Le vent souffle fort à Gérardmer, faisant vaciller les festivaliers, encore un peu soûls de la veille.
Un week-end au festival de Gérardmer 2020
Le festival s’est achevé hier soir, sous les applaudissements d’une foule en liesse.
Aujourd’hui, tout le monde a un peu mal aux cheveux, après avoir passé le dimanche entre rattrapage des films en compétition et ingestion de pintes au Grand Hôtel, où les coutumiers de l’évènement ont l’habitude de se réunir pour tailler le bout de gras.
Avant cela, samedi soir, comme le veut la tradition, a eu lieu La nuit décalée, lors de laquelle Arielle Dombasle et ses amis (Asia Argento et Nicolas Ker entre autres) sont venus présenter Alien Crystal Palace, réalisation d’Arielle elle-même.
Un film sorti en 2019 qui ressemble bien à sa créatrice : fantasque et déroutant.
Mais avant de céder à la sirène Arielle, j’ai bien sûr été voir tous les films en compétition (et une partie des films hors-compétition).
Parmi tous ceux projetés, quelques-uns sont vraiment sortis du lot et méritent largement un joli bout de papier sur madmoiZelle.
Si le palmarès officiel est tombé hier lors de la cérémonie de clôture du festival, sacrant de nombreuses fois l’excellent Saint Maud, j’ai envie de faire bande à part en te livrant mon palmarès personnel des plus beaux films de cette édition 2020.
Saint Maud, de la foi à la folie
Cette année, la compétition a été largement dominée par une femme. Et à raison !
Rose Glass, réalisatrice de Saint Maud, a livré un film très abouti d’un point de vue esthétique et symbolique, qui questionne la foi démesurée de son héroïne.
Ce premier long-métrage de la cinéaste raconte l’histoire de Maud, une infirmière à domicile qui se voit confier une nouvelle mission : s’occuper d’Amanda, une danseuse charismatique rongée par une maladie qui la contraint à vivre enfermée dans sa grande demeure.
Les deux femmes sont aux antipodes l’une de l’autre. Maud est réservée, quasi-mutique, Amanda est extravagante et impétueuse.
Maud, loin d’être aussi paisible qu’il n’y paraît, est rongée par un secret trop lourd pour elle.
Secret qui lui pèse chaque jour, la tourmente. Persuadée de recevoir des messages de Dieu lui-même, Maud se met en tête de sauver l’âme pervertie d’Amanda.
Saint Maud est un film âpre et douloureux qui n’épargne ni ses héroïnes ni son public et n’hésite pas à plonger ce dernier dans le malaise.
Pendant 1h23, j’ai souffert pour Maud et avec Amanda.
Ces deux femmes, chacune en proie à une souffrance différente : l’une psychologique, l’autre physique, nous transmettent un morceau de leur douleur.
Le film s’attaque par ailleurs à des sujets très costauds : la foi, la décrépitude du corps, la folie et pour finir : la mort.
Saint Maud, c’est douloureux mais superbe, ça sort le 24 juin au cinéma, et ça vaut bien plus qu’un coup d’œil distrait.
The Vigil veille sur nos peurs
Ce sont souvent les films que j’attends le moins qui me surprennent le plus.
Cette règle que j’observe quasi-quotidiennement s’est encore appliquée vendredi soir lors de la projection de The Vigil, un film à petit budget du réalisateur Keith Thomas.
Un film qui sur le papier a des petits airs de The Jane Doe Identity et duquel je n’attendais pas grand chose.
La surprise s’est donc avérée délicieuse.
L’intrigue se déroule à Brooklyn et se concentre sur le personnage de Yakov, un jeune homme qui après avoir quitté la communauté juive orthodoxe, se retrouve à court de foi.
Un soir, alors qu’il accuse de sérieux problème d’argent, il accepte à contrecœur d’assurer la veillée funèbre d’un membre décédé de son ancien groupe religieux.
Sa mission ? Demeurer toute la nuit avec la dépouille du défunt et sa femme atteinte d’Alzheimer.
Mais peu après être arrivé, Yakov est sujet à ce qu’il prend pour des hallucinations…
The Vigil m’a beaucoup surprise de par sa grande sensibilité.
Loin de n’être qu’un film d’horreur bourrin rythmé par les jump scare, il parvient à analyser les traumatismes de son personnage principal avec beaucoup de finesse et d’émotion.
Résultat : le tout prend aux tripes.
The Vigil
mêle effroi et délicatesse avec brio, tant et si bien que j’en suis sortie quasi-bouleversée.
J’aimerais souligner également de beaux efforts de mise en scène ainsi qu’un clair-obscur permanent qui apporte au film une esthétique quasi-picturale.
Demeure toutefois un problème de design sonore qui m’a parfois fait sortir de l’intrigue. Dommage.
Jumbo, passer l’amour à la machine
Quel bonbon bordel !
Jumbo, c’est sans doute le film qui m’a procuré le plus de plaisir de tout le festival. Projeté hors-compétition, il a fait salle comble samedi après-midi.
Sa productrice ainsi que son actrice principale, Noémie Merlant (Portrait de la jeune fille en feu) sont venues présenter leur travail sur scène, tout en timidité.
Jumbo, c’est le tout premier long-métrage de sa réalisatrice. Un premier travail tout en sensualité et en onirisme qui s’offre un casting 4 étoiles, composé notamment de Noémie Merlant et d’Emmanuelle Bercot.
Jumbo, c’est l’histoire de Jeanne, une jeune femme discrète qui travaille de nuit dans un parc d’attraction.
Flirter avec les hommes de son travail ne l’intéresse pas, contrairement à ce qu’aurait aimé sa mère, obsédée par l’idée de caser sa fille unique.
Ce qui fascine Jeanne, ce sont les attractions elles-mêmes, dont elle fabrique des reproductions en fer dans sa chambre d’ado.
La fascination se meut tout doucement en amour passionnel lorsque Jeanne « rencontre » Jumbo, une nouvelle attraction.
Baignée dans les lumières vertes, bleues, rouges et violettes de l’attraction, Jeanne s’abandonne à des sensations inconnues jusqu’alors, et expérimente son premier orgasme.
Sur le papier, Jumbo semble un peu farfelu, à l’image des héros qu’il met en scène. Mais l’amour de Jeanne est si sincère qu’il finit par devenir crédible à l’écran.
Jumbo est un film poétique sur la tolérance qui pâtit de quelques maladresses au niveau des dialogues, mais qui mérite tout ton amour, un amour aussi fort que celui de Jeanne pour Jumbo.
Jumbo sortira en salle le 18 mars.
Emprisonnés dans un Vivarium
Salut c’est Alix !
Tom (Jesse Eisenberg) et Gemma (Imogen Poots) recherchent une maison dans laquelle s’installer ensemble.
En entrant dans cette agence immobilière tenue par un homme des plus étrange, ils n’imaginaient pas une seconde ce qui allait leur arriver.
L’agent immobilier les embarque dans un quartier résidentiel ultra uniformisé et désert qui fait froid dans le dos… et les y laisse, sans que le couple puisse en sortir, coincés dans une boucle infinie qui les ramène toujours à la maison 9.
Tom et Gemma sont condamnés à s’installer dans cette maison aseptisée, et à élever un enfant qui n’est pas le leur.
J’ai ri tantôt franchement, tantôt jaune devant Vivarium, qui se veut grinçant, et dont la morale est cruelle.
Le réalisateur s’inspire d’une Irlande dévastée par la crise des subprimes pour créer un décor très semblable aux ghost towns, ces villes fantômes irlandaises constituées de quartiers résidentiels dont les maisons n’ont jamais pu être achetées.
Vivarium est un pari réussi, à l’atmosphère glaciale et à l’humeur taquine qui sortira le 11 mars prochain.
Et voilà pour mon tour d’horizon personnel des meilleurs films de Gérardmer 2020.
J’espère que tous ces films sauront se frayer un chemin jusqu’à ton grand cœur cinéphile et te donneront envie de prendre tes places pour la prochaine édition du festival de Gérardmer.
À lire aussi : Les films de 2020 qui nous tentent le plus (1ère partie)
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Alien Crystal Palace - la chronique de Nanarland