’était pas la période la plus progressiste, on vous l’accorde) couplée avec un humour vache dont Alexandre Astier a fait sa signature donnait à la série un bon cocktail qui sentait fort la misogynie décomplexée.
C’est toujours la même histoire. On peut y voir du second degré – comme j’aime le penser et qui fait que j’aime aussi cette série – mais on ne choisit pas comment le public va interpréter son œuvre. Kaamelott est devenu alors un bon tremplin pour des idées crasses que des mecs pas nets font passer pour “edgy et cool” – parce que validées par la série – alors qu’ils pourraient… les foutre à la poubelle ?
Après la première demi-heure de film, on a arrêté de compter les insultes gratuites sorties de nulle part que se prennent les personnages féminins dans le film. Les clichés qui étaient déjà bien poussés quand la série était diffusée à la télévision sont toujours là. Séli, la belle-mère d’Arthur, gueule toujours pour rien et la Dame du Lac est toujours aussi folle… Mais après tout pourquoi pas, Karadoc est toujours obsédé par la bouffe et Perceval n’a pas gagné en jugeote. On ne change pas une recette qui fonctionne, surtout quand les fans vous attendent au tournant.
Deux femmes tentent malgré tout de sauver la mise
Il n’y a que Guenièvre qui s’en sort finalement pas si mal. Il faut dire qu’elle partait de loin dans la série, où elle était présentée comme idiote et agaçante à chaque apparition. Elle l’est moins… mais rien de flagrant non plus.
Un seul personnage féminin (qui reste une “fille de”) nous fait croire qu’il y aurait une femme badass au scénario mais elle n’est pas assez consistante. Alors certes, on a le droit à des coups de poing sur la table et à une coupe de cheveux de guerrière, mais ça ne va pas assez loin ! L’auteur aurait pu forcer le trait comme il sait si bien le faire d’habitude…
La seule défense du film c’est que finalement, il ne traite pas beaucoup mieux les personnages masculins. En gros, tous ceux qui ne sont pas Arthur sont des “débiles”, pour le citer. Donc, les insultes ne sont pas réservées uniquement aux femmes. Mais il n’empêche qu’en 2021, entendre un homme crier “Boudin” et “T’es moche” (et vraiment, c’est les plus soft) à une femme, ça ne fait plus rire. Pousser les clichés de chacun des personnages passe encore. Mais entendre ça, vraiment on ne comprend pas.
Plein d’autres éléments font rire dans ce film. La musique, les décors, et même le scénario quelque peu décousu ont tout pour plaire. Alors pourquoi continuer à prendre des chemins qui peuvent paraître faciles mais qui sont juste inutiles ? On en attendait davantage de la part du créateur de cet objet culte qu’est devenu Kaamelott. Peut-être que le deuxième volet saura se rattraper ? On l’espère !
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Les Commentaires
Il n'aime pas Guenièvre, pour lui c'est une idiote qu'il a rencontré 3 jours avant d'être obligé de l'épouser pour raisons politiques. Il éprouve beaucoup de rancoeur et de solitude. Il est frustré d'essayer d'accomplir quelque chose de grand, de suivre le destin imposé par les dieux, d'être fidèle aux mots de César qui l'ont inspiré, mais il patine car il est entouré de gens qui ne comprennent rien, Guenièvre inclus, et qu'il n'a plus de patience ni de pédagogie avec personne. Il se décharge donc sur tout le monde, et elle en particulier le soir après des journées pénibles. Elle est son exutoire. C'est injuste, il la traite mal, il est de parfaite mauvaise foi avec elle, c'est un connard et on a beau rire, il y a un consensus là dessus il me semble dans le public ? L'épisode avec la pâte d'amende ou Guenièvre pleure justement que sa vie c'est de la merde, Arthur se sent coupable, et à raison.
Ses multiples maîtresses sont aussi là pour essayer de combler un vide dans mon interprétation (au delà de l'aspect comique de la polygamie et de la caricature de l'homme de pouvoir macho qui a du succès avec les femmes). Il profite de Mevanoui pour fuir ses responsabilités qu'il trouve de plus en plus lourdes. Mais il y a un épisode ou Guenièvre lui balance une vérité qui fait mal : "peut être qu'un jour vous comprendrez que vous êtes juste incapables d'être amoureux, ni de moi, ni des autres".
Peut être à cause d'Aconia, peut être parce qu'il est blasé, qu'il se sent seul et incompris, il cherche un fantôme du passé et se renferme sur lui même avant de sombrer dans une sévère dépression qui anesthésie tout sentiments. Arthur sourit très rarement tout au long des livres, ce n'est pas quelqu'un qui a beaucoup de joie de vivre.
Pour moi le comportement d'Arthur ne se justifie pas, mais il s'explique, il parle de l'humain et de ses failles. Comme pour Guenièvre ou Lancelot.
Ce n'est qu'au moment où Arthur vit l'absence de Guenievre qu'un changement s'amorce lentement dans la vision qu'il a d'elle, qu'un semblant de relation (et de consentement !) nait enfin quand il décide volontairement d'aller la retrouver. D'ailleurs, sans Guenièvre tout part en vrille, on peut y voir une symbolique. Son rôle est beaucoup plus important, à pleins de niveaux, que ce que Arthur a voulu croire. Pour moi c'est le moment où leur relation devient un vrai choix en toute connaissance de cause plus qu'un concours de circonstances subies.
Même du côté de Guenièvre, cette expérience avec Lancelot la rends également plus adulte. Elle n'est pas non plus amoureuse d'Arthur, elle est amoureuse d'un idéal. Quand son père lui annonce qu'elle va se marier parce que ça arrangerait tout le monde, elle réponds d'accord "si il est blond, quand je m'imagine mon mari dans mes rêves il est comme ça" > elle a toujours "rêvée" de la relation d'amour courtois décrite dans la légende arthurienne classique (et même quand l'amour chevaleresque d'un beau blond se présente enfin à elle, ça ne tourne pas comme dans les comtes de fée, c'est la désillusion).
Aussi moche et tragique que soit la relation Arthur/Guenièvre, j'aime son développement et sa complexité, les multiples lectures qu'on peut en avoir. Je trouve que c'est pas si courant à l'écran, encore moins dans des productions de ce type, d'avoir des relations de couples qui s'éloignent des schémas basiques et se construisent sur le long terme.