Depuis une dizaine d’années, les écoles Montessori se sont multipliées en France : il existerait environ 200 établissements se revendiquant de cette appellation aujourd’hui, selon l’association Montessori de France.
Inspirées par la pédagogie inventée au début du XXe siècle par Maria Montessori, médecin et pédagogue italienne, ces écoles privées font tout pour encourager l’autonomie des enfants qui choisissent librement leurs activités et évoluent dans un environnement adapté (mobilier, matériel, rythme, etc.).
La philosophie derrière cette pédagogie est simple : permettre le développement et l’expression du potentiel de chaque enfant individuellement, grâce à un environnement approprié et au respect de sa personnalité.
Il existe peu d’études attestant de l’efficacité de la méthode Montessori en maternelle
À la base, Maria Montessori a travaillé avec des enfants handicapés et/ou issus des quartiers pauvres de Rome, mais aujourd’hui, la pédagogie Montessori est très à la mode chez les classes supérieures. Et c’est même devenu un mot magique pour vendre très cher des jouets.
Mais est-ce que la pédagogie Montessori a vraiment un impact positif sur le développement des compétences des enfants ? Est-ce que ça vaut le coup de mettre ses enfants dans une école maternelle Montessori (à 8.000 balles l’année) ? Jérôme Prado, chercheur CNRS au Centre de recherche en neurosciences de Lyon-CRNL, explique qu’il n’existait jusqu’ici pas beaucoup d’études scientifiques sur la méthode Montessori.
« Bien qu’elle semble en adéquation avec plusieurs principes de l’apprentissage et du développement mis au jour par les sciences cognitives et les sciences de l’éducation, les recherches sur l’éducation Montessori à la maternelle restent très limitées dans le monde. Celles-ci ont par ailleurs tendance à se concentrer sur des enfants issus de milieux socio-économiques favorisés.
Il n’y a à ce jour aucune étude randomisée contrôlée qui compare la méthode Montessori à un enseignement structuré tel qu’on peut le trouver à l’école maternelle publique française. »
Ce manque a été en partie réparé grâce à une étude qu’il a menée avec d’autres scientifiques au sein d’une école maternelle lyonnaise en réseau d’éducation prioritaire renforcé. Pendant plusieurs années, la moitié des classes de l’établissement a adopté la pédagogie Montessori, tandis que l’autre moitié continuait de fonctionner de façon classique. Les enfants ont été affectés aléatoirement dans un type de classe et ont ensuite été suivis par des scientifiques.
Les chercheurs et chercheuses ont comparé les progrès des deux populations d’élèves « Montessori » et « Conventionnelle » entre elles, et avec un troisième groupe d’enfants étudiant au sein d’une école maternelle Montessori privée située dans un quartier plus privilégié de la ville.
Au total, 176 enfants de 5 à 6 ans ont été comparés de façon transversale et 70 d’entre eux ont été suivis longitudinalement depuis l’entrée en maternelle (3 ans) jusqu’à la fin de la maternelle (6 ans).
Pas de différences significatives en termes d’aptitudes sociales ou de capacités mathématiques
Les résultats de cette étude de longue haleine ont été publiés en mai 2021 dans la revue Child development et ils montrent que la pédagogie Montessori à l’école n’est pas une solution miracle pour booster les compétences des enfants.
Les performances des deux groupes d’enfants dans l’école maternelle publique étaient en effet similaires en termes de capacités mathématiques, d’aptitudes sociales et de fonctions exécutives (l’ensemble des compétences cognitives qui nous permettent d’agir de façon organisée pour atteindre nos objectifs).
La seule différence entre les enfants en parcours « Montessori » et les enfants en parcours conventionnel se trouvait au niveau des compétences en lecture, explique Jérôme Prado.
« Les enfants des classes Montessori ont obtenu de meilleurs résultats en lecture que ceux des classes traditionnelles en fin de grande section.
De façon tout à fait intéressante, ces performances supérieures en lecture se sont avérées comparables à celles des enfants plus favorisés de l’école maternelle Montessori privée. Ceci était d’autant plus notable que les enfants de cette école privée avaient tendance à avoir de meilleurs résultats que les enfants de l’école publique sur plusieurs autres mesures, confirmant ainsi l’effet des inégalités sociales et économiques sur les apprentissages précoces.
En d’autres termes, le curriculum Montessori permettait d’atténuer l’effet de ces inégalités sur les débuts de l’apprentissage de la lecture ! »
Cet effet bénéfique sur la lecture sera-t-il suffisant pour convaincre l’Éducation nationale de développer la pédagogie Montessori au sein des écoles publiques ? Quand on sait l’importance de la maîtrise de la lecture pour la suite de la scolarité, on peut se dire que le ministère va au moins y réfléchir…
En attendant, de nombreux enseignants et enseignantes vont continuer à s’inspirer des principes développés par Maria Montessori dans leurs classes de maternelle publiques, sans forcément avoir le label Montessori (ni les frais de scolarité qui vont avec !).
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Les Commentaires
Je suis étudiante en master de sciences cognitives et je m'intéresse, dans le cadre de mes études, aux jouets éducatifs. J'aimerai vous proposer de répondre à un cours questionnaire de 6 questions sur les jouets éducatifs de type Montessori. Voici le lien du questionnaire: Lien du questionnaire
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