L’autre jour j’étais au Salon du Livre et je faisais des yeux ronds au milieu de l’exposition célébrant les 20 ans de Titeuf. 20 ans, c’est à peine plus jeune que moi, ça fait tout drôle. Et alors que je regardais quelques planches épinglées sur un mur, je fus prise d’un soudain soubresaut : de mon grand âge, je riais en lisant Titeuf. Rendez-vous compte ! À douze ans passés. Alors j’ai un peu réfléchi pour comprendre ce qui me devait ce soudain ricanement : il faut bien avouer que Titeuf n’a pris ni ride ni cheveu blanc dans sa houpette jaune pipi. Il nous parle, parce qu’il parlait aux gosses qu’on a été sans tabou. Avec lui, on a été nombreuses à rigoler sur le sexe et les choses de l’amour alors qu’on était encore que des enfants avec des questions plein la tête qu’on n’arrivait pas forcément toutes à formuler. En y réfléchissant bien, Titeuf fait partie des livres et BD qui ne prennent pas les enfants pour des pigeons. Voici une sélection qui suit ce principe, garantie sans métaphore neuneu et volonté de prolonger le rêve. Des livres qu’on pourrait imaginer relire parfois, par nostalgie ou par pur plaisir.
Arghal et le mystère de Mondobscur, de Claire Bernas-Martel et Vincent Guérin pour les illustrations
Je vais pas te faire croire que j’ai grandi avec la collection Récréphilo, ce serait mentir : Arghal et le mystère de Mondobscur est sorti en 2006. En 2006, j’allais pas tarder à faire de la philosophie en cours et je passais directement de « J’ai entendu parler de cette matière dans les séries mais c’est tout » à « Vous me ferez une explication de texte de Platon vous serez mignons » direct, comme ça, sans préliminaire.
Si Arghal avait existé quand j’étais petite et qu’il était devenu mon héros de roman préféré (en alternance avec Cochon Ronron et Bzz bzz l’abeille
), j’aurais peut-être eu un peu plus de facilité à me jeter dans les pensées et concepts des grand-e-s auteur-e-s. Dans Arghal et le mystère de Mondobscur, c’est le mythe de la caverne de Platon qui est adapté pour l’esprit d’un enfant de 9 ans et plus (par « plus », ça peut être un an ou 25, parce qu’il n’y a pas d’âge pour revoir ses basiques) : quand Arghal tombe de cheval et chute dans une caverne, il rencontre des habitants qui ne connaissent du dehors que les ombres qui se reflètent sur le mur. C’est hyper bien fait, c’est pédagogiquement au poil et les dessins en foutent plein les globes.
Oh, Boy, de Marie-Aude Murail : le livre qui ouvre l’esprit
Marie-Aude Murail ne ment pas aux enfants, pré-adolescents et adolescents qui lisent ses romans. Elle embellit peut-être un peu le dénouement de chacune de ses intrigues, mais n’empêche : ses livres sont parfaits pour expliquer aux plus jeunes que la société ne se restreint pas à un modèle particulier. Et pour leur faire comprendre sans les faire paniquer que la vie c’est pas toujours une partie de Téléphone Secret autour d’un chocolat chaud et de tartines Nutella/rillettes.
Dans Oh, Boy, elle nous raconte le chamboulement dans le quotidien de trois enfants nouvellement orphelins, Siméon (14 ans), Morgane (8 ans) et Venise (5 ans). Des enfants tout ce qu’il y a de plus normaux qui ont des complexes, jouent à faire forniquer leur Barbie ou passent leur bac. Un roman qui aborde toute en simplicité et en humour des sujets comme l’homosexualité, les violences faites aux femmes, le suicide ou la maladie. Si tu ne l’as pas encore lu, il n’est pas trop tard.
Oliver Twist, de Charles Dickens
Un grand classique qui peut être lu à 10 comme à 72 000 ans, au moins : l’histoire d’Oliver, un orphelin de 9 ans qui fuit pour Londres et trouve refuge chez un bandit avant de rencontrer M. Brownlow, une personne honnête avec qui il découvre qu’il est un riche héritier manipulé par un demi-frère envieux. Le roman de Noël absolu, écrit avec un vocabulaire qui ne nous donnait pas plus l’impression d’être larguée qu’infantilisée quand on était petites. Avec de l’aventure et du suspens et des rebondissements et des oh et des ah, parce que « Ça suffit, on va pas raconter aux gamins des sempiternelles histoire d’ânes qui mangent des sucreries et qui chopent une carie. Ça va bien, hein ».
Et toi, quels livres t’ont le moins donné l’impression d’être une enfant quand tu en étais pourtant encore une ? Lesquels prends-tu pour cette raison toujours plaisir à lire ?
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
Les Commentaires
malika ferdjoukh et agnès desarthe mes copines <3