Lolita, de Vladimir Nabokov (ancienne traduction)
Voilà un roman magnifique découvert lorsque j’étais encore au lycée. Depuis je le relis au moins une fois par an, et à chaque relecture je suis bousculée, les opinions que je m’étais forgées sont mises en doute, bref je le vois sous un jour nouveau.
Ce livre raconte l’histoire d’amour entre un universitaire d’âge mûr et une nymphette, une pré-ado (puis ado) un peu garce, un peu peste (qui de surcroît se trouve être sa belle fille). Le roman nous promène des débuts de cet amour interdit à sa déchéance,on traverse les États-Unis en compagnie de Humbert Humbert – dont on n’arrive pas à savoir s’il est un monstre de cruauté ou un homme éperdument amoureux – et bien sûr en compagnie de Lolita, dont on n’arrive pas à savoir si elle est une victime ou une ensorceleuse très douée pour son jeune âge.
En terme d’écriture ce roman est d’une sensualité folle, on se retrouve plongé en permanence dans une atmosphère moite, lourde et orageuse, apaisée par une écriture érudite et raffinée. Le contraste entre la sensualité et l’érudition, entre le grotesque d’Humbert Humbert (qui, captif de sa passion pour Lolita, se débat) et la pureté de son amour nous emmènent dans un univers où rien n’est manichéen et où chaque scène peut être réinterprétée différemment. C’est un roman que l’on peut relire jusqu’à la fin des temps, en sachant qu’une part nous en échappera toujours.
Demande à la poussière, de John Fante
John Fante nous y raconte l’histoire de son alter-ego de papier, Arturo Bandini, un jeune aspirant écrivain de Los Angeles qui galère dans une chambre louée à la semaine et qui n’a les moyens de se nourrir que d’oranges. Arturo est fils d’immigrés italiens et est en permanence partagé entre la honte de ses origines prolétaires et l’envie de revendiquer son héritage. Une jeune serveuse mexicaine, dont il est amoureux, Camilla Lopez, fera les frais notamment de son racisme et de sa hargne : Arturo fait payer aux autres ce qu’il abhorre chez lui même.
Drôle, méchant, capable d’envolées lyriques époustouflantes comme de pensées les plus idiotes, Arturo est un personnage qui bataille en permanence contre lui-même, dans la quête d’un équilibre qu’il ne trouve ni dans l’amour, ni dans la gloire, ni dans la richesse, mais seulement dans le processus d’écriture.
En parlant d’écriture, celle de Fante, simple et décomplexée est riche essentiellement de sa sincérité : un écrivain qui pose ses tripes sur le papier et qui avec le personnage de Bandini nous donne à voir toute sa vulnérabilité. Redécouvert sur la tard en Europe grâce à Charles Bukowski (qui le vénérait), John Fante est un écrivain qui sans verser dans le témoignage glauque ou l’autofiction sensationnelle m’a fait découvrir le bonheur qu’il y a à lire un auteur qui « écrit vrai », sans fard.
Beauté fatale, de Mona Chollet
Déjà chroniqué par Elise Costa sur madmoiZelle, Beauté Fatale est un essai féministe axé sur le marketing de la beauté. Je l’ajoute à la liste des livres qui comptent pour moi, puisque c’est celui qui m’a ouvert les yeux sur la question de l’inégalité entre les sexes et a fait de moi une féministe.
En s’appuyant sur des références à la pop culture (Mad Men, Elle ou encore Garance Doré), Mona Chollet nous démontre à quel point nous sommes aliénées au concept de la beauté. Son essai, écrit de façon très accessible, démonte ces préceptes qu’on nous assène, partout, tout le temps et replace la notion de beauté dans son juste contexte. Remettre « l’idéal de beauté » à sa place demande de l’énergie, du travail et surtout une lucidité incorruptible : Mona Chollet l’a fait ! J’ai beaucoup conseillé ce livre autour de moi, je n’ai eu que des retours positifs (« Ça m’a complètement retourné le cerveau, je ne me laisserai plus faire ! »).Ce livre doit encore passer de mains en mains, et peut -être qu’avec le temps, on nous lâchera enfin avec « le devoir de beauté » !
Misery, de Stephen King
Certes, Stephen King n’est sans doute pas un auteur en mal de publicité. Mais si vous avez envie d’être tenue en haleine durant un trajet en train, ou éviter de vous ronger les sangs dans la salle d’attente du dentiste, Misery est votre livre ! Le pitch : Paul Sheldon, un écrivain célèbre pour une série de bouquins à l’eau de rose, les Misery, décide de mettre fin à la vie de son héroïne de papier pour enfin faire de la « vraie » littérature. En partant fêter ça, sur les routes enneigées, il a un accident qui lui laisse les deux jambes broyées : il est cependant sauvé par sa plus grande fan, une infirmière, Annie Wilkes. Qui ne lui pardonne pas d’avoir tué Misery.
Stephen King est souvent moqué : c’est de la littérature pour ados, c’est du sanguinolent, c’est too much, bref, c’est de la littérature de genre ! Mais ce roman, pervers à souhait vous captive du début à la fin, c’est typiquement le genre de livre que vous ouvrez dans le tram, même si vous n’avez que deux arrêts devant vous, pour en lire quelques lignes. Un excellent divertissement, blindé de suspense et qui vous fera frissonner !
Cadres Noirs, de Pierre Lemaître
Un polar. Français. Sur le coup, on se dit que non, merci vraiment. Et puis en une page et demi on est ferré. Ferré dans une écriture dense, tendue, dans une intrigue inattendue, dans des rebondissement de fifou, capturé par des personnages parfois monstrueux, parfois stupides, ou terriblement attachants, mais toujours justes.
Parlons un peu de l’intrigue : nous faisons la connaissance d’Alain Delambre, un quinquagénaire marié et au chômage depuis plus de 4 ans. Avant c’était un homme ambitieux, avec un style de vie aisé et une épouse épanouie. Aujourd’hui il ressasse sa chute sociale avec une lucidité et une hargne effarantes. Lorsqu’il entrevoit la possibilité de retrouver un travail, qu’un employeur se dit prêt à étudier sa candidature, Alain Delambre est prêt à tout : se mettre à dos sa femme, s’endetter et même à se répugner. Sauf que, sauf que… les dés du recrutement sont pipés. Et que lorsqu’il s’en aperçoit, Alain Delambre est un homme qui n’a plus rien à perdre.
Ce polar palpitant est un peu dans la même veine que Le couperet de Westlake, une critique sociale sans langue de bois, pas loin du polar « engagé ». Le sujet, s’il peut paraître un peu lourd, est traité avec un humour cynique décapant, on ressort de cette lecture galvanisé, un peu dynamité façon puzzle. Une vraie claque.
Tu veux aussi partager tes livres préférés ? Envoie la liste de tes cinq bouquins favoris, avec des photos si tu le souhaites, à mymy(at)madmoizelle.com !
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
Les Commentaires