Live now
Live now
Masquer
Source : Jacod Lund / Canva
Daronne

Que penser des « gender reveal parties » ?

Une « gender reveal party » avait été organisée au Brésil et a dévoilé, en plus du sexe de l’enfant à naître et des clichés, la grande irresponsabilité des organisateurs de cette fête qui aurait pu mal tourner.

Connaissez-vous les « gender reveal parties », littéralement les fêtes de révélation du genre en français ? Très en vogue depuis quelques années, elles servent à dévoiler le sexe du futur enfant à naître, devant une audience et les futurs parents, qui sont déjà au courant, ou qui le découvrent en même temps que leurs invités. Le but ? Crier très fort si l’on voit la couleur rose (pour les filles) ou bleue (pour les garçons) apparaitre de façon plus ou moins originale.

Si l’on peut se poser des questions quant à l’utilité — et au sexisme — de ce genre d’évènements, certains n’hésitent pas à pousser l’originalité de la révélation à un paroxysme écologiquement dangereux, comme c’est le cas avec cette « gender reveal party » qui s’est déroulée au Brésil il y a quelques mois.

Ils révèlent le genre de leur enfant en colorant une cascade en pleine nature

Le 25 septembre dernier, un couple a décidé d’organiser une petite sauterie dans le Mato Grosso, un État du centre du Brésil. Tous les clichés de ce genre de fêtes étaient présents : fausse cigogne, ballons roses et bleus, canons qui balancent des fumigènes colorés dans les airs. Mais le petit plus : la cascade naturelle que l’on peut voir en fond, qui se colore de bleu, annonçant que l’enfant à naître sera un garçon. Quitte à être dans les clichés, autant y aller à fond.

C’est une vidéo tournée par les proches du couple de parents qui montre cette aberration écologique. En pleine crise climatique, où l’eau devient une denrée rare, ces personnes ont trouvé l’idée judicieuse de colorer l’eau de la cascade Cachoeira Queima-Pé, qui se jette ensuite dans une rivière qui alimente la ville de Tangará da Serra.

Après avoir provoqué un tollé sur leur compte Instagram, les futurs parents ont vite supprimé les images. Mais tout (ou presque) étant éternel sur Internet, elle a de nouveau été uploadée par d’autres, et notamment par Vanessa Costa, ingénieure forestière brésilienne et créatrice de contenu, avec en légende :

Sérieusement, ils ont pensé que c’était une bonne idée de mettre de la teinture dans une cascade ?! Autant de façons de faire gender reveal party et ils ont réussi à n’en choisir qu’une avec un impact environnemental.

@vanecosta10

Gender reveal party : la cascade a-t-elle été polluée ?

D’après la SEMA, agence pour la protection environnementale de la région de Mato Grosso contactée par le Washington Post, qui a réalisé des prélèvements pour vérifier si la qualité de l’eau avait été altérée, « aucun changement dans les paramètres physiques de l’eau, tels que la couleur et autres, et aucune trace de mortalité locale des poissons » n’auraient été détectés. Les analyses sont toujours en cours.

Néanmoins, quand bien même l’eau n’aurait pas été polluée par la fête, la SEMA a rappelé la loi brésilienne indiquant que « jeter des déchets ou des débris solides, liquides ou gazeux, des huiles ou des substances huileuses » sont passibles d’une amende allant de 926 $ à 9 263 $ — soit entre 1000 et 10 000 € — en fonction des dégâts provoqués.

D’après le couple de parents contactés par la SEMA, ces derniers n’étaient pas au courant qu’une substance serait diffusée dans l’eau de la cascade, accusant l’un des membres de leur famille de cet acte. Cette personne aurait d’ailleurs été identifiée et contactée.

Pourquoi un tel attrait pour les gender reveal parties ?

Ces dernières années, on en voit de plus en plus en vidéos sur les réseaux sociaux. Souvent bourrées de clichés, elles semblent pourtant être très importantes pour les futurs parents qui font de la révélation du sexe de leur enfant à naître un véritable évènement.

Parfois, ce sont même des fêtes carrément dangereuses :

Oui, c’est bien un alligator. This is americaaaaa

Mais pourquoi ? Pourquoi ce besoin de révéler la forme des parties génitales de son enfant à naître à sa famille et ses amis ? Quelle est cette injonction à la célébration ? On connaissait déjà les babyshowers, fêtes généralement pleines de clichés, elles aussi, qui consistent à célébrer la future naissance. Ça pouvait déjà être too much mais ok, c’était aussi un bon prétexte pour manger du gâteau et boire du jus de pomme, tout en déballant des cadeaux.

Mais quel est l’intérêt de célébrer le sexe d’un enfant qui n’est même pas encore né ?

Pour certains parents adeptes de cette célébration, la « reveal gender party » est surtout une occasion supplémentaire de célébrer la grossesse. La naissance est encore loin, la babyshower, qui se fait généralement vers le 8e mois de grossesse, aussi, et cette nouvelle fête peut permettre de partager la nouvelle et la joie qui peut aller avec la grossesse à ses proches, dès le début (ou presque) de la gestation.

Sur le papier, c’est ok, pourquoi pas. Mais ce qui est dérangeant, en plus du sexisme et des clichés qui peuvent être ressentis comme mielleux, c’est le fait de célébrer à l’avance un genre qui est choisi pour l’enfant, et qui ne sera peut-être pas celui qui lui correspondra ensuite.

Sur ce point, la créatrice même de la « reveal gender party », Jenna Karvunidis en rajoute une couche, ayant déjà expliqué qu’elle regrettait de voir à quel point ces fêtes étaient parties en vrille. Sur sa page Facebook, elle publie :

Jenna Karvunidis
Traduction : « […] Quelqu’un s’est souvenu que c’était moi qui avais « inventé » la fête de révélation du genre. J’avais écrit à propos de ma fête sur mon blog et sur un forum parental en juillet 2008. Elle a été reprise, puis une interview de moi a été publiée dans le magazine The Bump, et l’idée s’est peu à peu propagée à partir de là. J’ai même encadré l’article !

Quoi qu’il en soit, j’ai eu beaucoup de sentiments mitigés à la suite de cela. Ça a juste complètement explosé ensuite ! Littéralement – des tirs d’armes à feu, des incendies de forêt, plus d’emphase sur le genre qu’il n’a jamais été nécessaire pour un bébé.

Qui se soucie du sexe du bébé ? Je l’ai fait à l’époque parce que nous ne vivions pas en 2019 et ignorions ce que nous savons maintenant – que l’accent mis sur le sexe à la naissance laisse de côté une grande partie de leur potentiel et de leurs talents qui n’ont rien à voir avec ce qu’il y a entre leurs jambes.

PLOT TWIST, le premier bébé d’une Gender Reveal Party est une fille qui porte des costumes ! »

D’après Jenna Karvunidis, sa première fille commencerait à s’identifier comme non-binaire.

Les fêtes de célébration de la naissance, pourquoi pas. Mais fêter le futur genre présumé d’un bébé qui n’est pas encore né, tout en entourant de clichés et de stéréotypes complètement dépassés, si on pouvait éviter, tout le monde en sortirait gagnant.

Conditionner un bébé avant même sa naissance

Si certains pensent que ces fêtes ne sont que des célébrations banales, joyeuses, et qu’elles n’ont rien de sexiste, il n’y a qu’à regarder quelques vidéos montrant la déception des futurs parents, ou plus souvent du père, soyons honnêtes, lorsqu’il découvre que c’est une fille qui va naitre. En voici un exemple, et c’est loin d’être le seul :

Comme si avoir encore une fille était une plaie !

Attention, il n’y a, bien sûr, pas de mal à vouloir avoir un garçon. Il n’y a pas de mal non plus à vouloir connaître le futur sexe de son enfant, comme c’est le cas pour 85% des parents français qui souhaitent obtenir cette information avant la naissance.

À lire aussi : Fille ou garçon ? On s’en fiche : on a décidé d’ignorer le sexe de notre bébé jusqu’à sa naissance

Il n’y a pas de mal à vouloir célébrer une future naissance, à vouloir manger du gâteau, à vouloir être au centre de l’attention pour une après-midi, tout en recevant des félicitations. Vraiment, c’est ok, chacun son truc.

Là où cela devient problématique, dans le cas de la « reveal gender party » et de son exubérance, c’est quand elle continue à entretenir un sexisme ordinaire à peine dissimulé, et que cela force sur les stéréotypes qui n’aideront pas la personne à naître à s’en dépatouiller. En effet, si les parents sont déjà autant à fond sur les clichés avant même la naissance, il ne faut pas trop espérer d’amélioration pendant toute l’enfance du bambin, sans être pessimiste.

Faire la fête, c’est ok, être heureux d’avoir un enfant, c’est ok, mais le faire tout en respectant l’environnement, sans vouloir à tout prix recevoir la palme de la teuf la plus ouf du dimanche après-midi au détriment de la nature, c’est quand même plus sympa. Pouvoir être heureux de bientôt accueillir une fille ou un garçon sans marquer de différences qui conditionneront toute la future enfance du bébé à naître, c’est encore mieux, pour tout le monde.


Vous aimez nos articles ? Vous adorerez nos podcasts. Toutes nos séries, à écouter d’urgence ici.

Les Commentaires

42
Avatar de MelanieM11
6 septembre 2023 à 11h09
MelanieM11
Ouhla un peu de tolérance pour les pauvres parents !! Personnellement je n'ai pas fait de baby shower/gender party. Par contre oui, j'ai souhaité savoir le sexe du bébé avant sa naissance. Pour le prénom, et se projeter aussi, désolé ... rien que pour l'aspect pratique voici un exemple ; j'achète l'intégralité des vêtements bébé de seconde main (ou récupère par de la famille), des fringues vintage donc ... et genré ... les vêtements mixtes c'est très récent ! et mon dieu la charge mentale/ de travail/ économique que ca représente si on veut anticiper et acheter que mixtes pour nos bébés. franchement être parent c'est déjà un tel chamboulement dans sa vie, y'a des combats qu'on lâche un peu. par contre, élever mon fils au mieux et l'accompagner dans la société de demain ca reste ma priorité !
0
Voir les 42 commentaires

Plus de contenus Daronne

Source : Pixabay
Daronne

Julie, mère solo et nomade : « être nomade n’a pas augmenté ma charge mentale, la vie est juste moins linéaire »

13
Copie de [Image de une] Horizontale – 2024-11-18T145159.142
Daronne

Chronique d’une daronne : la galère des devoirs à 21h

Copie de [Image de une] Horizontale – 2024-11-14T223435.669
Chère Daronne

Help, mon enfant me ment, je fais quoi ?

16
Copie de [Image de une] Horizontale – 2024-11-08T164030.491
Travail

Courrier du taf : « mon entreprise ne veut plus remplacer les départs en congé maternité »

2
Copie de [Image de une] Horizontale – 2024-11-07T161546.137
Chère Daronne

Help, je suis la seule à me lever la nuit pour m’occuper du bébé et j’en peux plus

37
Source : TerryJ de Getty Images Signature
Daronne

Dans la vie d’Émilie et sa belle-mère toxique : « Tu la portes comme une mama africaine »

3
Source : Robert Kneschke
Daronne

« Maman solo, je subis de plein fouet l’inflation et le quotidien à gérer » : dans la vie de Mélissa, mère célibataire d’un enfant

2
Source : Emmanuelle Mayer
Couple

Emmanuelle, en célicouple : « Nous n’avons ni le courage ni l’envie de passer à la famille recomposée »

11
[CD] Image de une • Verticale (8)
Daronne

Help, je ne suis pas sûre de vouloir des enfants, mais mon conjoint insiste, je fais quoi ?

6
Copie de [Image de une] Horizontale – 2024-10-25T164859.048
Daronne

« Antoine est mon miracle, mais lui n’en est pas un » : Solène nous raconte son accouchement

Pour les meufs qui gèrent