Dans un vingtième siècle naissant, des prostituées sont retrouvées mortes dans des conditions affreuses. Guy, l’écrivain solitaire décide de côtoyer les abimes de l’Enfer pour savoir. Savoir ce qu’est le mal, la perversité, l’essence même de l’humanité, en somme ce qu’il y a en chacun de nous et qui pourrait tendre à devenir pathologique.
Pour mener l’enquête, il s’entourera de Faustine, une jolie courtisane aux charmes sulfureux et de l’inspecteur Perroti, débutant et complexé. Sur un fond d’Exposition Universelle parisienne, les questionnements métaphysiques et ésotériques sont de mise. La naissance de l’industrie amène inévitablement à des changements comportementaux ; comment comprendre l’âme humaine au travers de l’évolution de l’industrie ?
Maxime Chattam intègre des interrogations fondamentales posées dans ce siècle (des allusions à la psychanalyse ou encore l’attrait pour l’inconnu par exemple), qui transparaissent au travers du contexte et des personnages. Grâce à une intrigue riche, l’auteur décortique le processus de création, d’écriture, sous couvert de principes phénoménologiques tels que la fiction ou la réalité. L’implication complète et absolue du lecteur est certaine; dans la peau d’un écrivain, on côtoie ses préoccupations, son besoin de vivre une expérience d’écriture et sa manière de la décrire.
La force de ce roman réside dans la complexité des personnages. Guy est torturé, déséquilibré : pourquoi ce désir de rencontrer l’Enfer ? Au delà du crime, fil conducteur du roman policier, on est confronté aux revers de la psychologie humaine, mais au fil des pages, peut-être que le protagoniste qu’est l’écrivain devient plus important que le tueur… Ils ne contrastent pas : ils se complètent et se cherchent comme un seul être ultime avec de nombreuses facettes ; cela n’est pas inintéressant, mais le trouble est tel que l’écrivain, le vrai, semble vouloir se dévoiler mais à travers une théorisation visiblement trop impersonnelle. Le miroir psychologique est celui d’un écrivain lambda, et peut être que si les éléments autobiographiques étaient plus assumés le résultat serait plus intense. On le déplore, c’est cette intensité qui manque au profit de la réflexion, de la description et de la théorie. Un parti pris osé.
Là où la personnalité de l’auteur traverse la figure du personnage, Maxime Chattam met l’accent sur le fait que nous sommes des êtres de contraste et de contradiction, de noirceur et d’abomination ; ici, la noirceur de l’âme humaine s’accorde avec la précision mécanique de la révolution industrielle.
Etait-ce cette ère démentielle qui inspirait pareille folie ou bien l’homme avait-il de tout temps été capable d’autant de perversion ?
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