Le voyage de Lou, de Mary Hyland, aux éditions Actes Sud
Recommencer tout du début. Reprendre les choses à leur commencement et tout changer, améliorer, métamorphoser. C’est ce que se souhaite Lou, assise dans son vol Sydney-Chicago à côté d’une fervente partisane de la peine de mort. Faut dire qu’elle n’a pas eu un début terrible, Lou. Banlieue défavorisée de Sydney, parents à l’ouest, sœurs aînées shootées et inconséquentes, avides d’utiliser leur cadette comme cobaye : pas étonnant qu’elle veuille s’en éloigner à tout prix. Le QI exceptionnel de Lou, détecté par l’un de ses professeurs, lui donne la possibilité de reprendre une vie différente ailleurs. Lou s’y précipite et, grâce à un programme d’échange, s’envole pour les Etats-Unis.
Nouvelle famille, nouvelle vie, nouvelles conventions : nouvelle Lou ? Au fur et à mesure des questions que ces étrangers déstabilisants lui adressent, la jeune fille essaie de se construire une identité différente, de tracer une autre Lou à partir d’un passé inventé. Mais si on peut infléchir son avenir, il paraît difficile de se transformer soi-même juste en se délocalisant et en énonçant quatre-cinq mensonges. Lou en fait l’expérience douloureuse…
Le voyage de Lou, c’est avant tout un portrait d’adolescente. La finesse de Mary Hyland, dont c’est le premier roman, s’illustre à travers les contradictions de son héroïne : entre espoirs déçus et idéalisation forcenée, timidité maladive et prise de risque, rejet d’elle-même et rejet des autres. Lou se confronte au regard des autres, à leurs exigences, leurs préjugés, leurs attentes et leur désir. Elle se voudrait jeune fille modèle mais ne peut s’empêcher de faire des conneries, elle souhaite un joli ailleurs mais le compromet semaine après semaine.
On voudrait bien lui dire, la prévenir, on jette un coup d’œil effrayé au nombre de pages restantes en se disant que jamais l’auteur n’aura le temps de lui donner une happy end, et tout ça sonne terriblement réaliste.
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