Le 2 mai 2021
Si les photos d’animaux mignons paraissent irrésistibles pour beaucoup de personnes qui se les partagent donc sur les réseaux sociaux, cela en fait un cheval de Troie parfait pour l’industrie de la mode. Parce que oui, il existe également une niche (vous l’avez ?) méconnue du marketing d’influence : le business des vêtements pour chien !
On le soupçonne rarement, pourtant la mode pour animaux peut rapporter gros.
C’était le cas avec Grumpy Cat, (mort en mai 2019, paix à son âme), un chat dont l’air constamment rabougri aux yeux des humains par anthropomorphisme, avait donné lieu à toute une panoplie de produits dérivés. Leurs revenus auraient rapporté plus d’une centaine de millions de dollars à la propriétaire du grincheux félin, Tabatha Bundesen, d’après BFM. Ou encore Boo, un poméranien (également mort en 2019, RIP) qui avait également rapporté des millions en produits dérivés — mais n’était pas une icône mode à proprement parler, puisqu’il passait sa vie à poil. Normal.
Les vêtements de luxe pour chien, ça existe !
Or, si les chats ne sont pas du genre à se laisser faire, encore moins relooker, plusieurs marques développent des vêtements et accessoires pour chien. Dont beaucoup de griffes de luxe. Oui, oui, on peut habiller son chien en Dior… Ou même en Fendi qui vient de lancer sa gamme pour animaux (à partir de 220€ le collier monogrammé).
De quoi attirer les convoitises et professionnaliser le secteur : il existe désormais des agences d’influence spécialisée en placements de produits sur canins, comme The Dog Agency, aux États-Unis.
Mais pourquoi tant d’engouement ? Parce qu’avec la pandémie, on passe plus de temps devant nos écrans que jamais. Et qu’y voir des animaux mignons provoquent souvent de la joie, donc on retient, voire partage ces images. En plus, c’est le genre d’influenceurs incapables d’avoir des comportements problématiques (contrairement à James Charles, au hasard).
Tika, la chienne-influenceuse au million d’abonnés
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Parmi les chiens-influenceurs les plus connus, Tika est une star de TikTok et a été saluée par le Vogue américain pour ses looks suivis par 1 million de personnes sur Instagram. Son propriétaire, Thomas Shapiro, vient d’expliquer au média en ligne Fashionista comment il en est arrivé là :
« Elle avait quelques tenues pour des raisons pratiques, car nous vivons au Canada et qu’elle n’a pas beaucoup de graisse corporelle. À mesure que sa présence en ligne grandissant, on a commencé à travailler avec des marques qui faisaient des vêtements exprès pour petit lévrier italien. C’est à partir de là que j’ai compris que les gens adoraient son style, en fait. »
À tel point que des marques adressent désormais à Tika des tenues dérivées de look humain à la mode, adaptée exprès pour elle. Le lévrier a même un styliste. Oui, oui, rien que ça…
Boobie Billi, le chihuahua qui a sa propre marque de mode
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Autre chien, même sens du business : Boobie Billi. Suivi par près de 300.000 personnes, ce chihuahua porte aussi bien des vêtements pour chiens que pour humains. Ce qui est censé donner de l’inspiration à ses followers et même les désinhiber à l’idée de porter ce qui leur fait envie.
Si ses maîtres veulent rester anonymes, ils savent très bien ce qu’ils font puisqu’ils ont lancé au mois de septembre 2020 une marque autour de son image, baptisée Boobie World, pour… les humains !
Lola Wang, la chienne qui a le droit à sa propre téléréalité pour une marque de joaillerie
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Enfin, Lola, petit chienne de la créatrice de mode Vera Wang, est carrément devenue égérie d’une marque de bijoux ! Zales en a fait l’héroïne d’une campagne de pub originale : une parodie d’une téléréalité où elle doit trouver l’amour parmi d’autres chiens. Et ce, sur plusieurs épisodes, telle une super-production karda-chienne.
Qu’en est-il du bien-être des chiens mannequins ?
Un concept original, aussi adorable que… terrifiant. Puisqu’on peut s’interroger sur le bien-être animal de ces bêtes qui n’ont jamais demandé à faire partie de tout ce cirque marketing, qui rapporte sûrement gros vu tous les efforts investis.
Sylvia Masson, vétérinaire, spécialiste européenne en médecine du comportement des animaux de compagnie, nous apporte son expertise :
« On ne sait pas ce qui se passe en coulisses pour ces animaux-influenceurs mode. On ne peut pas émettre de jugement général valable pour tous les chiens, encore moins à partir de photos sans les avoir rencontrer. Mais sur plusieurs de ces images, certains n’ont pas l’air très à l’aise, d’après leur position recroquevillée. Peut-être est-ce la pose qu’on leur a demandée de tenir, mais ça ressemble beaucoup à un signe d’inconfort. En tout cas, les chiens ont chacun leur personnalité et la question doit se poser de façon individuelle. »
Quand on lui demande si porter autant de vêtements, pas toujours pensés pour les chiens, et même des chaussures, le temps de photos, peut leur poser des soucis, la docteure et consultante en psychiatrie vétérinaire nuance :
« On doit être attentif aux éventuels mouvements de recul de l’animal quand on s’approche de lui pour lui enfiler des choses. Le temps d’une photo, cela ne posera sûrement pas de souci, mais c’est la fréquence et la durée des séances qui peuvent s’avérer anxiogènes, à force d’accumulation.
Ce ne sont pas tant les vêtements qui peuvent les gêner que leurs odeurs. Cela peut déstabiliser certains chiens. Même chose sur un plateau de shooting où il peut y avoir une dizaine d’inconnus avec des odeurs différentes, et les flashes des appareils photos : cela peut finir par les rendre anxieux. D’autres peuvent au contraire y voir une forme de jeu, surtout s’ils sentent que cela fait plaisir à leur propriétaire.
En fait, cela pose des questionnements éthiques semblables à la mise en scène d’enfants par leurs parents sur les réseaux sociaux. C’est surtout l’objectification de ces êtres vivants inaptes à consentir qui me paraît relativement choquante. »
Selon la vétérinaire comportementaliste, on doit donc rester très attentif au bien-être de son chien si on le met régulièrement en scènes pour des photos. Vigilance face aux signaux négatifs tels des mouvements de recul ou d’inhibition, mais aussi aux éventuels marqueurs positifs : un chien qui vient au contact, frétille de la queue, a les traits de la gueule décontractés, etc. D’autant que la situation peut évoluer, par effet d’accumulation.
Cela peut également être le travail du véto que de vous aider à évaluer le degré de bien-être de votre animal, précise Sylvia Masson :
« En tant que propriétaire, de la même manière qu’on peut faire un check-up de santé pour son chien une fois par an chez le véto, on peut également demander à celui-ci un bilan sur le bien-être de l’animal. Ces professionnels de santé ne sont pas là pour vous faire des jugements de valeur, alors c’est important d’avoir cette discussion régulièrement. Au cabinet comme à la maison. »
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Les Commentaires
autant toutes ces photo m'ahurissent : ce sont des êtres vivants, pas des poupées !
Si je veux montrer mon affection à l'une de mes chattes, une caresse, une séance de jeu, ou une croquette-bonbon sont suffisantes !
et si je veux qu'elles n'aient pas froid, je rajoute une couverture polaire moelleuse dans leur panier-dodo