« Nous estimons que la loi française, qui interdit l’aide active à mourir, est injuste ». C’est par cette phrase que se résume « Le manifeste des 109 », publié jeudi 16 mars en couverture de L’Obs. Clin d’œil, 50 ans après, au « manifeste des 343 » qui réclamait, en 1971, la légalisation de l’avortement dans les colonnes du même journal.
Mais, qui sont les 109 ? Annie Ernaux, Clémentine Autain, Françoise Hardy, Sandrine Bonnaire, Nathalie Baye… Des personnalités de tous horizons qui s’unissent autour d’une pétition pour demander la réforme de la loi française sur la fin de vie. Cette tribune intervient alors que, dans tout juste deux semaines, la Convention citoyenne sur la fin de vie présentera ses conclusions au gouvernement.
La loi actuelle est inadaptée à la réalité des patients
Actuellement, la loi Claeys-Leonetti, adoptée en 2016, encadre la fin de vie des malades incurables. Elle proscrit l’euthanasie et le suicide assisté, mais permet une « sédation profonde et continue jusqu’au décès » dans certains cas bien précis.
Chaque année, des Françaises et des Français, atteints de maladies graves et incurables, sont confrontés à des souffrances physiques et morales que les traitements ne parviennent plus à soulager. Ils demandent à leur médecin de les aider à mourir et se heurtent à un refus, condamnés à subir une fin de vie longue et douloureuse, en contradiction avec leur volonté libre et réfléchie.
« Le manifeste des 109 », L’Obs, 16 mars 2023
Face à l’inflexibilité de cette loi, en contradiction avec le souhait des patients, certains partent donc à l’étranger, aidés de leurs proches quand ils le peuvent, dans des pays où le suicide assisté et l’euthanasie sont légaux. Les personnalités signataires du manifeste racontent ce chemin éprouvant vers une fin de vie digne :
Nous sommes leurs conjoints, leurs enfants, leurs frères, leurs sœurs, leurs familles, leurs amis. Nous sommes celles et ceux qui ont cherché le bon médecin, qui avons pris des trains et franchi des frontières, et qui nous sommes résolus à tout faire pour que chacun, que chacune puisse finir ses jours comme il ou elle l’a décidé.
« Le manifeste des 109 », L’Obs, 16 mars 2023
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Des conclusions attendues le 2 avril
Voulue par le gouvernement, la convention citoyenne pour la fin de vie réunit 184 citoyens tirés au sort, qui doivent, pour le 2 avril, livrer au gouvernement la synthèse de leurs réflexions sur la question posée par la première ministre : « Le cadre d’accompagnement de la fin de vie est-il adapté aux différentes situations rencontrées ou d’éventuels changements devraient-ils être introduits ? ».
Ce week-end du 17, 18 et 19 mars, ils entament leur 8ᵉ et avant-dernière session de travail, nourris, peut-être, de ce « Manifeste des 109 ».
En février, lors d’un vote au CESE, ils avaient été 84 % à estimer que le « cadre d’accompagnement de la fin de vie » actuel n’est pas adapté. 75% d’entre eux se disaient favorables à ce que la loi évolue pour ouvrir l’accès à « une aide active à mourir ». Les modalités de cette fin de vie restaient néanmoins en débat, alors qu’ils commençaient la phase d’harmonisation pour pouvoir proposer un document concis, au plus près des points de vue de chacun.
Si les conclusions de la convention doivent servir d’éclairage majeur pour abreuver les débats des parlementaires, Élisabeth Borne a bien rappelé que les citoyens n’ont pas vocation à légiférer. Comprendre : le gouvernement se réserve le droit de ne pas en tenir compte. Et ce ne serait pas la première fois que le peuple est ignoré.
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