L’histoire commence il y a 50 ans, le 19 avril 1967, à Boston, aux États-Unis.
À l’époque, les femmes ont l’interdiction de participer au marathon. Il est de toute manière impensable qu’elles puissent réaliser une telle performance…
Ce n’est pas l’avis de l’américaine Kathrine Switzer qui s’inscrit en secret à la course. Elle n’utilise alors que ses initiales, K. V. Switzer, qui ne suggèrent pas un genre en particulier.
Grâce à cette astuce, elle devient à 20 ans la première coureuse à faire le marathon de Boston.
Le 17 avril 2017, soit un demi-siècle plus tard, cette femme aujourd’hui âgée de 70 ans a réitéré l’exploit.
Un symbole vivifiant de la lutte contre le sexisme : cette année, y avait plus de 30 000 participantes au départ de cette course mythique…
Deux marathons, un combat : le sexisme
Quand Kathrine Switzer se lance dans le marathon en 1967, l’organisateur de la course se rend compte de sa présence, l’attrape et lui crie de dégager immédiatement.
Heureusement pour la coureuse, son copain réussit à repousser l’homme. Elle réalise alors que sa performance ira bien au-delà d’un exploit sportif, comme elle l’explique dans une interview accordée à ABC :
« Je me suis dit que si j’abandonnais la course, aucune femme ne croirait avoir sa place dans un marathon, aucune femme ne penserait pouvoir tenir cette distance. »
Aujourd’hui, elle raconte que ce marathon couru en 2017 a également pris une tournure émouvante.
« Quand j’ai traversé la ligne finale, je me suis simplement dit que j’étais très reconnaissante de l’expérience, de célébrer l’énorme progrès et les changements qui ont été effectués depuis. »
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261 Fearless, un mouvement féministe pour encourager les femmes à courir
En 1967, quand Kathrine Switzer court le marathon, elle porte le numéro 261.
Alors, elle a décidé de monter ensuite une association nommée « 261 Fearless », comprenez « 261 sans peur ». Son but est simple : aider les femmes à s’empouvoirer par le médium du jogging.
En 2017, 125 coureuses de ce groupe l’accompagnaient sur la course afin de lever de l’argent pour la charité.
Un combat qui a fait parler de lui.
Switzer raconte, toujours à ABC, qu’en 2017, la course a eu un savoureux goût de victoire.
« Tout au long de la route, les gens qui connaissaient mon histoire et voyaient mon dossard, numéro 261, criaient.
C’était génial, surtout que je voyais des petites filles accompagnées de leur mère qui sautaient de joie. (…) »
Kathrine Switzer a 70 ans et ne compte pas s’en arrêter là
Au delà du symbole féministe, Kathrine Switzer a réalisé un véritable exploit sportif à 70 ans. Mais quand on la questionne sur son âge, la femme balaie la question.
« Les gens disent aujourd’hui les mêmes choses sur les personnes âgées que ce qu’ils disaient dans le passé à propos des femmes. C’est à dire : ne force pas trop, tu es trop faible, trop fragile, tu pourrais te faire mal…
Je ne pense pas qu’il y a vraiment de limite d’âge, et je pense que c’est même la prochaine frontière à traverser ! »
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Ne vous y méprenez pas : la marathonienne n’est pas pour autant dans le déni de son âge. Au contraire, elle l’accepte, tout simplement. Elle explique d’ailleurs avoir dû choisir pour la course entre un pantacourt ou un short.
« J’ai conscience qu’à 70 ans, mes jambes ne sont pas aussi belles que quand j’étais jeune. Mais je me suis quand même dit que j’allais porter un short.
J’ai les jambes d’une personne de 70 ans, c’est normal qu’elles ne soient pas très belles. Mais je m’en fiche parce que la seule chose que je veux, c’est courir, et courir bien ! »
Une belle leçon d’acceptation de soi après cette performance mythique pour la lutte contre le sexisme dans le sport !
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Les Commentaires
Ça vaut la peine de le lire jusqu'au bout, elle explique (spoiler) que c'est juste parce qu’elle adorait courir qu'elle a participé au marathon, pas pour défier les stéréotypes (d'ailleurs, rien dans les règles du marathon ne l'interdisait aux femmes). C'est seulement quand un des organisateurs l'a agrippée, après s'être remise du choc d'être attaquée en pleine course, qu'elle s'est rendu compte qu'abandonner là donnerait raison à l'agresseur, porterait préjudice aux prochaines femmes coureuses et qu'elle ne pouvait pas endosser cette responsabilité. Et boum, première femme à finir le marathon de Boston !