La Daronne est la reine des conseils pas si cons enrobés dans une grosse dose d’humour plus ou moins subtil. La voici de retour pour voler au secours d’une lectrice !
La question pour la Daronne
Chère Daronne,
Je suis en couple avec une fille géniale depuis un an et demi. Nous allons même nous installer ensemble à la rentrée. Même si je suis très heureuse avec elle, je reste très indépendante, d’autant plus qu’il s’agit de ma première histoire sérieuse.
Avant de la rencontrer, j’avais l’habitude de partir une semaine toute seule en vacances chaque année. Je choisis souvent un endroit calme, et j’en profite pour me ressourcer, me promener dans la nature, écrire, faire des siestes, le soir, je mange au restaurant avec un bon verre de vin et mon bouquin. Pour certains, ça semble triste, mais moi, j’adore ce moment avec moi-même et il me recharge pour affronter la rentrée.
Le truc, c’est que, même en couple, et même si j’ai adoré les vacances que j’ai déjà passées avec ma copine, j’ai besoin de ce moment seule. L’année dernière, elle n’avait pas de congés pendant l’été à cause de son métier, j’avais donc un prétexte pour « m’échapper de la ville, même seule ». Cette année, je comptais rejouer la même carte et m’évader début septembre, mais ma copine vient de m’annoncer qu’elle allait pouvoir poser des jours pour partir avec moi.
Elle accepte mon caractère indépendant, mais j’ai peur qu’elle croie que je ne l’aime pas si je lui avoue la vérité.
Tu peux m’aider ?
Sarah
La réponse de la Daronne
Mon petit risotto (sauras-tu deviner ce que je mange actuellement ?)
Avant d’entrer dans le vif du sujet, je voudrais revenir sur un point qui me paraît important de clarifier. Tu apposes le terme tristesse au programme le plus extraordinaire qui m’ait jamais été donné de lire. Ce n’est pas sérieux, les mots ont un sens, tu sais. Lire, se balader, buller, toute seule, dans un bel endroit, pendant une semaine, ce n’est pas seulement un rêve pour la plupart des gens, c’est un rêve dont le seul fait d’envisager qu’il puisse un jour se réaliser permet de se lever le matin. Donc non, ce n’est pas triste, c’est merveilleux.
Maintenant que les choses sont dites, revenons à nos moutons. Je dois dire que tu t’es fichue dans une sacrée panade. Et je préfère te prévenir : les chances que tu t’en sortes totalement indemne sont minimes, tous comme les risques de catastrophes si tu t’y prends correctement.
Alors, quelles sont tes options ?
Devoir subir cette présence estivale jusqu’à la fin de tes jours
Ou du moins jusqu’à votre rupture, ce qui n’est pas non plus une perspective réjouissante. Ta première option consiste donc à assumer bravement les conséquences de ton mensonge, tel je ne sais quel saint parcourant pieds nus un chemin rocailleux, sa lourde croix au dos.
Qui sait, cette configuration imposée ne sera peut-être pas si différente de celle que tu avais envisagée ? Finalement, il existe autant de moods de vacances que de gens sur terre (de gens qui ont les moyens de partir en vacances, en tout cas).
Par exemple, si le daron décidait de squatter mes vacances en solitaire, je sais que je n’aurais qu’à dégainer la tablette enclenchée sur une playlist YouTube adaptée pour faire diversion. Il passerait son séjour à streamer des vidéos « scientifiques ». C’est-à-dire des vidéos que des mâles très adultes ont tournées dans le sous-sol maternel pour partager leurs récentes découvertes à propos de je ne sais quelle exoplanète. À moins qu’il ne s’agisse d’un volcan marin ? Ou d’une nouvelle espèce d’oiseaux ? Je n’en sais rien, puisqu’à ce moment-là, je végète sur ma chaise longue, un bouquin à la main, un soda dans l’autre. L’incidence de cette présence maritale est donc minime.
À l’inverse, si je devais partir avec ma mère, ce ne serait pas la même histoire. La bonne nouvelle, c’est que l’incident ne se produirait qu’une fois. Puisque je passerais le restant de ma vie en prison pour assassinat. Ce qui, en revanche, serait une plutôt mauvaise nouvelle.
Alors, est-ce que le caractère de ta moitié te permet de tirer un trait sur tes aspirations solitaires, sans trop d’amertume ?
Mentir, c’est toujours une solution, mais jamais la meilleure
Il serait si facile mentir. Toutefois, comme j’aime le marteler, le mensonge représente toujours un très mauvais investissement. Pour quelques instants de soulagement artificiel, te voilà condamnée à vivre avec ce mensonge tout pourri jusqu’à la fin. Pour toi qui aimes être tranquille, cette situation n’est pas idéale.
Mais admettons. Factuellement, je suppose que tu peux invoquer une urgence boulot, une maladie foudroyante ou je ne sais quel prétexte bidon pour annuler le voyage. Mais cela supposerait qu’au lieu de passer une semaine sur un lieu de vacances relaxant, vous la passeriez chez vous. Et tu avoueras que ce n’est pas seulement contre-productif, c’est aussi complètement stupide.
Si jamais tu envisages de partir quand même, grâce à une machination machiavélique pour l’empêcher de te suivre, sans néanmoins révéler ton intention de départ, je te conseille d’arrêter ici ta lecture. La suite n’intéressera probablement pas une sociopathe dans ton genre.
Dire la vérité
Si on demande aux gens qui peuplent cette planète quelle place ils accordent à l’honnêteté dans leur système de valeur, ils répondent toujours « primordiale ». À nous écouter, nous les humains serions très attachés à la sincérité, nous dirions « ce qu’on pense », nous serions « entiers » et en retour, nous attendrions que notre entourage face également preuve d’honnêteté en toutes circonstances à notre égard. MAIS BIEN SÛR. Comme dirait cette expression très populaire il y a 150 ans : « Et la marmotte, elle met le chocolat dans le papier d’alu. »
Dans la réalité, on sort la flûte à la moindre occasion. Et à raison puisque les gens s’offusquent pour n’importe quoi. Te voilà contrainte de fomenter des plans délirants et potentiellement dangereux pour ta relation, alors qu’il aurait suffi de dire la vérité dès le départ.
Résultat des courses, ce n’est pas la vérité, mais sa solution de facilité qui entrainera ta chute. That’s a little bit Ironic, dont you think ?
Chérie, assieds-toi faut que je te parle
C’est le moment de prévenir ta partenaire, que tu as quelque chose à lui avouer, si possible via une messagerie instantanée, que tu déserteras ensuite pour le restant de la journée. Cela te permettra de faire monter la pression. Avec un peu de chance, elle aura envisagé le pire et sera soulagée par la tiédeur de ta révélation. Ou elle t’en voudra encore plus. Qui sait ?
Une fois face à elle, tu lui diras la vérité. Même si tu es ravie de passer ce séjour en sa compagnie, tu avais prévu de partir seule comme chaque année, mais que tu n’as pas osé lui dire par peur de la blesser. Tu vas insister sur le fait que tu te sens vraiment stupide de lui avoir caché ça, car même si ce n’est pas le cas, tu devrais. Tu assumeras ensuite l’ire justifiée de ta compagne. Tu lui laisseras le temps qu’il lui faut pour digérer l’information sans tenter de retourner la situation à ton avantage. Les adeptes de « OUAIS OK JE T’AI MENTI MAIS TOI EN 1995 TU AS… » on vous voit et on vous déteste.
En fonction de vos rapports et de sa réaction, vous pourrez ensuite décider de partir ensemble cette année quoiqu’il arrive. Ou de partir seule et d’organiser une escapade en amoureuses à ton retour. Ou de diviser cette semaine en deux.
Il y a toujours des alternatives satisfaisantes pour tout le monde dans la vie, alors pourquoi s’embarrasser de petits mensonges qui collent aux semelles ?
Je te laisse, je dois rejoindre le daron pour notre soirée pizzeria en amoureux mensuelle. Jurée, je vais trouver le courage de lui avouer que je déteste la nourriture italienne. Bon, peut-être pas ce soir, mais bientôt.
La bisette,
Ta Daronne
Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.
Les Commentaires
Le titre me semble bien trompeur par contre...
Etrangement, ça aurait été un sujet que j'aurais abordé dans une simple discussion sur les vacances et les petits plaisirs de la vie.
Bon soit, je trouve que la Madz se prend beaucoup la tête pour pas grand chose, y a pas de "vérité à avouer", elles vivaient pas ensemble et sa copine travaillait, donc aucun crime n'a été commis.
Maintenant, si elle va vivre avec sa copine, oui là il serait bien temps d'en parler et que sa copine respecte ce petit moment en solitaire.
Etre en couple, c'est pas être inséparables h24 et j7 au point d'oublier que nous sommes individuels et que faire nos vies chacun de notre coté pour pas péter un cable c'est possible.