Le 11 octobre, c’est la journée internationale du coming-out. L’occasion de redécouvrir cet article touchant, et de faire un rappel utile :
Si tu es, ou si tu connais, une personne rejetée par sa famille à cause de son homosexualité, n’hésite pas à contacter l’association Le Refuge.
Article publié le 17 février 2015
Le coming out d’Ellen Page a été un électrochoc. Je me suis dit qu’elle avait l’air tellement soulagée, et que franchement, ça ne devait pas être cool de se planquer comme ça, tout le temps.
Et puis j’ai réfléchi. Et j’ai réalisé qu’à plus petite échelle… eh bien j’étais dans le même cas.
Et qu’il ne servait à rien que je fasse les manifs pour faire valoir mes droits, les droits de l’Homme, si je n’étais même pas capable de me battre pour ça au sein de ma propre famille
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Lettre à ma mère de sa fille lesbienne
Maman,
En premier lieu, ne t’inquiète pas. Il n’y a rien de grave dans cette lettre. C’est simplement le fruit d’une réflexion longue, et pas toujours simple.
Je sais que ce n’est pas forcément évident de te parler, que ce sujet te braque, et que ça n’est pas simple pour toi… Mais imagine pour moi.
J’ai toujours été heureuse avec papa et toi. Nous avons toujours été très proches. Tu as su tous mes « petits secrets » complètement dérisoires, c’est vrai, mais que j’étais tellement fière de partager et toi tellement fière de les entendre.
Et puis j’ai grandi, et ai commencé à cultiver cette part de secret, un peu comme une honte au début ; je me sentais changer, des choses en moi me différenciaient de certaines de mes amies…
Et j’ai dû apprendre à accepter mon homosexualité, seule, comme une grande, sans aucun référent quelconque pour m’aider à répondre aux 1000 questions qui tournaient dans ma tête.
Le temps a passé, et puis, j’ai rencontré quelqu’un. J’en étais vraiment amoureuse tu sais. Et l’année qu’on a passée ensemble à se cacher de toi, ça a été une vraie année de bonheur. Tu me l’as dit d’ailleurs, que j’avais l’air heureuse. Je te sentais soupçonneuse, tes questions se faisaient pressantes. Tu sentais qu’il y avait quelqu’un et tu rêvais que je te présente ce garçon qui rendait ta fille si radieuse.
Et moi, je rêvais de te la présenter. Je ne sais pas pourquoi j’avais si peur. Tu n’as jamais tenu de propos durs envers les gays… À croire que tu les réservais pour moi.
J’avais envie de te raconter un peu ma vie, les difficultés qu’on a traversées, comme tellement de couple LGBTQ. Que tu me dises que c’était pas grave, qu’il fallait pas les calculer, ces connards qui nous crachaient dessus quand on se baladait dans la rue, qu’il fallait passer au-dessus de ces insultes qu’on nous a lancées à la gueule.
Je me souviens très bien de la façon dont je vous ai annoncé que j’étais avec ma copine, à toi et papa. Entre la poire et le fromage, littéralement, pendant le repas : « Ah non, c’est pas un copain, c’est une copine ».
Et là, tout a sombré. Quelque chose s’est brisé et tu le sais aussi bien que moi.
Je ne sais pas si tu te souviens des premiers mots que tu m’as adressés après la semaine de mutisme total qui a suivi cette déclaration. Moi, je m’en souviens. Ils me brûlent encore un peu la gorge des fois.
« J’aurais préféré que tu m’annonces un cancer ». C’était sec, et un peu brutal. Cela dit, j’y étais préparée.
Du jour au lendemain, celle qui était si bien acceptée à la maison lorsqu’elle était ma « pote » est devenue persona non grata (ou « la pute », comme tu l’as si joliment dit). Et nos rapports se sont dégradés, toujours un peu plus, tant et si bien que j’ai dû partir de la maison, avec ma valise et… c’est tout.
À mon retour, je pensais que tu avais digéré l’information. Je t’ai toujours dit que si tu voulais en parler, il n’y avait pas de problème. Mais j’attends encore.
Alors aujourd’hui, mon homosexualité est le plus gros des tabous, et j’admire avec quel soin tu tentes, jour après jour, de me présenter le fils de ta collègue, du boucher, le caissier, ou de me vanter les mérites du torse du mec de la pub pour parfum.
Tu t’acharnes, et je le vois. Parce que c’est bien trop. Et moi je ne dis rien.
Tu as toujours dit que je n’étais pas courageuse. Et sur certains aspects, tu as raison, je suis la pire des feignasses. Mais ça me blesse que tu ne réalises pas ce que j’ai encaissé sans broncher, comme tellement d’autres jeunes dans ma situation.
Comme on a dû serrer les dents. Comme c’est chiant de supporter ces 100 000 timbales qui se baladent dans la rue en disant, comme toi, qu’on a une maladie.
Aujourd’hui, maman, j’ai pris la décision de ne plus mentir. Ni à toi, ni au reste de la famille (oui, je sais, tu me l’avais formellement interdit).
Mais j’étouffe, je craque, maman.
Je ne te demande pas de me sauter au cou. Ni de me féliciter. Ni même de t’excuser. Juste de m’accepter. D’accepter le fait que ta fille soit lesbienne. D’arrêter de faire comme si ça n’existait pas.
D’arrêter de rendre mon quotidien toujours un peu plus compliqué. D’arrêter de vouloir me faire culpabiliser. Il ne manque pas grand-chose. Juste la reconnaissance de ma mère.
S’il te plaît.
À lire aussi : Comment le mariage pour tous m’a aidé à faire mon coming out
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Les Commentaires
Alors je te fais un enorme calin et j'espère que le plus dur est passé. Voilà