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L’Oréal pour les Filles et la Science, un programme nécessaire

Mélissa était au lancement du nouveau programme de la Fondation L’Oréal : L’Oréal Pour Les Filles et la Science. Les témoignages de Nathanaëlle, élève de terminale S, et d’Hélène Petot, enseignant-chercheur en STAPS, confirment les conclusions de la fondation, qui a lancé un plan d’attaque.

La Fondation L’Oréal a été créée en 2007 par le groupe français L’Oréal afin, selon notre ami Wikipédia, de

« s’engager toujours plus dans les actions d’utilité sociale, fondées sur ses domaines d’expertise, la science et la beauté, les deux piliers qui soutiennent la réussite de L’Oréal depuis plus d’un siècle. »

La science est donc au coeur des préoccupations de la fondation, qui, depuis 16 ans, s’associe à l’UNESCO pour récompenser des chercheuses en sciences avec son programme « Pour les Femmes et la Science », afin de soutenir les femmes scientifiques du monde entier.

Le nouveau programme L’Oréal pour les Filles et la Science qui a été lancé jeudi s’est appuyé sur un constat sans appel : s’il y a autant de filles que de garçons dans les filières scientifiques au lycée, il y a un décrochage croissant après le bac.

Elles le réussissent aussi bien que les garçons, mais au niveau licence et master elles ne sont plus qu’environ 30%, puis seulement 10% des ingénieurs de plus de 45 ans et 11% dans les hautes fonctions académiques… Et bien après, seulement 3% de femmes ont le Prix Nobel de Chimie, Physique ou Médecine.

Pourtant on a dépassé le stade du Moyen Âge : on sait que les filles ont autant de capacités que les garçons, et qu’elles sont tout à fait capables de réussir dans la science. On sait aussi que les garçons ne sont pas plus prédisposés pour ces disciplines que les filles. Mais alors pourquoi sont-elles si peu à s’engager dans cette voie ?

Les études menées par la fondation (en partenariat avec l’Académie de Paris) et les témoignages de Nathanaëlle et Hélène montrent les pressions qui s’exercent sur les filles, poussées loin, bien loin de la science par notre société.

À lire aussi : J’ai testé pour vous… bosser dans le BTP, un milieu 99% masculin

Les filles et la science : entre peur, découragement et stéréotypes

Nathanaëlle a 17 ans, et elle est en terminale S. Depuis toute petite, elle veut devenir pédiatre. Mais elle en vient à ne plus mentionner ce but : quand elle le dit, on lui répète à grands renforts d’yeux affolés que cela sera très difficile, que le chemin est long et compliqué – est-elle VRAIMENT sûre d’elle ?

De la petite enfance aux études supérieures, de nombreux éléments poussent les filles loin des sciences.

Les ateliers menés par la Fondation L’Oréal en mai dernier ont été effectués dans cinq lycées différents avec 130 lycéens et 9 enseignants. Il en est ressorti que cette faible présence féminine était due à :

  • Les stéréotypes de genre et le conditionnement social

Nathanaëlle se souvient de sa déception quand, petite, on lui a offert une tête à coiffer, alors qu’elle ne rêvait que d’une trousse de médecin. Françoise Vouillot, maîtresse de conférence en psychologie de l’orientation et vice-présidente de la commission du Haut Conseil à l’Egalité, a ainsi expliqué lors du lancement du programme que la science fait partie de l’étiquetage stéréotypé inculqué aux enfants.

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Françoise Vouillot

En effet, les jouets donnés aux filles sont souvent « prêts à jouer », alors que les garçons ont des jeux à assembler. Cela aurait un effet sur le développement cognitif, et participerait de la projection qui oriente les choix des enfants.

Les filles se projettent avant tout en tant que filles, avec les fonctions de mère et de ménagère que cela implique, et ne pensent donc pas spontanément aux sciences. Pour Françoise Vouillot, les filles sont logées à la même enseigne que les garçons de classe moyenne en matière d’inégalité d’orientation.

Si Nathanaëlle comme Hélène Petot ont la chance d’avoir le soutien de leurs familles, qui les ont toujours encouragées à faire ce qui les intéressait. Souvent les familles et les entourages des enfants nourrissent ce désintérêt des sciences : les intérêts et les passions sont conditionnés par le contexte social sexiste. La société, et par conséquent les familles, puis les enseignants, pousse bien souvent les filles dans une autre direction. Les enseignants ont d’ailleurs tendance à faire de la « présomption d’échec ».

Les filles ne sont pas encouragées, bien au contraire : Nathanaëlle garde pour elle son but, car sinon la plupart des gens lui répondent que « ce sera dur ». Elle est par ailleurs la seule dans ses amies qui sait ce qu’elle veut faire plus tard ; elle a remarqué que beaucoup de ses amies ont peur, et écoutent les autres et les stéréotypes.

Des études ont montré que les filles souffrent d’un problème de confiance en elles. Quand elles ont les mêmes résultats que les garçons, elles vont s’auto-censurer, ne trouvant pas cela suffisant – contrairement aux garçons qui se posent moins de questions.

Vous pouvez lire ce rapport d’étude « Lutter contre les stéréotypes filles-garçons », du Commissariat Général à la stratégie et à la prospective

Combien de fois entend-on de deux élèves du MÊME niveau que la fille travaille beaucoup et que le garçon a des capacités qu’il n’exploite pas, faute de travail ? Cela implique que les filles n’ont pas les capacités nécessaires, contrairement aux garçons qui auraient « seulement» besoin de travailler pour réussir.

À lire aussi : Ces métiers que je voulais faire quand j’étais gamine

Hélène Petot est la marraine du programme, et elle est enseignant-chercheur en STAPS, docteure en physiologie de l’exercice et biomécanique de la motricité humaine. Mais au lycée, elle était loin d’imaginer qu’elle ferait ce métier. Ce n’est que bien plus tard, à cause de deux échecs consécutifs en PACES, qu’elle est partie en STAPS, suivant sa passion pour le sport, et qu’elle a ainsi découvert une facette des sciences qu’elle ignorait. Et sans ces échecs, aurait-elle « trouvé sa voie » ?

« Si quelqu’un m’avait montré ce que je valais, que c’était possible, ça aurait peut-être changé. »

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Hélène Petot

Ce n’est qu’en STAPS qu’elle a finalement appris que l’on pouvait associer sports et sciences, et qu’elle pouvait combiner sa passion pour le sport et celle pour la biologie. C’est un autre aspect que l’étude a souligné : les sciences ont une image fermée.

  • Les sciences ne seraient que des métiers d’hommes et d’élite.

Les sciences ont une image imposante, inaccessible. Les métiers scientifiques sont ainsi perçus comme étant des métiers élitistes, très difficiles d’accès, pour lesquels il faudrait des prédispositions particulières. Ils sont énormément idéalisés.

L’idée qu’il faut être de « l’élite » (que ce soit financièrement ou intellectuellement) fait des ravages. Et le plafond de verre apparaît forcément à un moment donné.

Les filles pensent que c’est un milieu d’hommes ; les stéréotypes de genre ancrent l’idée que les sciences sont des métiers d’homme, parce que les femmes seraient plus aptes, par leur « sensibilité », à faire des arts ou de la littérature. Les lycéen-n-e-s interrogé-e-s ont ainsi expliqué que pour eux,

« Les sciences dures c’est pour les garçons. Des métiers qui plaisent aux garçons. L pour les filles, S pour les garçons. Les hommes sont plus tournés vers les sciences que les femmes. »

L’étude menée par L’Oréal a aussi démontré le rôle involontaire que jouent les enseignants : beaucoup ont encore l’illusion que le choix est libre, et rejettent l’idée que l’école n’est pas égalitaire – une idée difficile à accepter. Pourtant beaucoup suivent le cliché selon lequel les filles auraient des intérêts différents, et préfèrent ne pas les pousser à faire des sciences, par peur de la difficulté de ces disciplines.

À lire aussi : « I Fucking Love Science » et le sexisme : rétrospective

  • La méconnaissance des métiers scientifiques, et les stéréotypes qui en découlent.

Ce problème d’orientation n’est pas limité à la science : rappelons qu’en première année de licence, le taux d’échec est d’environ 50%.

Vous pouvez consulter les taux de passage de L1 à L2 sur le site du Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.

Mais il y a un vrai problème de représentation pour les sciences : c’est un domaine abstrait, dans lequel il est difficile de se projeter. Il y a une grande méconnaissance des métiers scientifiques ; les jeunes, garçons comme filles, ne pensent qu’à ce qu’ils connaissent, soit la médecine et le professorat.

Et l’image qu’ils ont des autres métiers scientifiques n’est pas franchement attrayante : ils en soulignent la solitude, la monotonie, l’austérité, la grande dose de travail, le vide dans la vie personnelle et sociale, le combat quotidien… Tout en ayant du mal à en comprendre l’utilité ;

« On cherche sans trouver, c’est horrible »

De plus, les femmes scientifiques sont notamment perçues comme des « garçons manqués », surtout par les garçons. Il a par exemple été dit lors des ateliers que la femme scientifique « se fout de son physique », « ne prend pas de douche », « est célibataire et même vierge, peut-être elle est lesbienne », etc.

Cela est aussi lié au fait qu’il n’y a que très peu de modèles scientifiques féminins dans les manuels d’histoire ou de science comme dans la société. Heureusement, beaucoup de jeunes ont conscience que ce sont des stéréotypes, et que les choses évoluent.

#LesFillesAussi

Et le nouveau programme L’Oréal pour les Filles et la Science va s’attacher à briser ces idées reçues sur les femmes et la science pour susciter des vocations.

Il s’articule sur deux axes d’attaque :

  • 60 ambassadrices, boursières du programme « Pour les Femmes et la Science » et chercheuses de L’Oréal, ont été formées pour aller à la rencontre de 16000 lycéens.

Elles vont ainsi présenter un autre visage de la science et des femmes scientifiques ; elles vont leur montrer que la science est partout, que ce sont des métiers épanouissants et que les filles en sont capables.

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Les ambassadrices

Hélène Petot veut par exemple leur montrer l’aspect pratique de la science, et qu’elle peut se conjuguer avec plein d’autres intérêts. Elle ne s’est vraiment passionnée pour les sciences que quand elle en a découvert le lien avec le sport, un côté pratique et intéressant.

  • Une campagne digitale basée sur la communauté #LesFillesAussi pour montrer que la science est partout, qu’elle est créative, et qu’elle est ouverte aux filles.

Cette présence sur les réseaux sociaux permet d’aller au plus près des jeunes. Le mot d’ordre : « La science est la clé pour réaliser ses rêves ».

À lire aussi : Une nouvelle campagne pour l’égalité hommes/femmes

De nombreuses initiatives à différentes échelles

Najat Vallaud-Belkacem était présente à la soirée de lancement, et elle a salué l’initiative de la Fondation L’Oréal :

« L’action que vous menez à nos côtés pour l’égalité dans les secteurs des sciences et de la recherche n’est pas anodine. Au contraire, elle est décisive car ce sont des secteurs à forte visibilité, car ce sont des secteurs de l’excellence. Et du coup, ils peuvent avoir un impact majeur pour changer la perception de notre société sur les rôles sociaux des deux sexes. »

La ministre a aussi expliqué que si rien ne change en matière d’orientation scolaire,

« Il faudrait attendre 2080 pour atteindre la parité entre chercheurs et chercheuses au CNRS en sciences dures et 2075 pour les écoles d’ingénieurs. »

Elle a ainsi rappelé les initiatives mises en place dans son ministère pour passer d’ici 2015 de 12% à un tiers de métiers mixtes — récemment, la signature de la Charte Universcience pour l’égalité entre les femmes et les hommes dans le domaine des sciences et des technologies.

Les informations sur cette charte sont sur le site du Ministère de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.

Universcience est également à l’origine de nombreuses initiatives et actions visant à promouvoir les sciences et à les rendre accessible à tou-te-s. Créé en 2009, c’est un établissement public placé sous la double tutelle du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et du ministère de la Culture et de la Communication.

D’autres organisations travaillent à rendre les sciences accessibles, comme WAX Science, une association montée plus récemment, en 2013, par deux étudiantes, Aude Bernheim et Flora Vincent, pour changer les mentalités sur la science et la mixité dans la science.

Petit à petit, à force d’initiatives et d’actions à différentes échelles, les choses avancent !

Pour aller plus loin :

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Les Commentaires

10
Avatar de ValouSestra
21 octobre 2014 à 16h10
ValouSestra
@EurekaChocolat je te conseille cette vidéo
http://www.tedxparis.com/catherine-vidal-le-cerveau-a-t-il-un-sexe/

Catherine Vidal est neurobiologiste à l'insitut pasteur et elle démonte complètement cette idée reçue. Avant de la voir en conférence j'avais la même que toi, et en fait... Ben non

Bizarrement, je n'ai jamais souffert de ces problèmes, et les filles de mon entourage non plus.
J'ai pris la filière S au lycée, en première et terminale nous étions 26 filles pour 9 garçons.
Encore aujourd'hui, je suis en deuxième année de bio, et nous sommes une majorité de filles, et il y en a également dans des filières soit disant "désertées" par les filles.
Nos professeurs également sont représentés par des femmes dans la même proportion que les hommes, par exemple.
Alors je pense que cette tendance a beaucoup diminué.

Et je confirme, j'ai pas mal de neurophysiologie, et les cerveaux des hommes et des femmes fonctionnent de la même manière, le fait que les filles aient des résultats moins bons en moyenne que les garçons résulte du fait qu'elles se sentent moins en confiance du fait de ce stéréotype "je suis moins douée". (La aussi, ce phénomène a été prouvé de nombreuses fois, et a été aussi appliqué au fait que les élèves immigrés/enfants d'immigrés soient moins bons car moins en confiance).
Mais comme je l'ai dit plus haut, d'après ce que j'observe au quotidien, ça tend à sérieusement diminuer.
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