Son nom est devenu mondialement connu après sa cuisante humiliation face à Greta Thunberg, puis son arrestation dans la foulée dans le cadre de l’enquête qui le vise pour trafic d’êtres humains. Andrew Tate, influenceur masculiniste aujourd’hui détenu en Roumanie pour un mois, a beau avoir été brièvement la risée des internets, il détient toujours une force de nuisance colossale, comme s’en inquiète Michael Conroy auprès de The Guardian.
Selon Michael Conroy, fondateur de Men At Work, une association de lutte contre le sexisme qui forme les adultes à répondre aux stéréotypes de genre au Royaume-Uni, l’influence d’Andrew Tate est bien présente dans les cours d’école et auprès des jeunes garçons qui ont déjà intégré certains préjugés misogynes : « Les algorithmes rendent possible à quelqu’un comme Tate d’être massivement bien connu des garçons de 14 à 18 ans. »
Des garçons fascinés par les discours sexistes et virilistes
Il constate que le nom d’Andrew Tate revient dans chaque établissement où il est intervenu auprès de professeurs. Il affirme que des élèves exprimeraient des remarques empreintes de culture du viol et de victim-blaming. En outre, ce sont aussi les enseignantes qui feraient les frais de « micro-agressions » de la part des garçons en classe : c’est par exemple le cas d’une institutrice qui a découvert la mention « MMAS » écrite à l’arrière du devoir à rendre d’un élève de 10 ans. Une référence à un meme masculiniste, Make me a sandwich, dont elle n’avait aucune connaissance.
Les jeunes garçons et adolescents seraient donc particulièrement réceptifs aux messages d’influenceurs charismatiques de la trempe d’Andrew Tate, qui banalisent, voire valorisent les comportements dénigrants et violents à l’égard des femmes, mettant en scène ce type de comportements comme des preuves de leur virilité. Andrew Tate agite le fantasme d’un déclassement des hommes et fait miroiter l’idée que pour devenir un homme, il faut aussi atteindre une certaine réussite sociale.
Une adjointe de direction d’un établissement scolaire de Southport explique : « Les garçons sont attirés par lui parce qu’il leur dit qu’il a du succès et qu’il est riche. Il leur vend un style de vie. Quand on mentionne sa haine des femmes, certains l’excusent par le fait qu’il s’agit juste de créer un modèle de vie où l’on réussit pour soi. »
Une « radicalisation » masculiniste dans les écoles ?
Est-ce une autre marque d’un backlash global à l’égard du mouvement féministe ? De quoi en tout cas saper les espoirs de voir la génération à venir plus consciente et moins sexiste. Il s’agit aujourd’hui de ne pas fuir le problème, mais bien au contraire, de l’affronter. Car un fossé entre élèves et membres des équipes pédagogiques existe, tant ces derniers ne sont pas toujours très au fait de ce qu’il se passe sur Instagram ou TikTok et préfèrent faire comme s’il ne s’agissait que d’un problème très anecdotique. Mépriser les discours des influenceurs ne résout rien, il faut ouvrir le dialogue. Michael Conroy s’inquiète d’un véritable phénomène de radicalisation masculiniste en ligne, comme il l’explique auprès du Daily Mail :
« On peut être très influent dans sa propre sphère algorithmique tandis que la plupart des gens dans la rue ignorent de quoi il s’agit. Ce sont deux mondes à part. Mais c’est problématique car cela passe sous les radars pendant un temps et, parce que cela n’est pas dans les médias mainstream, les parents ne voient pas ce que leurs enfants sont en train d’absorber. »
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Crédit photo : Digi24 (capture)
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