- Pseudo : Iemanja*
- Âge : 28 ans
- Lieu de vie : une petite ville à la campagne
- Orientation sexuelle et/ou romantique : hétérosexuelle jusqu’à preuve du contraire
Depuis combien de temps êtes-vous célibataire ?
Cela fait un an que je ne suis plus en relation. La dernière était une simple aventure qui a duré une semaine, à laquelle j’ai mis fin.
Je n’ai jamais eu de relation longue. J’ai eu quelques aventures, et les « vraies » relations que j’ai eues ont duré entre quelques semaines et quelques mois. Certaines relations étaient officielles, d’autres pas. Je l’ai longtemps vécu comme un échec. Maintenant, j’arrive à relativiser. Je ne vois plus le couple comme un Graal à atteindre et je me sens moins coupable d’être célibataire.
Ayant une sensibilité féministe, j’ai un regard sur les travers du couple traditionnel hétérosexuel. Le couple est un carcan pour beaucoup de femmes de l’âge de mes parents. J’ai aussi vu une amie subir l’emprise et la jalousie maladive de la part de son ex-partenaire, qu’elle a eu le courage de quitter. Cela m’a montré que tout n’est pas « rose » dans les relations hétérosexuelles. Qu’on peut subir de la violence ou du sexisme. Alors comme le dit l’adage, je préfère être seule que mal accompagnée.
À force, je n’aime pas la norme du couple dans ce qu’il implique, notamment la notion d’exclusivité. Je n’aime pas ce mot : « couple ». Beaucoup de couples autour de moi n’agissent pas comme des individus mais comme un duo inséparable. Ils font des activités ensemble, habitent ensemble, parfois travaillent ensemble… Même si je suis admirative de cette harmonie, cela a tendance à m’agacer. J’ai déjà fréquenté un homme qui était polyamoureux et dont les copines étaient dans la même configuration. Une fois, j’ai même parlé de « couple libre » avec un amoureux en qui j’avais confiance… et peu de temps après, il m’a quittée pour une autre. Je l’ai très mal vécu, un peu comme s’il s’était servi de mes mots à son avantage.
Comment décririez-vous votre célibat ?
J’ai un célibat normal, ni heureux, ni malheureux. Parfois je ressens de la solitude. Je n’aime pas la tendance au positivisme qui consiste à clamer son célibat sur les toits, à se vanter d’être autonome et heureuse en permanence.
Estimez-vous que le célibat a un impact sur votre moral, au quotidien ?
J’ai un caractère solitaire, j’aime passer des moments seule, mais la solitude peut parfois être pesante, surtout après une rupture.
Être célibataire vous permet-il des choses que vous ne pourriez pas faire en couple ?
J’aime ma liberté et j’ai l’habitude d’agir seule, ou avec des ami·es/potes. Je n’ai jamais eu besoin de personne pour faire ce que je voulais. Je suis quelqu’un de nomade et je change souvent de lieu de vie, pour le travail ou d’autres projets. Cette année, je suis partie en voyage à l’étranger pendant plusieurs mois, avec des amies puis en solitaire. C’était une expérience incroyable.
À l’inverse, être célibataire vous empêche-t-il de faire des choses que vous pourriez faire si vous étiez en couple ?
Ce qu’on peut faire seule, on peut le faire aussi avec quelqu’un. C’est vrai, j’aimerais rencontrer un partenaire avec qui je pourrais partager des moments de tendresse, des activités et une certaine vision de la vie.
Le lieu géographique où vous vivez a-t-il un impact sur votre rapport aux relations amoureuses ?
Je reviens souvent dans ma petite ville natale, en milieu rural, où tout le monde ou presque se connaît. Ça arrive que je tombe par hasard sur des ex et c’est assez stressant.
Cherchez-vous activement à trouver une relation amoureuse ?
Par jeu, vers mes 25 ans, je me suis déjà inscrite sur Tinder, dans un esprit humoristique (ma première photo de profil était une vache). J’ai rencontré deux personnes que j’ai fréquentées pendant quelque temps. Puis je me suis désinscrite parce que je n’aimais pas l’idée de consommation qui émane de ça. Je préfère me laisser emporter par le hasard des vraies rencontres et d’ordinaire, quand j’apprécie quelqu’un, je ne « zappe » pas facilement. En ce moment, je ne cherche personne. J’ai souvent quelqu’un dans un coin de ma tête, néanmoins.
Comment décririez-vous votre rapport aux rencontres ?
Paradoxalement, même si je suis assez indépendante dans la vie quotidienne, j’ai une forte tendance à la dépendance affective. Quand je rencontre quelqu’un, j’ai un coup de cœur et je m’emballe assez vite. Je ne peux penser à rien d’autre. Cela affecte beaucoup mon mental car je vis dans l’angoisse d’être quittée ou délaissée. J’ai vécu une séparation douloureuse il y a trois ans, et depuis, j’ai développé une « peur » des rencontres. Alors, je préfère travailler sur ma confiance en moi plutôt que de m’engager dans une relation qui me coûtera beaucoup sur le plan émotionnel.
Ressentez-vous une forme de pression à chercher « activement » un ou une partenaire amoureux·se ?
Oui, la plupart de mes amies célibataires enchaînaient les conquêtes et les rencontres, que ce soit sur le plan sentimental ou sexuel. Ce n’est pas mon cas. J’ai déjà eu des coups d’un soir, mais en ce moment, je n’en ai pas envie. J’ai l’impression que dans notre société, l’abstinence sexuelle (qu’elle soit subie ou choisie) est assez mal vue. Que l’on soit en couple, ou célibataire, il faut baiser. Si ça ne marche pas avec les hommes, il faut essayer avec les femmes. Je n’exclus pas les relations homosexuelles, mais si ça arrive, j’aimerais que ce soit par amour plutôt que par dépit des hommes.
À lire aussi : « Être lesbienne politique, c’est prouver qu’on n’a pas besoin des hommes, nulle part, qu’une vie sans eux est possible. »
J’ai été touchée par les écrits de Virginie Despentes, en particulier l’incipit de King Kong Théorie :
« J’écris de chez les moches, pour les moches, les vieilles, les camionneuses, les frigides, les mal baisées, les imbaisables, les hystériques, les tarées, toutes les exclues du grand marché à la bonne meuf. »
Virginie Despentes, King Kong Théorie
Bien sûr, même si je ne me sens pas moche, j’ai conscience que le regard masculin « valide » en quelque sorte ma personne. En tant que femme jeune, métisse, mince, je corresponds à certains « canons de beauté » et j’échappe à d’autres, j’ai parfois un look androgyne, je ne cherche pas forcément à plaire… J’aimerais pouvoir m’assumer entièrement sans que cela passe par la validation de mes congénères masculins.
Le célibat amoureux a-t-il un impact sur votre vie sexuelle ?
Je n’ai pas eu de relation sexuelle depuis maintenant un an. Parfois, j’en aurais envie, ou bien j’ai un crush sur quelqu’un qui n’a pas donné de suite alors je fais avec. De plus, à cause d’une maladie chronique, j’avais très peu de libido ces deux dernières années et je me sentais dans l’inconfort physique, ce qui n’aide pas à avoir des relations sexuelles épanouies. Je me concentre d’abord sur ma santé avant ma vie sexuelle.
Ressentez-vous une forme d’injonction à être en couple ?
Comme j’approche de la trentaine, forcément, je ressens un décalage car mes préoccupations ne sont pas celles de la plupart des gens de mon âge. Je vois des amis d’enfance se marier, acheter une maison ou avoir des enfants, mais j’observe ce conformisme d’un œil amusé. La plupart de mes amies proches ne sont pas non plus dans cet état d’esprit, alors ça va.
Estimez-vous que le célibat a un impact sur vos finances ?
Je cherche un appartement seule, donc ça coûte plus cher que de chercher à deux. De toute manière, même si j’étais avec quelqu’un, je ne me vois pas vivre sous le même toit.
Quels sont vos projets pour le futur ? Le célibat a-t-il un impact sur ces envies et ces projections ?
En ce moment, je cherche à m’installer à long terme dans une plus grande ville. Peut-être qu’en me stabilisant, j’arriverai à faire des rencontres !
Avez-vous une anecdote sur le célibat à partager ?
Ce week-end, j’étais invitée à l’anniversaire d’une amie. Il y avait beaucoup de personnes en couple, qui avaient droit à une chambre avec lit double. Moi, j’étais dans le dortoir des « célibataires », comme elle disait, et même si je n’ai pas relevé, ça me renvoie à ce statut et c’est un peu lassant.
* Le prénom a été modifié.
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Les Commentaires
Je suis la personne qui témoigne dans l'article. merci pour vos réactions.
Pour mon pseudo : il s'agit de Iemanja, avec un i.
A propos de la photo, générée par IA de ce que j'ai compris, elle est à l'opposée de ce que je suis puisque j'ai les cheveux bien frisés haha.
J'ai dit que j'étais métisse, mais sans précisions, or l'image semble représenter une femme asiatique/européenne.
Je ne suis pas opposée à l'utilisation de telles images, je trouve ça bien qu'elles soient aléatoires, et je rejoins certaines sur le fait qu'elles représentent de très belles femmes. ce serait intéressant de voir en photo des personnes plus "habituelles" sans être mannequins. mais c'est vrai que la beauté est à l'appréciation de chacun.e.