Si vous relationnez avec des hommes cisgenres, vous avez peut-être déjà entendu parler du syndrome des « couilles bleues ». Cela désigne l’inconfort que les personnes à pénis peuvent ressentir au niveau de leurs testicules après une forte excitation sexuelle qui ne serait pas allée jusqu’à l’éjaculation. Comme c’est souvent mobilisé comme un argument pour obtenir ou pour prolonger un rapport sexuel, on peut se demander si ce phénomène existe vraiment ou s’il s’agit uniquement d’un mythe pour contraindre ses partenaires…
Il y a autant de couilles bleues que de chattes bleues…
Pour une étude publiée début mai 2023 sur la médecine sexuelle baptisée « Boules bleues » et coercition sexuelle : une enquête sur les douleurs génito-pelviennes après une excitation sexuelle sans orgasme et ses implications sur les avances sexuelles, la psychologue Samantha Levang et son équipe ont interrogé 2 621 personnes avec des pénis et des vagins pour savoir ce qu’il en était vraiment. 1 483 personnes à pénis et 1 138 personnes à vagin ont répondu à cette enquête en ligne qui s’intéresse donc à la croyance aux couilles bleues, et à ce qu’on pourrait aussi appeler « vulve bleue » ou « chatte bleue », sa fréquence, ses caractéristiques, et comment cela pouvait servir de pression afin de poursuivre une activité sexuelle de crainte de causer de la douleur aux partenaires.
Parmi les personnes à pénis sondées, 56 % déclarent avoir déjà ressenti une sorte de douleur au niveau des testicules suite à une excitation qui n’aurait pas abouti par une éjaculation. Mais seulement 7 % caractérisent cette expérience comme très douloureuse.
Autre résultat plus étonnant pour le grand public, c’est la quantité de personnes à vulves qui déclarent avoir déjà ressenti un inconfort similaire au phénomène des couilles bleues : elles sont 42 % à le vivre.
En d’autres termes, l’excitation non suivie d’orgasme qui résulte à un sentiment d’inconfort concerne les deux sexes. C’est juste que les hommes cis ont davantage tendance à s’en plaindre sur tous les toits que les femmes cis.
… Mais les hommes cis le revendiquent davantage, parfois pour contraindre leur partenaire
Et surprise (non), le rapport indique aussi que beaucoup plus de femmes cis que d’hommes cis déclarent s’être déjà senties contraintes de poursuivre un rapport sexuel par peur de causer de l’inconfort à leur partenaire :
« Beaucoup plus de personnes avec un vagin qu’avec un pénis ont déclaré avoir été contraintes à un acte sexuel en raison de la peur que leur partenair ne ressente de la douleur sans orgasme. Les résultats de l’analyse thématique ont indiqué que les participants estiment que les personnes ayant un vagin sont censées agir sexuellement pour empêcher leurs partenaires de vivre des couilles bleues, malgré l’accord selon lequel ce phénomène ne devrait pas être utilisé pour contraindre ou manipuler les partenaires à s’engager sexuellement. »
Autrement dit, le mythe des couilles bleues entretenu par les hommes cis, et qui se manifeste réellement que chez très peu d’entre eux, leur permet d’obtenir et/ou de prolonger des rapports sexuels par la contrainte de leurs partenaires. Alors que les personnes à vagin, dont les femmes cis, peuvent tout autant ressentir cet inconfort, elles cherchent beaucoup moins à s’en servir comme argument pour forcer l’obtention ou la prolongation d’un rapport sexuel. Bref, encore un mythe qui nourrit la culture du viol.
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