Le 3 mars 2018
En 2014, j’ai pris une décision qui allait bouleverser ma vision du voyage.
Pour la première fois, je partirais seule. J’avais 22 ans et un besoin d’aventure en solitaire. Je profitais d’un stage imposé par mon école pour élargir les horizons qui m’avaient jusqu’alors été imposés, et OSER.
La meilleure nouvelle au monde
Au détour d’une conversation avec ma mère, lors de laquelle j’évoquais mon envie de côtoyer les bêtes, les vraies, pas celles qui ronronnent honteusement sur mon canapé, elle m’a regardé d’un air plein d’intéret.
Après un coup de fil à un de ses amis, un chirurgien qui opère bénévolement des fauves en Afrique du sud pendant son temps libre, elle m’a glissé :
« Tu pars dans 3 semaines en Afrique du Sud, t’occuper de bébés guépards. »
Les cris assourdissants se sont bien évidemment succédés pendant une bonne demi-journée. Fuck les voisins.
Quelques semaines plus tard, j’embarquais pour un vol de 11 heures, direction Johannesburg.
Dans l’avion, l’excitation montait, en même temps qu’une crainte inévitable.
Mais l’écran placé devant mon nez et les milles propositions de films qui défilaient ont très vite eu raison de mon stress.
Bien sûr, pour nager dans le cliché sans aucune vergogne, j’ai choisi Out of Africa. Au moment d’atterrir, je me sentais l’âme d’une Meryl Streep.
Sauf que l’air de l’avion m’avait cramé les cloisons nasales, asséché la peau, et fait enfler les chevilles. J’étais un poil moins fraiche que Meryl, quoi.
Mais peu importait, j’allais passer plusieurs semaines avec des animaux sauvages. Le style attendrait.
Quelques jours auparavant, j’avais fièrement été chez Décathlon, faisant des achats qui pour une fois me serviraient à quelque chose.
Affublée d’un sac à dos plus grand que moi, d’un pantalon de ranger, d’un chapeau d’Indiana Jones, de 3 tubes de crème solaire indice 50 et d’une bonne humeur très rare, je débarquais donc à Johannesburg.
Et là, panique. Mon vol suivant était dans 30 minutes. L’aéroport était immense. Un quart d’heure plus tard, j’arrivais essoufflée à la porte d’embarquement. Le vol n’était pas clos, mon voyage était sauf, mon palpitant beaucoup moins.
Ça n’est qu’en regardant l’Afrique cavaler sous l’avion que j’ai senti les prémisses du dépaysement. Le continent ne m’était pas inconnu. J’avais parcouru le Togo et le Gabon, entre autres, avec ma mère.
Mon premier voyage en solitaire
Elle, elle est hôtesse de l’air, et a arpenté le monde pendant 35 ans, au service d’Air France. Depuis toujours, elle me traîne un peu partout, à la rencontre de populations, de gens, et de territoires, qui ne me quitteraient jamais, et qui nourriraient mon besoin constant de partir.
Quand je suis rentrée au CP, elle m’a fait rater l’école plusieurs fois, pour m’emmener ailleurs. Peu importait où, du moment que c’était loin. Dépaysant.
Elle m’a trimballée partout, des favelas perchées en haut des collines brésiliennes aux marchés surpeuplés d’Afrique
subsaharienne. Elle m’a fait goûter aux piments rouges, aux verts, aux jaunes, et a ri quand ils m’ont brûlé la langue.
Elle s’est foutue de moi quand j’avais peur de traverser des village paumés, et encourageait toujours plus ma témérité.
Elle était mon pilier partout et tout le temps.
Et pour la première fois j’étais sans elle.
J’allais envisager l’altérité sans aucune protection.
Et puis la crainte a disparu. Ou plutôt non, mais elle s’était transformée en quelque chose d’excitant.
Dans l’avion qui partait de Johburg, j’ai eu à manger. Un plat simple mais réconfortant qui venait asseoir mon plaisir.
Le bonheur du dépaysement
Tout doucement, l’avion a piqué du nez, me rapprochant un peu plus de l’expérience tant attendue. Doucement, il a entamé sa descente. Et là, le spectacle.
Les animaux couraient, de part et d’autre de la piste d’atterrissage. Des girafes et des phacochères. Je n’avais même pas atteint le Centre, que la vie sauvage envahissait déjà les paysages.
J’ai eu du mal à ne pas pleurer, tant il y avait de choses à voir, qui m’avaient toujours fait rêver. Elles étaient maintenant très proches, si accessibles.
En sortant de l’avion, la chaleur m’a envahi la gorge, déliant ma langue.
Yann était là, qui m’attendait. Yann (lis Yön) était le grand ranger de l’aventure. C’est lui qui s’occupait du bon déroulement des activités effectuées par les Volonteer Students. Ce que je m’apprêtais à devenir.
Une rencontre solennelle
Yann, c’est pas un rigolo. Il a ses heures, mais la plupart du temps, il n’a pas le temps, justement. Alors il a l’air froid, mais gère tout d’une main de maître. C’est tout ce qu’on lui demande, finalement.
Après avoir essayé de lui décrocher un rire, au détour d’une conversation, j’ai compris très vite que nos échanges se cantonneraient à quelque chose de cordial, de légèrement amical tout au plus.
Pourtant, la route était encore longue, qui nous séparait du centre. J’en profitais pour lui poser plusieurs questions, auxquelles il répondait toujours, placide.
En percevant une forme rigide et foncée se découper dans le lointain, je comprenais que nous approchions du portail qui ouvrirait la voie à mon séjour.
Soulagée de couper court à la discussion avec le propriétaire de la Jeep, je profitais enfin de la vue. Je laissais le grand ranger taciturne dans ses pensées, et regardais les miennes courir dans la savane.
Mon impatience inquiète augmentait.
Que se passerait-il de l’autre côté ?
Sans que j’ai le temps de m’auto-rassurer, le portail s’est ouvert sur l’un des plus beaux séjours de ma vie. J’arrivais au Moholoholo Rehabilitation Center.
Un endroit unique
Un drôle d’endroit, délimité par des grillages, qui s’endort tôt aux pieds des collines. Un endroit où, l’hiver, il fait très chaud le jour et très froid la nuit.
Là-bas, j’apprendrais que la vie des hommes est rythmée par les sacrifices, mais qu’elle est mue par la passion.
J’apprendrais que le bonheur des hommes peut tenir à un rugissement, à une empreinte dans le bush desséché.
Et que tous ces hommes ont un même combat : continuer à faire vivre la nature, coûte que coûte…
La semaine prochaine, tu en sauras beaucoup plus sur les habitants du Moholoholo.
Je te présenterai Danny le bébé rhinocéros, et de jeunes guépards dont j’ai oublié les noms. Tu rencontreras les autres Volunteer Students, et je te filerai des conseils, si toi aussi tu souhaites tenter l’aventure.
Mais il faudra patienter.
En attendant, je te tease un peu ! La semaine prochaine tu trouveras un très gros serpent, la recherche d’un hippopotame, le sauvetage d’un vautour, et un écureuil devenu mon meilleur ami…
Allez, je te laisse sur cette photo extrêmement flatteuse, qui démontre deux choses : cet écureuil est vraiment un individu sans gêne, et à l’époque je m’épilais trop les sourcils.
Passe un merveilleux samedi !
À lire aussi : Comment j’ai appris la valeur du dur labeur… dans une ferme de l’Himalaya !
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Les Commentaires
Pareil pour moi ! Je suis fan d'animaux, je suis d'ailleurs ostéopathe animalier, et serais plus que partante pour aller m'occuper d'animaux en Afrique pendant un certain temps. Je me demandais combien de temps minimum peut on être bénévole dans ce type de refuge ? malheureusement je ne peux pas quitter mes patients équins et canins pendant trop longtemps.. Je suis en train je chercher les infos
Tu nous fais rêver Kalindi, j'ai hâte de lire la suite de ton aventure de ranger <3