Alors qu’une pétition déposée le 23 mars 2023 appelant à la dissolution de la Brav-M (Brigade de répression de l’action violente motorisée), signée par plus de 260 000 personnes, a été classée sans suite par les élus de la commission des lois de l’Assemblée nationale le 5 avril, cela relance le débat autour des violences policières, et le rôle même des forces de l’ordre.
Face à l’impunité dont bénéficient de nombreux policiers, on peut se demander dans quelle mesure la police serait un cas limite dans un État de droit, comme le théorise le philosophe et sociologue Geoffroy de Lagasnerie. En effet, elle peut produire sa propre loi, rogner sur nos droits à manifester, résister, voire s’octroyer un droit de vie ou de mort sur nos vies. En particulier celles de minorités raciales, vu les statistiques du Défenseur des droits de 2017 : les jeunes hommes perçus comme noirs et arabes encourent 20 fois plus de risques d’être contrôlés par la police que le reste de la population, par exemple.
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Alors que les manifestations et grèves contre la réforme des retraites se poursuivent en France, mais que la peur face à la police grandit, c’est peut-être l’occasion de réécouter des témoignages édifiants de victimes, directes ou collatérales, de violences policières.
Affaire Olivio Gomes, tué par la police en 2020 : le témoignage de son frère
Le 17 octobre 2020 à Poissy, Olivio Gomes est tué par un policier (trois coups de feu à bout portant) à l’âge de 28 ans. Le policier en question est mis en examen pour homicide volontaire peu après le décès. Madmoizelle avait rencontré son frère, Leonel Gomes, pour qu’il raconte son histoire, et surtout l’après.
Le témoignage de Michel Zecler, tabassé par la police en 2020
À l’occasion de la sortie de son livre Rester debout, Madmoizelle avait aussi rencontré Michel Zecler. Une équipe de policiers l’a roué de coups alors qu’il rentrait dans son studio d’enregistrement du 17e arrondissement de Paris le 21 novembre 2020. La diffusion de la vidéo de son interpellation a connu un retentissement médiatique, d’autant plus fort que de nombreuses manifestations en France avait lieu contre le racisme et les violences policières. À cette même période, une proposition de loi relative à la sécurité globale était discutée à l’Assemblée nationale.
Quatre policiers ont été suspendus le temps de l’enquête puis mis en examen le 30 novembre 2020. Deux d’entre eux sont immédiatement écroués, puis libérés le 22 décembre 2020, sous contrôle judiciaire strict, les deux autres sont placés sous contrôle judiciaire. Nous avons rencontré Michel Zecler un an après son agression :
Ces deux témoignages ne représentent qu’une infime partie des violences policières observées en France depuis des décennies. On peut également penser à la répression au métro Charonne de la manifestation du 8 février 1962, cas d’école de violence policière à l’encontre de personnes manifestant contre l’Organisation armée secrète et la guerre d’Algérie, faisant finalement neuf morts. Mais aussi aux révoltes de mai 1967 en Guadeloupe (événement appelé en créole « Mé 67 »), où des gendarmes ont violemment réprimé des manifestants, entraînant au moins 8 morts (voire 87 d’après Georges Lemoine, alors secrétaire d’État aux DOM-TOM du Premier ministre Laurent Fabius, en 1985), lors de grèves consécutives à une agression raciste. Ou encore les morts de Malik Oussekine en 1964 ; Zyed Benna et Bouna Traoré en 2005 ; Lamine Dieng, Moushin Sehhouli et Laramy Samoura en 2007 ; Amine Bentounsi en 2012 ; Rémi Fraisse en 2014 ; Adama Traoré en 2016 ; Liu Shaoyao et Angelo Garand en 2017 ; Zineb Rédouane en 2018 ; Steve Maia Caniço en 2019 ; ou encore Cédric Chouviat en 2020. Des morts traités comme des faits divers isolés alors qu’on pourrait relier les pointiller pour en tirer des conclusions.
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Les Commentaires
Imaginons (par exemple) un.e instit' qui cogne ses élèves... QUI oserait défendre cette personne en disant que c'est hypocrite parce qu'on est quand même bien content.e.s d'avoir quelqu'un pour apprendre à lire à nos mômes...???