Des bouquins sur l’histoire du féminisme, pamphlets sur notre société ultra-genrée et ouvrages militants disséquant la condition des femmes… il y en a aujourd’hui un rayon bien fourni dans toute FNAC qui se respecte. Mais si vous cherchez à ajouter une nouvelle étagère à votre bibliothèque, comprendre certaines bases de ce qui fait le(s) féminisme(s) aujourd’hui, ou tout simplement, revoir vos classiques, ce qui suit devrait vous intéresser. Voici une sélection de 5 ouvrages incontournables et souvent cités comme références dans la littérature féministe. Pris dans leur ensemble, ils vous offriront un bel aperçu des problématiques les plus souvent abordées en matière d’égalité des sexes. Bonne lecture !
1. Celui qu’on ne présente plus
Peut-être l’oeuvre la plus connue de Simone de Beauvoir. Le Deuxième Sexe est un essai à la fois féministe et existentialiste (pour ceux qui auraient fait des feux de joie avec leurs poly de philo : l’existentialisme, c’est l’idée que l’être humain n’est pas prédéterminé mais construit l’essence de sa vie tous les jours à travers ses propres actions). La thèse de Beauvoir, vous pouvez donc aisément la deviner : « aucune femme n’a de destin tout tracé ».
L’idée que défend Simone de Beauvoir est la suivante : les femmes, lorsqu’elles manquent d’ambition et/ou se laissent écraser, sont autant blâmables que les hommes, lorsqu’ils sont sexistes et arrogants. Selon la compagne de Jean-Paul Sartre, le salut de la femme réside donc dans deux phases d’émancipations primordiales : le contrôle des naissances (la contraception) et l’accès au monde du travail.
Un livre pilier dans la philosophie féministe.
2. Celui qui a été le plus adapté sur les planches
Traduit en plus de 50 langues et interprété dans plus de 130 pays, ce texte connaît encore aujourd’hui en France un grand succès. Les Monologues du vagin est une pièce écrite à l’issu de plus de 200 entretiens avec des femmes qui se sont confiées sur leurs joies, leurs peines, leurs traumatismes et leurs aspirations.
Toujours autant d’actualité à l’époque où pour certain-e-s, « vagin » est encore un mot tabou et embarrassant.
3. Celui qui traite du droit à l’avortement, de viol, et revient sur le procès de Bobigny
« Libérer la femme implique un changement des structures, et des rapports économiques. Mais aussi un changement dans la forme « mâle » du pouvoir. Et même (c’est la pierre de touche de ce combat) une révolution des mentalités. Un monde à changer dans son « commerce », dans sa relation, dans sa culture. »
Gisèle Halimi (la mère de Serge Halimi, oui) a été avocate au célèbre procès de Bobigny (pour rappel : en 1972, 5 femmes sont jugées pour avoir eu recours à l’avortement ou en avoir été complice. Cette année-là, le procès aura un grand retentissement en France. On peut aller jusqu’à dire qu’il a contribué à la dépénalisation de l’interruption volontaire de grossesse). La Cause des femmes est un ouvrage qui donne la parole à Marie-Claire (une des jeunes filles accusées d’avoir avorté) dans un poignant bilan de son combat.
L’avant-propos du livre est rédigé par Gisèle Halimi, qui explique que la libération des femmes doit parfois passer par de la désobéissance civique : « Refuser une loi injuste pour en faire naître une autre, conforme au droit pour les femmes de choisir de donner (ou non) la vie. La plus fondamentale de leurs libertés »,
commente l’éditeur.
Un ouvrage essentiel pour qui veut revenir sur ce temps fort de l’émancipation des femmes dans notre pays.
4. Celui qui analyse les rapports entre les sexes d’un point de vue sociologique
Dans La Domination masculine, Pierre Bourdieu mène une réflexion sociologique sur les rapports sociaux qu’entretiennent hommes et femmes. But : expliquer les causes de la domination masculine, qui a cours dans toutes les sociétés. Pour ce faire, Bourdieu s’appuie notamment sur une étude anthropologique de la société berbère en Kabylie.
Fidèle à son concept d’habitus, Bourdieu explique que tout dans notre inconscient collectif prédispose à la domination masculine. Par exemple : lorsqu’une femme prend la parole en public et émet un avis tranché, on la qualifie de « harpie » ou d’ « hystérique » tandis que le même comportement chez un homme sera davantage accepté. Autre exemple : quand un homme se met à pratiquer une activité « traditionnellement féminine », son statut se voit tout de suite auréolé de noblesse (c’est notamment le cas des chef-cuisiniers).
Bourdieu montre que nous sommes donc dans une « culture des différences genrées » puisque la domination masculine tente de « déshistoriciser » ces rôles pré-établis, notamment en essayant de nous faire croire que ces différences sont naturelles (une femme est forcément douce, un homme est forcément fort, etc.)
Même si cet ouvrage a pu faire grincer des dents certains (Bourdieu étant lui-même, en tant que professeur au Collège de France, issu de « la classe des dominants »), La Domination masculine a le mérite de mettre en lumière la dimension sociologique des questions de genre.
5. Celui qui fait un état des lieux de notre rapport au corps féminin aujourd’hui
Si vous êtes une lectrice assidue de madmoiZelle, vous n’êtes pas sans savoir que Beauté Fatale est un des coups de coeur littéraires de la rédac cette année (Élise Costa a chroniqué le livre et j’ai interviewé Mona Chollet).
Dans ce livre, la journaliste du Monde Diplomatique décortique ce qui fait le culte de la beauté et la tyrannie du look à l’égard des femmes de notre époque. Soutiens-gorge rembourrés pour fillettes, prescription insistante du port de la jupe comme signe de libération, stéréotypes dans les séries télévisées, culte de la minceur dans la presse féminine… Mona Chollet montre que derrière ce matraquage donneur de leçon se cache une vraie haine de soi, ce qui condamne les femmes à ne vivre qu’à travers leur pouvoir de séduction.
Un ouvrage résolument moderne, et génial car bourré de références à notre pop culture, à lire gratuitement en ligne sur le site de son éditeur (bravo et merci à Canerchja pour l’info).
Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.
Les Commentaires
Mais sinon, super article! Ça donne envie de lire tous ces livres!