Célébrer la puissance des femmes, chanter les héritages afro-caribéens qui font danser la France et le monde, rire de l’absurdité du racisme, rendre hommage aux victimes en Palestine, au Congo ou en Méditerranée… Ce jeudi 25 avril, Les Flammes, la cérémonie qui célèbre les cultures populaires, a marqué l’histoire.
Cette soirée tout en paillettes, en performances et en hommages ne s’est pas contentée de récompenser des artistes adoubés par l’industrie du streaming. Elle s’est donné les moyens de créer un espace d’expression libre, bienveillant et joyeux. Grâce à des invités issus de tous les milieux, de l’art au sport en passant par le militantisme ou le cinéma, Les Flammes ont permis de prendre conscience de l’ampleur du talent, de la créativité et de la force de frappe de communautés souvent oubliées, stigmatisées ou violentées pour leur genre, leur situation administrative ou leurs origines.
On pourrait résumer la cérémonie avec cette phrase prononcée sur scène par Assa Traoré : « La France a de la chance d’avoir cette jeunesse. »
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L’hommage de Médine aux victimes à Gaza
Difficile de retenir ses larmes et dénouer sa gorge devant la prestation de « Gaza Soccer Beach ». Poète virtuose, Médine a interprété ce titre écrit en hommage à 4 enfants palestiniens tués par des missiles israéliens en juin 2014 alors qu’ils jouaient au football sur une plage. Le texte est un bijou de poésie, tout en rimes et en métaphores chargées de double sens autour du champ lexical du football. Derrière l’artiste, des noms d’enfants décédés à Gaza s’affichent en blanc au fur et à mesure sur un écran noir. Un immense moment de rap, de musique et de solidarité internationale.
Merci aux Flammes de nous permettre d’inscrire le nom de tous les enfants disparus. Il n’y a pas assez de place sur les murs pour pouvoir inscrire les noms des 35.000 victimes.
« Nous sommes la voix vivante de ceux qui sont morts »: le discours d’Assa Traoré
Pour remettre La Flamme de l’engagement social, Les Flammes ont invité Assa Traoré, militante antiraciste et sœur d’Adama Traoré, un jeune homme de 24 ans décédé en juillet 2016, à la gendarmerie de Persan, après son interpellation par les gendarmes. Listant les noms de plusieurs autres hommes racisés tués par des violences policières :
Nous sommes les voix vivantes. Nous avons la chance d’être là. Nous sommes la voix vivante de ceux qui sont tombés, de ceux qui sont morts.
L’invitation d’Alice Diop et Lina Soualem
Encore un clin d’œil très bien pensé de la part des Flammes. Pour remettre la Flamme du meilleur clip à la rappeuse Shay, les organisateurs ont invité les réalisatrices Alice Diop et Lina Soualem. Loin d’être anodine, leur présence résume bien ce que Les Flammes ont très bien compris : l’engagement est global et collectif. Cinéma d’auteur, documentaire ou clip de rap aux millions de vues : peu importe le médium, tous ces artistes porteurs de mémoires douloureuses, de cultures riches et de créolisation décloisonnent les disciplines pour faire aboutir leur vision humaine, solidaire et flamboyante du monde.
Des dizaines de milliers d’euros pour les migrants disparus en mer, par Zamdane
En septembre dernier, le rappeur marocain de 25 ans Zamdane organisait un grand concert à Marseille. Tous les fonds générés par l’évènement ont été reversés à l’association SOS Méditerranée. 14 300 € ont ainsi pu financer des opérations de sauvetage en mer. Une action saluée par Les Flammes, qui lui ont remis la Flamme de l’engagement social des mains d’Assa Traoré et Sara El Attar.
Célébrer les artistes tant qu’ils sont vivants : le discours d’Euzhan Palcy
Nouvelle séquence émotion quand Euzhan Palcy, première réalisatrice noire produite par Hollywood, première cinéaste martiniquaise à remporter un Oscar et première réalisatrice noire à remporter un César. Cette grande dame du cinéma, a fait une entrée tout en joie et en énergie en saluant l’initiative des Flammes de récompenser les artistes de leur vivant. Des propos qui résonnent avec la disparition le 2 avril dernier de l’autrice guadeloupéenne Maryse Condé :
Êtes vous heureux ? Je n’entends pas, faites du bruit ! C’est merveilleux de récompenser les artistes de leur vivant parce que trop souvent on attend qu’ils décèdent pour faire des grands discours et tout ça.
Les Commentaires
Et pendant qu'on écrit ici, des femmes palestiniennes sont victimes de traitements dégradants et de violences sexuelles dans les prisons israéliennes, et ça, c'est documenté par Amnesty. Tu parles de ne pas renvoyer les souffrances dos à dos, alors que le témoignage de Mia Schem (ex-otage israélienne) a été largement plus relayé/moins remis en question que celui de Raphaël Pitti (médecin humanitaire qui est intervenu à Gaza), dans les médias grand public.
Et qu'est-ce qui a aidé cette bête immonde à naître en Europe déjà ? Le christianisme, et le besoin de faire porter le chapeau à une minorité "déicide". Tant qu'on aura pas interrogé le "roman national" (coucou Saint Louis) à la lumière de cette question, en effet, on avancera pas. Tant qu'on aura pas compris que l'antisémitisme, sous toutes ses formes a permis de faire avaler la pilule de l'absolutisme royal/des coups durs à la société, la bête immonde persistera, surtout avec cet immonde cliché du "juif usurier avare qui contrôle le monde en secret" (cf Dieudonné).
J'ose rappeler que le projet sioniste est en grande partie né à cause de l'antisémitisme des européens.
D'ailleurs, vous parlez du recrutement par des organisations terroristes via la cause palestinienne, mais ce recrutement ne s'explique-t-il pas, justement, par l'absence, dans le débat public de réflexions politiques consistantes, et de débats qualitatifs dans les médias de grandes diffusions ? Est-ce que ce n'est pas justement lié à la criminalisation de la position pro-palestinienne, criminalisation qui renforce l'idée du juif contrôlant le monde en secret ?
J'en ai marre de la "lutte contre l'antisémitisme" version LICRA, sans analyse politique qualitative derrière. Encore une fois, lutter contre les racismes (dont l'antisémitisme), est une affaire politique pas humanitaire ou morale.
Pour ce qui est de la question iranienne, c'est justement en politisant le sujet qu'on comprend que l'Iran soutient le hamas parce qu'il a un intérêt géostratégique à le faire. Et puis, l'instrumentalisation des droits des femmes/des droits humains pour délégitimer des luttes anticoloniales, on souffle... On n'oppresse jamais des gens "pour leur bien", si on fait ça, on est en plein dans le féminisme blanc.
"Cynisme, bêtise, opportunisme et lâcheté dans tous les camps."
Peut-être, mais il y a un camp soutenu par le système politico-médiatique et l'autre non, c'est là la question structurelle.
La paix ne se décrète pas, elle se construit. Et dans un contexte colonial, il n'y a que l'amélioration de la condition politique des colonisés qui peut aboutir à une solution de long terme. Perso, je trouve que dans le champ politique français, le discours du NPA , de LFI et de RP sur le sujet est déjà consistant, pas parfait, mais consistant.
Oui, la paix semble plus que lointaine en ce moment, ce qui justifie d'ailleurs qu'on prenne des positions radicales à ce sujet.
Enfin bref, comme le disait @Baye cette énième injonction à prendre partie pour des personnes déjà soutenues par le système dominant, alors qu'on parle d'une cérémonie globalement destinée à mettre en avant les minorités, c'est carrément indécent.
On nous demande déjà d'en prouver assez le reste de l'année, merci bien.
Sinon, pour revenir à la cérémonie, je suis vraiment contente des victoires d'Aya, et j'ai trouvé son Medley génial. J'étais aussi contente que Yamê - entre autre - ait droit à cette pub, pcq j'avais adoré "Bécane".