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Tout ça pour des arbres…
Au départ, c’est un parc situé à côté de la place Taksim qui est au coeur du débat. En effet, le gouvernement veut déraciner et déplacer 600 arbres de ce parc populaire (Gezi Parki) pour reconstruire des bâtiments qui s’élevaient à ce même endroit sous l’ère ottomane. Et mettre un centre commercial dedans. Encore un. Alors que le parc Gezi est l’un des seuls situés sur la rive européenne d’Istanbul et reste un des lieux de rencontre et de promenade préférés des Stambouliotes.
Des militants pour la protection de l’environnnement se réunissent aux abords du parc et commencent un sit-in, dès le mardi 28 mai. Le jeudi, ils sont plusieurs milliers et ont installé des tentes, toujours pacifiquement et dans une ambiance bon enfant.
Le vendredi 31 mai, à 5 heures du matin, les forces de police bloquent l’entrée du parc et lancent des gaz lacrymogènes sur les occupants. Environ une heure plus tard, les militants sont sortis du parc et s’ensuit une période relativement calme. Cependant en fin de matinée, les militants sont revenus, rejoints par des personnes de l’opposition, des députés notamment.
Malgré la répression extrêmement dure, il y a de plus en plus de monde aux abords de la place Taksim. Il faut savoir qu’en temps normal, cette place est déjà pleine de monde (y compris des touristes), surtout en cette période de l’année. Tout ceci n’empêche pas les forces de l’ordre d’utiliser toujours plus de bombes lacrymogènes et des canons à eau.
La transformation du mouvement
Au fil des heures, des centaines de Turcs et Turques se pressent sur la place Taksim. À partir de ce moment, ce n’est plus une simple protestation contre un projet d’urbanisation. Le mouvement se transforme peu à peu en une contestation des actions gouvernementales. Le park Gezi n’a été qu’un déclencheur.
En effet, il faut savoir que la Turquie est un pays laïc depuis la Constitution de 1924, un an après la mise en place de la République par Mustafa Kemal « Atatürk ». Or depuis 2002, l’AKP, le parti de la justice et du développement, est le parti majoritaire. Le premier ministre Recep Tayyip Erdogan a petit à petit bridé certaines libertés.
Dernière réforme en date : la vente d’alcool a été strictement encadrée, on n’a donc plus le droit de vendre de l’alcool dans un rayon de 100 mètres autour des écoles et des lieux de culte, ni dans les stations services, ni entre 22h et 6 heures du matin ; la pub pour des boissons alcoolisées sur Internet est également interdite.
Quoi qu’il en soit, les manifestations se sont poursuivies dans la nuit du vendredi au samedi. Toute la nuit et dans de nombreux quartiers d’Istanbul, la population a montré son soutien aux manifestants
en sortant sur les balcons ou aux fenêtres et en faisant le plus de bruit possible, en tapant sur des casseroles, en applaudissant…
Le samedi matin, une foule dense venant de la rive asiatique s’est pressée sur le pont du Bosphore, pour rejoindre la rive européenne et la place Taksim. Une image rare et magnifique, mais qui a entraîné des heurts avec la police de l’autre côté du pont, à Besiktas, avant que les forces de l’ordre ne laissent finalement passer les piétons.
Des médias muets
Un des facteurs importants de ces manifestations est l’absence totale d’informations par les médias locaux. En effet, si les journalistes internationaux ont commencé à couvrir les évènements dès le vendredi après-midi, il n’y a pour l’instant que quelques chaînes turques qui traitent des manifestations. Les journaux et les radios sont muets.
Toute l’information provient des médias étrangers et des réseaux sociaux, avec toutes les dérives que cela peut entraîner. Cependant, le gouvernement a, à plusieurs reprises, bloqué Twitter et Facebook à proximité des lieux de manifestation, rendant l’information impossible à partager. Les hashtag #direngezipark (occupation du parc Gezi) et #tayipistifa (Tayyip démission) sont dans les tendances mondiales.
La révolution ne sera pas télévisée !
Le repli des forces de police… enfin, presque
Le samedi, en fin d’après-midi et après que le premier ministre a déclaré que les manifestants devaient stopper toute contestation, les forces de l’ordre se retirent enfin des alentours de Taksim. Pendant quelques heures, les Stambouliotes manifestent leur joie en reprenant la place, en klaxonnant à tout va et en applaudissant dans plusieurs quartier de la ville.
Mais vers 19h, les forces de police se déploient à nouveau dans le quartier de Besiktas, près du palais de Dolmabahçe, où se trouve le burau du premier ministre. Les heurts sont violents et se poursuivent toute la nuit. Sur les réseaux sociaux, les manifestants montrent que les gaz lacrymogènes utilisés sont périmés. Dimanche matin, le quartier est redevenu calme et a été nettoyé à l’aube, même s’il reste des gravats.
Et maintenant ?
Maintenant, il faut attendre. Des manifestations sont prévues aujourd’hui encore. La contestation s’est étendue à d’autres villes en Turquie, notamment Ankara, Izmir et Adana. Mais nous ne disposons que de peu d’informations. Le bilan officiel fait état de 79 blessés et 939 personnes interpellées. Selon Amnesty International, il y aurait deux morts et un bon millier de blessés.
Pour aller plus loin :
- Un Tumblr avec des photos (attention, certaines sont très dures)
- Une page Facebook des évènements (en anglais)
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Les Commentaires
Merci pour ta réponse ! (eh oui, encore une fois, mieux vaut tard que jamais >.< ) Bon vu que je me suis connectée hyper régulièrement sur madmoizelle ces derniers temps (bouh, honte à moi) bah je viens de voir ton msg. Et... je suis déjà revenue de mon voyage. Et on a finalement décidé d'aller en italie+grèce, ça nous a paru plus... propice au tourisme. Mais c'est pas grave! parce que l'été prochain j'ai une copine turque qui m'invite à venir visiter, et j'ai bien l'intention de passer par Istanbul. Et t'inquiète pas t'es pas la seule folle, elle aussi rêvait d'y être pour manifester Voala, bonne soirée à toi !