Cette étude de vaste ampleur, menée par Alix Sponton, chercheuse à Sciences Po Paris et à l’Ined, a été effectuée sur des pères entre 2010 et 2017, alors que le congé paternité ne comptait que 11 jours.
Mais les résultats sont tout de même très éclairants et prouvent une fois de plus que le congé paternité, aujourd’hui de 28 jours, avec seulement 5 obligatoires, doit être allongé et rendu obligatoire dans sa totalité ! Que nous dit cette étude ?
Un congé paternité pas forcément pris
30% des pères ne recourent pas au congé paternité ! C’est donc près d’un père sur trois qui ne prend pas ce congé, qui est pourtant une disposition légale. Les raisons avancées dans cette étude sont le positionnement sur le marché du travail, ainsi que la rémunération de ces derniers.
Ce sont surtout les hommes aux bas et aux haut salaires qui ne s’autorisent pas ce congé. Le recours au congé est plus faible aux deux extrémités salariales : seuls 67 % des pères chez les 20 % aux revenus les plus modestes le prennent. La tranche des pères qui le prend le plus est celle dont le revenu est compris entre 2 500 et 2 899 euros (98 % le prennent). On redescend à 73 % chez les 10 % des pères les mieux rémunérés (3 500 euros et plus). On le sait, les pressions professionnelles peuvent être fortes.
Et quand il est pris, l’implication n’est pas la même
La chercheuse Alix Sponton a étudié concrètement ce qui se passait dans les foyers, quand le père prend le congé paternité et c’est assez décevant.
Les pères sont « légèrement plus impliqués dans la répartition des tâches parentales et certaines tâches domestiques en 2017 », mais nous ne sommes pas à l’équilibre.
Des différences d’implication existent suivant la nature des tâches à effectuer. En effet, l‘étude précise :
« Lorsque le congé a été pris, il est un peu plus courant que le père prenne en charge les courses ou aille chercher les enfants (respectivement +7 et +8 points de pourcentage). En revanche, quasiment aucune différence n’est observable concernant le ménage et la préparation des repas.
Du point de vue de la répartition des tâches parentales et domestiques, la différence entre la majorité des pères qui recourent aux 11 jours et la minorité de ceux qui n’exercent pas leur droit est donc assez faible et concerne d’abord les activités qui s’effectuent en dehors du domicile et celle la plus directement liée aux enfants. »
Le père se sentirait donc compétent (et motivé !) à l’extérieur du foyer mais moins dans le foyer, en ce qui concerne le soin direct au bébé. Encore une histoire de stéréotypes !
Que faut-il faire pour parvenir à l’égalité ?
Depuis juillet, la durée du congé paternité a été allongée, et on peut donc espérer que les choses changent. Mais les pères le prendront-ils plus alors que 5 jours seulement sont obligatoires ?
La durée de ce congé semble être importante pour que de bonnes pratiques aient le temps de se mettre en place et pour que les pères soient tout aussi impliqués que les mères – dans le cadre de relations hétérosexuelles.
Mais c’est avant tout toute une culture qu’il faut aussi changer : la mère n’est pas plus apte à s’occuper de l’enfant que le père. C’est l’implication qui engendre le savoir-faire, comme l’autrice Cécile Doherty-Bigara l’énonce avec pas mal d’ironie dans son livre Nouvelle mère :
« Puisque le corps offre aux femmes la possibilité de porter un enfant, la Nature veut également que ce soit à elles de changer les couches de ladite ou dudit enfant après sa naissance, d’en prendre les rendez-vous chez le pédiatre et aussi, tant qu’on y est, de laver le sol de la cuisine, de faire les lessives et de penser à racheter du papier hygiénique pendant les vingt-cinq années qui suivent.
Cela s’appelle “l’instinct maternel”. Oui, la Nature commande très précisément cela. »
Actuellement, les mères prennent en charge 70% des taches domestiques et parentales. Pour que les choses évoluent concrètement mais aussi que la charge mentale s’équilibre dans les couples hétérosexuels, il faut donc que les pères considèrent que leur rôle est, tout autant que la mère, de s’occuper des enfants et que cela soit permis et même obligatoire légalement.
Avec un congé paternité aussi long que le congé maternité et OBLIGATOIRE. Hey, les candidates et candidats à la présidentielle, vous m’entendez ?
À lire aussi : Bon, on arrête d’applaudir les pères dès qu’ils changent une couche, ça vous dit ?
Crédit photo : Kampus Production/Pexels
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