Depuis toute petite, je ne peux m’empêcher de contempler une mariée dès que j’en vois une. Outre l’air radieux et l’effervescence autour d’elle, c’est chaque fois fascinant d’observer comment elle a choisi de s’habiller pour ce qui est en général un des plus beaux jours de sa vie.
À l’heure actuelle, il devient courant de voir des alternatives à la robe blanche, dans les couleurs comme dans le type de vêtement, mais je garde un amour inconditionnel pour la tradition. Quand le choix de la tenue est abordé avec les futures mariées, on arrive vite au « Pas trop de froufrous, tu ne veux pas ressembler à une meringue ! ». Sobriété et simplicité sont souvent les maîtres-mots.
Pourtant, c’est bon les meringues ! Plus sérieusement, même si je trouve chaque mariée magnifique, je suis lasse de voir sans cesse les mêmes modèles basiques. Lady Di était peut-être similaire à un grand chou à la crème sous ses mètres de tissus mais au moins c’était différent. Original. SPECTACULAIRE !
Plus que le style en lui-même, propre à chacune, c’est la fantaisie qui me fascine le plus dans le choix de la robe, le petit grain de folie façon star hollywoodienne. Dans cet esprit, c’est donc tout naturellement que j’ai plongé au cœur des années 50 pour ma quête de robes de mariée légendaires et meringuées à souhait.
Replaçons un peu le contexte : la guerre est finie et l’austérité pesante s’achève. Après une décennie concentrée sur le « pratique et confortable », les femmes devant travailler à l’usine, la mode connaît un second essor et retrouve un souffle de créativité et de liberté. Telles les années folles, les années 50 sont symbole de fantaisie et de glamour.
Les créateurs stars du moment sont principalement Christian Dior, Pierre Balmain et Hubert de Givenchy — tous les yeux sont tournés vers Paris. Le virage prend pourtant place quelques années avant, en 1947 : Christian Dior redessine la silhouette en remontant la taille et en la ceinturant, le ventre creusé et les hanches soulignées par une guêpière masquée par un large jupon. La poitrine est mise en avant et les épaules sont arrondies sous une veste élégante — voici le fameux « New Look » ! L’ère de la pin-up démarre avec sa silhouette sensuelle en forme de sablier.
Observons désormais dans ce courant les robes de mariée qui me fascinent et me fascineront toujours pour un petit top 3.
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Grace Kelly, digne d’un conte de fée
C’est à 26 ans que la sublime actrice Grace, qui porte bien son nom, épouse le Prince Rainier de Monaco le 19 avril 1956. C’est un mariage princier en grande pompe digne d’un Disney et rassemblant 1500 journalistes sur place et 30 millions de téléspectateurs derrière les écrans. Passionnée de mode et bien décidée à être éblouissante le jour J, Grace dévalise les boutiques de New York deux semaines avant le mariage pour son trousseau : foulards en soie et mousseline, chapeaux, chaussures… Au total, elle emporte l’équivalent de cinq millions de francs dans ses bagages à Monaco.
Pour dessiner sa robe, elle fait confiance à Helen Rose (la costumière de son film High Society avec Frank Sinatra) pour révéler tout son glamour hollywoodien avec l’élégance d’une princesse. Le résultat est fait de 90 mètres de tulle de soie, 46 mètres de taffetas de soie, de la dentelle de Bruxelles à profusion et des milliers de perles brodées à la main. Le minimalisme n’est clairement pas le kif de l’époque, pour mon plus grand bonheur.
Ma première pensée devant cette robe fut de trouver qu’il y avait un étrange contraste ! Nous avons là un haut raffiné composé d’un corsage ajusté et recouvert de dentelle Point de Rose à l’aiguille. Le tout est délicatement boutonné sur l’avant avec col montant et recouvre entièrement les bras, tandis que pour le bas nous faisons face à une énorme jupe opaque de taffetas épais et bouffant. Celle-ci recouvre elle-même trois jupons de maintien.
C’est bien simple, on dirait qu’on a pris deux morceaux de robes différentes et qu’on les a assemblés sous la large ceinture. C’est ce qui rend cette tenue si intéressante : un mix parfait de douceur raffinée pour le haut et d’imposant, de magistral pour la jupe. Tout Grace, en somme. Ce mélange de textures donne à l’ensemble tout son relief, accentué par une ribambelle de motifs floraux et de perles.
De Brides Magazine.
Pour compléter sa tenue, elle reçoit du Prince Rainier une parure complète — un collier, une broche, un bracelet et une bague — composée de 800 diamants et 70 rubis. Le plus époustouflant reste cependant sa coiffure. Point de tiare ou de simple chignon, mais une coiffe de dentelle incrustée de fleurs d’oranger en cire ou en papier maintenant un large voile circulaire pour dévoiler le visage…
Les chaussures sont dessinées par David Evins, avec un penny de cuivre intégré dans la chaussure droite pour porter chance. La rumeur dit que l’actrice a volontairement choisi de petits talons pour ne pas paraître trop grande à côté du Prince, mais si ça se trouve, elle était juste maline et a voulu épargner un peu ses pieds !
Déjà dotée d’une grande beauté, Grace était tout simplement stupéfiante pour son mariage. Enrubannée dans sa dentelle, elle rappelle les mariées traditionnelles des grands créateurs italiens, avec une touche d’exubérance américaine. Au-delà de l’originalité et de la complexité de la robe, son génie fut de trouver un modèle qui met en valeur tant son physique que sa personnalité tout en sachant prendre des risques. Je valide, vénère et la mets au sommet de mon classement.
Audrey Hepburn, la nymphette ingénue
C’est le 24 septembre 1954 qu’Audrey Hepburn dit oui à son premier époux, Mel Ferrer, à Burgenstock (Suisse). Elle est actrice, il est réalisateur ; inévitablement leurs chemins se croisent et la magie opère. Ce mariage civil, très loin de l’effervescence de celui de Grace Kelly, se fait en toute discrétion avec les amis proches et la famille. S’ensuit une petite cérémonie dans une chapelle protestante locale le lendemain.
Proche de Givenchy dont elle porte nombre de créations, c’est pourtant vers Pierre Balmain qu’Audrey se tourne pour confectionner sa robe de mariée. Déjà très populaire, celui-ci est maître dans l’usage de l’organza et du shantung, tissus fort prisés à l’époque pour créer des formes amples.
De From The By Gone.
À la manière de Grace Kelly, nous retrouvons une taille ceinturée de soie, un corset ajusté et un haut sans décolleté boutonné sur l’avant. C’est cependant un tout autre style qu’adopte Audrey grâce aux détails…
Très révélateur de sa personnalité, son choix de la coupe et des tissus se porte sur la sobriété et la légèreté avec une touche de fantaisie fort innocente : en premier lieu, il y a un large jupon aérien sous le genou façon ballerine, parfait pour celle qui est également une extraordinaire danseuse à côté du cinéma. Pour contrebalancer la rigidité du haut en organza sans motif, Balmain conçoit de volumineuses manches bouffantes. L’élégance n’est pas mise de côté grâce à de longs gants remontant jusqu’aux coudes, très caractéristiques d’Audrey qui les porte fréquemment dans ses films comme dans la vraie vie. Enfin, la ceinture est bouclée par un énorme nœud dans le dos tel un œuf de Pâques géant.
Notons que l’héroïne de Breakfast At Tiffany’s ne porte aucun bijou. Elle accessoirise sa tenue en arborant une simple couronne de fleurs et en remontant son col Claudine. Elle portera par la suite ce genre de col très souvent, et le remettra au cœur des tendances en 1955 en abordant un col Claudine sur un chemisier rouge vif qui surprendra tout le monde.
De From The By Gone.
Audrey Hepburn ne correspond pas aux canons de son époque, elle est menue et filiforme quand partout on promeut les courbes façon pin-up et les attributs plus généreux. Cela ne l’empêche pas de devenir une icône de style et de charme en assumant son physique femme-enfant ingénu avec beaucoup de classe !
On sait tou•te•s combien il reste difficile d’affirmer un physique différent des critères de beauté en vigueur, aussi unique soit-il ; Audrey se moquait bien des stéréotypes, et pour cela je lui tire mon chapeau. Le jour de son mariage n’y fait pas exception et une fois encore, l’actrice a su parfaitement mettre sa silhouette en valeur avec simplicité, telle une petite fée des bois. C’était une tenue pleine de douceur et de personnalité, en accord parfait avec cette cérémonie intime. Son impeccable sens du détail dans les tenues les plus simples et sa fraîcheur la positionnent en seconde place de mon classement !
Jackie Kennedy, la Sissi BCBG
Le 12 septembre 1953 à Newport (Rhode Island), Jacqueline « Jackie » Lee Bouvier bouscule son destin en épousant le sénateur John Kennedy, destiné à devenir le 35ème président des États-Unis. Huit cent convives sont présents à l’église et plus de mille à la réception. On raconte que Jackie aurait voulu se tourner vers une création parisienne très tendance mais que John lui aurait imposé un modèle traditionnel plus sage. Qu’à cela ne tienne, cette icône du chic peut s’adapter à tout.
C’est l’Afro-Américaine Ann Lowe qui réalise la robe de Jackie, bien qu’elle n’en reçoive aucun crédit officiel malgré sa popularité auprès des célébrités. On frôle la catastrophe lorsque, dix jours avant le mariage, une inondation dans l’atelier ruine la robe destinée au mariage et huit autres robes du cortège… Ann entreprend alors un travail intensif jour et nuit pour les refaire et Dieu merci, son fournisseur a suffisamment de tissu en stock pour recréer la tenue de Jackie ainsi que les robes des demoiselles d’honneur en à peine huit jours.
Quand on sait que la première robe avait demandé huit semaines de travail, ça inspire tout de suite le respect et un gros stock de caféine.
De The Official Blog of Diamond in the Rough.
Quarante-cinq mètres de taffetas de soie sont utilisés pour concevoir une robe digne d’une Sissi moderne, dans une teinte ivoire qui met en valeur le teint de porcelaine de Jackie. Toujours selon les codes de l’époque, la taille est marquée et accentuée par une jupe très ample brodée de grandes roses et décorée de petites fleurs de cire. On trouve sur le bas un plissé de plusieurs étages pour accentuer l’effet de volume – froufrous un jour, froufrous toujours.
Cette fois, pas de corsage montant mais un décolleté portrait qui dévoile pudiquement les épaules, et de petites manches pour conférer de l’élégance à la tenue.
Notons toutefois que le long voile de dentelle brodée de fleurs n’est pas une création d’Ann Lowe, mais appartenait à la grand-mère de Jackie, à qui elle a donc rendu un petit hommage en le revêtant à son propre mariage. Elle choisit une tiare de dentelle façon bonnet et décorée de fleurs d’orangers pour le maintenir, très semblable au style de Grace Kelly.
Face à une robe aussi imposante, les accessoires restent minimes et discrets. Elle arbore une broche de diamants en forme de feuille reçue de ses parents et un bracelet de diamants, cadeau de son fiancé. Une rangée de perles et des petits gants à longueur des poignets complètent l’ensemble dans une touche BCBG typique de la Première Dame en devenir.
Jackie Kennedy est généralement considérée comme une icône mode des années 60, mais sa classe et son sens des tendances étaient déjà clairement acquis la décennie précédente. La robe suscite des débats, on dit qu’elle porte Jackie plus que Jackie ne la porte, dans le sens où ce n’est pas le style qu’elle aurait choisi d’elle-même. Même si la tenue sort des habitudes de cette avant-gardiste, elle épouse malgré tout parfaitement ses courbes et révèle son chic naturel de façon somptueuse.
Cette robe, c’est un peu la version adulte de mon déguisement de Belle (de La Belle et la Bête) au carnaval de l’école quand j’étais enfant : imposante, épaisse et scintillante, ultra kitsch en fait. J’adore. Jackie reste à mes yeux une mariée resplendissante, et à jamais une de mes meringues préférées.
En conclusion…
À travers ce petit tour dans les noces des années 50, nous retenons principalement le décolleté portrait ou col montant, les manches bouffantes courtes ou longues et étroites, la taille haute marquée, la jupe ample de tissu épais, une large coiffe de dentelle, des gants, un jeu de volumes et de textures… Ça vous rappelle quelque chose ?
Eh oui : Cendrillon, devenue princesse le jour de ses noces, est apparue au cinéma en 1950 et anticipait toutes les tendances des mariages les plus fastueux à venir ! « Coincidence ? I think not. »
Pour toutes celles qui souhaitent ajouter une touche de rétro et un soupçon de meringue à leur tenue pour le grand jour, il ne reste plus qu’à s’inspirer de ces épouses légendaires comme l’a fait Kate Middleton à son propre mariage. On va tout de même éviter les pantoufles de verre pour être la reine du bal et, comme Grace Kelly, épargner un peu nos pieds !
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Les Commentaires
Toutefois je préfère quand même la mode - en général, pas que robes de mariées - des années 20/30 avec les tailles pas du tout marquées... encore un autre univers ! ^^
Je me rends très régulièrement sur un tumblr super intéressant sur l'histoire de la mode : http://omgthatdress.tumblr.com/
Allez dans les tags à droite si vous voulez trier les posts par décennie ! Je vous assure, ce tumblr vaut vraiment le détour !