Mise à jour du 2 août 2018
par Clémence — Le projet de loi visant à renforcer la lutte contre les violences sexistes et sexuelles a été adopté !
Le texte de la Commission Mixte Paritaire, composée à parité de député·es et de membres du Sénat, a été soumis au vote de l’Assemblée Nationale pour adoption définitive, mercredi 1er août.
100 membres de l’assemblée étaient présents pour voter, 92 suffrages ont été exprimés et aucune voix n’a été portée contre le texte.
Le projet de loi contre les violences sexistes et sexuelles a donc été adopté à l’unanimité, mercredi 1er août 2018.
Que contient-il ? Juliette t’en faisait une synthèse ci-dessous. Deux points en particulier ont soulevé pas mal de débats entre le dépôt du texte et son adoption définitive :
- L’article 2, accusé de « décriminaliser le viol », posait en réalité le problème de la correctionnalisation des viols : je t’ai décrypté tout le débat par ici !
- L’outrage sexiste, créé par l’article 4 de cette loi, est accusé de vouloir faire condamner des « regards appuyés » : il n’en est rien dans le texte, comme le décryptent efficacement les Décodeurs du Monde.
— Publié le 21 mars 2018
Que contient le projet de loi contre les violences sexistes et sexuelles ?
Prescription, âge minimum du consentement, harcèlement de rue… Le projet de loi qui vise à lutter contre les violences sexistes et sexuelles est présenté mercredi 21 mars au Conseil des Ministres. Juliette t’explique tout ça, point par point.
Mercredi 21 mars, la Secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes Marlène Schiappa présente son projet de loi au Conseil des Ministres.
Relatif à l’égalité entre les femmes et les hommes, le texte propose des mesures visant à lutter contre les violences sexistes et sexuelles : du harcèlement de rue au viol, en passant par les diverses manifestations des discriminations liées au genre.
À lire aussi : Les chiffres des violences sexuelles en France, entre détresse et avancées
Ce projet de loi étant très dense, je vais mettre en lumière les points qui me paraissent les plus importants, de manière claire et synthétique (parce qu’on a pas la journée non plus !).
Viol : la prescription passe de 20 ans à 30 ans
Il s’agit d’une des principales mesures défendues par Marlène Schiappa dans ce projet de loi.
S’il est validé en l’état par le Parlement, ce texte permettrait de prolonger le délai de prescription de 10 ans.
Ainsi, une victime qui a subi une agression sexuelle aura 30 années pour se rendre aux autorités afin de déposer une plainte, et non plus 20 ans à l’heure actuelle.
À lire aussi : Pourquoi c’est encore si difficile de dénoncer les violences sexuelles, en France ?
Selon l’Insee et l’Office national de la délinquance, en moyenne 84 000 femmes sont violées par an, en France mais seulement 10% d’entre elles portent plainte (de nombreuses plaintes finissent classées, mais ça c’est une autre affaire).
D’après Marlène Schiappa, cette mesure pourrait encourager les victimes à porter plainte contre leurs agresseurs, leur donnant la possibilité d’obtenir justice dans les tribunaux.
La secrétaire d’État explique que l’allongement du délai de prescription vise à prendre en compte le problème des amnésies résultant parfois du traumatisme qui survient après une agression sexuelle.
Le cerveau peut se protéger et « oublier » le souvenir du viol ou de l’attouchement, qui peut remonter quelques années plus tard. Ce phénomène est souvent constaté chez les adultes ayant subi des agressions sexuelles quand ils ou elles étaient enfants.
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Le harcèlement de rue va coûter cher
Cette loi vise à punir pénalement le harcèlement de rue, par une contravention pour outrage sexiste.
Cela signifie qu’une personne prise en flagrant délit de harcèlement dans l’espace public (la rue, le métro etc.) risque une amende de 90 euros, et jusqu’à 3 000 euros (si elle recommence) aux termes du texte actuel.
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Ça fait beaucoup d’argent, oui. Le but ici, c’est de dissuader.
Marlène Schiappa avait répondu aux critiques arguant qu’une telle loi serait difficilement applicable lors de notre interview, le 12 février dernier (voir ci-dessous).
La secrétaire d’État explique notamment que cette mesure devra s’accompagner de la formation des forces de l’ordre. Elles devront être sensibilisées aux problèmes de harcèlement de rue afin d’intervenir au mieux.
La secrétaire d’État souhaite en finir avec les actes et les agressions sexistes, verbales ou physiques, qui surviennent dans le quotidien des femmes.
Pour rappel : selon une enquête publiée en 2015 par le Haut Conseil à l’Égalité, 100% des femmes interrogées ont subi du harcèlement dans les transports en commun.
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L’âge du consentement : le sujet sensible
Je te parlais déjà de l’âge minimum du consentement dans l’article juste en-dessous :
L’âge minimum du consentement sexuel bientôt fixé à 15 ans ?
La ministre de la Justice tablait sur une fourchette de 13 ans à 15 ans, Marlène Schiappa et Emmanuel Macron préféraient l’imposer à 15 ans : l’âge minimum du consentement a suscité beaucoup de discussions.
La première version du texte disposait que toute relation sexuelle entre un individu majeur et une personne de moins de 15 ans ne pourrait être consentie. Il s’agirait donc d’un viol sur mineur, jusqu’à preuve du contraire.
Mais la justice a exprimé des réserves : comme le rapporte Le Monde, des magistrats ont mis en garde le secrétariat d’État à l’égalité entre les femmes et les hommes sur certains cas.
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Par exemple, si un·e mineur·e de 14 ans entretient des rapports sexuels consentis avec une personne de 17 ans, la législation n’a pas à intervenir. Cependant, quand cette personne atteint la majorité, alors chaque rapport sexuel consenti pourrait être considéré comme un viol au yeux de la loi.
Cette mesure dans le texte a été « retoquée » par le Conseil d’État (dans son rôle de conseil du gouvernement).
Pour parer aux risques de « condamnations automatiques », l’âge minimum de consentement est toujours maintenu à 15 ans mais avec une notion de contrainte (qui existe déjà par ailleurs dans la clause pénale concernant le viol).
En résumé, les juges pourront quand même s’appuyer sur le manque de maturité des victimes de moins de 15 ans, considérés trop jeunes pour consentir, afin de condamner les agresseurs. Les sanctions seraient donc plus faciles.
De plus, le projet de loi rallonge la peine dans le cas de délit d’atteinte sexuelle commis sur un mineur sexuel à 10 ans d’emprisonnement, contre 5 ans actuellement, et une amende pouvant aller jusqu’à 150 000 euros.
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Une mesure qui vise (un peu) le cyber harcèlement
La définition du harcèlement sexuel et moral a également été élargie dans le projet de loi.
Si le texte est adopté par le Parlement, le harcèlement ciblé et « concerté entre plusieurs personnes » sera répréhensible de 3 à 5 ans de prison, même si les harceleurs n’ont pas agi de manière répétée.
Dans ce cas précis, l’objectif est surtout de prévenir et punir le cyber-harcèlement.
En 2016, les adolescentes étaient les première victimes de violences sexistes en ligne. Le rapport du Haut Conseil à l’Égalité a aussi partagé un rapport en 2018 sur l’état du cyber-harcèlement en France. Et le constat est édifiant.
Tu peux le lire ci-dessous :
À quand un plan de lutte contre les violences faites aux femmes en ligne ?
Ce projet de loi contient d’autres mesures importantes, mais les 4 points développés ci-dessus me semblent être les principaux piliers du texte.
Il ne reste qu’à attendre que l’Assemblée Nationale et le Sénat se prononce tour à tour sur le contenu de ce projet.
Que penses-tu de ces mesures qui vise à lutter contre les violences sexistes et sexuelles en France ?
À lire aussi : À quand un plan de lutte contre les violences faites aux femmes en ligne ?
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Les Commentaires
En ce jour, petite pensée pour les gars qui, ces 15 dernières années, se seront enquis de la nature de mes sous-vêtements, m'ont suivie, ou ont voulu que je les suive sans même m'avoir dit bonjour. Risquer 90 euros pour un tel comportement devrait doucher quelques ardeurs.