Une vie entre Orient et Occident
La vie de Pearl Buck a tellement été partagée entre les Etats-Unis, pays de ses parents où elle est née, et la Chine, pays où elle a grandi et passé la plus grande partie de son existence, qu’on a du mal à savoir s’il faut réellement la considérer comme une Occidentale ou non. Et c’est cette connaissance très précise d’une culture si éloignée de la nôtre qu’elle nous livre dans ses oeuvres.
En effet, Pearl Buck quitte le continent américain avec ses parents missionnaires presbytériens l’année de sa naissance, en 1892, pour rejoindre l’Empire du Milieu, qui commence alors à peine à s’ouvrir aux influences extérieures après des siècles d’isolement. Eduquée par un précepteur chinois, elle découvre de l’intérieur les coutumes de son nouveau pays dont elle apprend aussi la langue. Après être retournée aux Etats-Unis pour aller à l’université, elle retrouve l’Asie en se mariant avec un Américain installé en Chine. Bref, tu l’auras compris, quand elle écrit sur ce pays, elle sait de quoi elle parle.
Et justement, elle a beaucoup écrit sur sa deuxième patrie : La Terre chinoise, Pivoine, Pavillon de femmes, Impératrice de Chine,… A vrai dire, très peu d’ouvrages de sa bibliographie n’y font pas référence. Vent d’Est, vent d’Ouest, le livre que j’ai choisi pour introduire Pearl Buck sur madmoizelle.com, ne déroge pas à la règle.
Vent d’Est vent d’Ouest : la difficile modernisation de la Chine au XXème siècle
L’histoire de ce roman paru en 1930 montre que l’idée de confrontation entre Orient et Occident n’est pas neuve et permet de comprendre l’évolution de la société chinoise dans les premières décennies du XXème siècle.
Ecrit sous la forme d’un roman épistolaire, Vent d’Est vent d’Ouest a pour héroïne Kwei-Lan, une jeune chinoise qui a été élevée dans les traditions ancestrales d’une Chine figée depuis des générations. Elle découvre son époux, un Chinois familiarisé avec les moeurs occidentales durant ses études de médecine aux Etats-Unis, le jour-même de son mariage. Celui-ci refuse de partager le lit conjugal pour la nuit de noces, préférant la laisser tout d’abord s’attacher à lui.
Comme les Occidentaux, il souhaite la considérer comme son égale et lui laisser une certaine liberté de choix. Il décide également de rompre avec les coutumes établies en quittant le foyer de ses parents avec sa femme pour habiter dans leur propre maison. Kwei-Lan est totalement désemparée par cette attitude à laquelle rien ne l’avait préparée. On lui a appris à plaire à un mari chinois, et non à un Occidental…
Son désespoir attend son comble lorsqu’il lui demande de se débander les pieds, qu’elle a réussi à maintenir si menus grâce à des souffrances infinies dans son enfance. Lorsqu’elle finit par accepter de rompre ce dernier lien qui la reliait aux traditions qu’on lui avait inculquées, son mari se rapproche d’elle. L’Occident la menace encore plus dangereusement lorsque son frère revient de son université américaine avec une jeune femme occidentale qu’il a épousée contre l’avis de ses parents.
En adoptant le point de vue d’une jeune Chinoise, Pearl Buck livre un récit touchant et délicat, qui souligne la difficulté de l’ouverture à la modernité et qui relativise ce qui nous semble « normal ». La description que fait Kwei-Lan des vêtements occidentaux de sa belle-soeur, qu’elle trouve aussi ridicules que peu seyants, ou la surprise qu’elle manifeste à propos de certaines de nos coutumes permettent de nous voir d’un oeil différent.
Un écrivain nobélisé très (trop ?) accessible
Toutefois, j’ai été très étonnée de découvrir Pearl Buck dans la liste des écrivains Prix Nobel. Si ses romans sont agréables à lire et racontent de jolies histoires, l’écriture de cette auteure n’a – à mes humbles yeux – aucune originalité particulière, contrairement à Günter Grass ou Elfriede Jelinek, qui puisse justifier cette distinction. Son écriture est fluide et agréable, mais n’a rien d’exceptionnel. Le bon côté des choses, c’est que… Pearl Buck est de ce fait une nobélisée très accessible !
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