J’ai fait ma première fois à 27 ans, avec mon meilleur ami.
Certains et certaines diront que c’est tard, mais ce n’était pas un choix. Si l’occasion s’était présentée avant, je l’aurais bien sûr saisie… Mais ma vie a été absolument chaotique.
La harcèlement scolaire que j’ai subi à l’adolescence
J’aurais pu faire ma première fois à l’adolescence, comme beaucoup de mes copines. Certaines l’ont fait avec un mec de passage, « pour le faire », d’autres ont attendu d’avoir leur premier copain… Moi, j’attendais tout court.
J’ai eu une adolescence très malheureuse. J’ai subi un harcèlement scolaire pendant trois ans au collège, c’était très violent, on m’a giflée, insultée, cognée, on me rabâchait tous les jours que j’étais laide, immonde et que jamais personne ne voudrait de moi.
J’ai commencé à détester mon corps et plus particulièrement mon visage. Je fuyais les miroirs, persuadée d’être hideuse. Je me suis complètement repliée sur moi-même et j’ai commencé à avoir peur des autres.
Encore plus au lycée, quand j’ai découvert que le harcèlement pouvait prendre des formes diverses dont celle du couteau dans le dos.
Je voyais mes amies raconter leur première fois, et moi je n’attirais le regard de personne, j’étais enfermée dans ma souffrance, et je dois bien l’avouer, savoir qu’elles connaissaient toutes ça et pas moi me mettait dans un état de tristesse assez lourd.
Le sexe, un tabou dans ma famille
Et puis, il y a aussi quelque chose qui m’a toujours gênée : je n’ai jamais, mais vraiment jamais, parlé de sexe avec mes parents. Nous n’avons jamais eu « la » discussion.
D’ailleurs, c’était même ma grand-mère qui m’avait parlé des règles, ma mère ne m’en avait pas touché un mot. Le sexe a toujours été un grand tabou pour ma mère, et je n’ai jamais compris pourquoi.
Avec le recul, j’avoue que j’aurais aimé avoir cette fameuse discussion, juste pour que le sexe soit considéré comme part entière de la vie d’une femme.
Au lieu de ça, ma mère voyait la masturbation comme quelque chose de sale :
« Une fille ne fait pas ça. »
J’ai donc inconsciemment associé pendant longtemps la sexualité à quelque chose de sale, quelque chose qu’il ne fallait pas faire.
Ma mère a toujours eu tendance à me considérer comme une petite enfant, et je pense que c’est toujours le cas, je ne me vois pas comme une adulte dans ses yeux et j’en souffre un peu.
Ce garçon avec qui j’aurais pu faire ma première fois
Après le lycée, il y a eu les études. Six ans dans une autre ville et dans une promo où j’ai rencontré des nouvelles copines… Et un garçon.
Il s’intéressait fortement à moi, ne se cachait pas pour me draguer. J’avais pris un petit peu d’assurance, du moins assez pour répondre à sa drague et accepter qu’il passe des journées avec moi.
Et puis, le lendemain de mon anniversaire — qu’il ne m’avait pas souhaité — il a soudainement décidé de s’éloigner de moi, du jour au lendemain.
La raison ? Il avait fait sa première fois avec une autre, et comme il était assis derrière moi dans l’amphi, j’ai tout entendu, y compris à mon sujet :
« Elle ? Ah non mais je m’en fous maintenant ! »
J’ai dû passer encore quatre ans à le côtoyer tous les jours, ce n’était pas très facile à gérer au quotidien. Mais ce qui était encore moins facile, c’était les réflexions de mes nouvelles « copines ».
Les réflexions de mes amies sur ma virginité et ma sexualité
Elles avaient appris que j’étais encore vierge, et presque tous les jours j’avais droit à des réflexions déplacées, parfois vulgaires, du genre :
« – Toi, il te faut une b*te !
– Toi, je vais te trouver un mec et tu vas baiser avec, comme ça ce sera fait !
– J’ai un copain célibataire, je vais vous présenter comme ça vous allez pouvoir conclure ! »
C’était à croire que ma virginité était plus un problème pour elles que pour moi.
Ma virginité, je vivais avec au quotidien, et même si j’avais finie par être résignée et par me dire que mon tour ne viendrait jamais, j’essayais de ne pas en faire un fardeau.
Ça ne regardait que moi et je ne comprenais pas pourquoi les autres se permettaient des réflexions comme ça.
Le jour où j’ai décidé de faire ma première fois avec mon meilleur ami
À 24 ans, j’ai eu un accident de voiture. Peu après la fin de mes études, au mois d’août, une conductrice au téléphone m’est rentrée dedans à 80 km/h en pleine ville.
C’est ma voiture qui a tout pris mais moi, j’ai vu la mort. Je n’étais pas si blessée que ça physiquement, un coup du lapin, des bleus et des ecchymoses partout, trois côtes cassées, mais je n’avais pas de grosses blessures qui auraient pu mettre ma vie en danger.
Par contre, le pire a été ma rencontre avec le stress post-traumatique. Les insomnies, l’angoisse omniprésente, la peur à l’état pur, impossible de recommencer à conduire, les idées noires, la dépression…
Toute une période atroce où j’ai mis ma propre vie en pause et où la question de ma virginité ne se posait plus, j’étais en mode survie.
Les années passant, j’ai pu prendre du recul sur cette expérience atroce et recommencer une vie normale. Mais je sais depuis cet accident que mon temps est compté, qu’il faut saisir les occasions quand elles se présentent.
À la fin du confinement, j’apprends que mon meilleur ami est de nouveau célibataire. Je laisse un peu de temps passer, et puis on se voit avec notre groupe de copains. On passe la soirée ensemble, à rire et à discuter.
Treize ans d’amitié, une confiance aveugle l’un envers l’autre, j’avais bien réfléchi et pris mon courage à deux mains.
Quand on s’est retrouvés seuls, je lui ai dit que je ne souhaitais pas être en couple avec lui mais que je voulais faire ma première fois avec lui, parce que j’avais confiance. Inconsciemment j’étais rassurée si c’était lui mais j’appréhendais un peu sa réaction, un quelconque refus.
Il m’a dit qu’il n’y avait aucun problème, qu’il comprenait et qu’il respectait ma décision.
Ma première fois avec mon meilleur ami
Trois jours plus tard, on l’a fait et c’était incroyable. Sincèrement, je ne regrette pas de l’avoir fait à 27 ans, d’avoir été obligée d’attendre, ça en valait tellement la peine ! Ce qu’on a vécu tous les deux ce soir-là était tellement magique.
J’avoue avoir ressenti un grand soulagement. Je me suis dit que ça y est, c’était fait, et bien fait ! J’ai ressenti comme une énorme prise de confiance, comme si quelque chose bougeait en moi, quelque chose de très puissant et de totalement inconnu.
Comme une peur qui s’enlève.
J’ai eu aussi une sensation étrange de « retour à la réalité ». J’ai toujours eu tendance à me réfugier à l’intérieur de moi, à être perdue dans mes rêveries, dans les histoires que j’écris, et là ça a vraiment été un retour à la vraie vie, comme une prise de conscience.
Je n’avais pas d’attente concernant ce moment. Bien sûr, j’avais entendu tout un tas de choses, grâce notamment à ces « copines » qui croyaient bien faire et qui m’avaient donné des détails dont je me serais bien passée.
On m’avait dit :
« C’est pas comme dans les pornos, lol »
Je ne suis pas une grande amatrice de porno mais disons que je me doutais bien que ce n’était pas comme ça ! On m’avait dit que j’allais avoir mal, finalement j’ai eu une petite douleur qui est vite passée.
On m’avait dit que ça ne durerait que quelques minutes, je crois qu’on a explosé les records ; on m’avait dit que je ne ferais qu’un missionnaire et que ce serait suffisant, on ne s’en est pas tenu à ça du tout…
Bref, j’avais entendu tellement de choses qu’au final, je n’écoutais plus rien ni personne, et je me suis juste laissée guider par ce que j’avais envie de faire, et c’était vraiment au-delà de mes espérances.
Ma relation avec mon meilleur ami, après notre relation sexuelle
Pour l’instant, cela ne s’est pas reproduit avec mon meilleur ami, et je préfère qu’on s’en tienne là. Il respecte ma décision, mais il m’a déjà dit que si j’avais envie de recommencer, il était partant (bien sûr).
Notre relation a changé et n’a pas changé en même temps, c’est bizarre, assez difficile à définir. Elle n’a pas changé parce qu’on est toujours aussi complices, on peut passer des moments à rire, à se confier sans problème.
Et elle a changé aussi, mais je pense que c’est de mon point de vue, parce que je me suis rendu compte — et il me l’a dit — qu’il avait toujours eu des sentiments pour moi.
On lui a demandé plusieurs fois pourquoi nous n’étions pas en couple, ce qui le retenait pour être en couple avec moi alors que pour tout le monde c’était une évidence…
De mon côté, je n’ai pas envie d’être en couple avec lui, j’ai été très claire sur ce point et c’était la première condition que j’ai posée.
J’ai envie qu’il reste mon ami, seulement mon ami, et c’est parce que j’ai cette confiance aveugle en lui que j’ai voulu avoir ma première fois avec lui.
Je n’ai parlé à personne de mon entourage de ce qu’il s’est passé, ce n’est pas le genre de chose dont j’ai envie de discuter à un repas de famille ou pendant une soirée entre potes.
Ces filles qui me tannaient pour que je le fasse, ça fait des années que je ne suis plus en contact avec elles, et quand bien même, ça ne regarde personne d’autre que moi.
La sexualité est quelque chose de tellement personnel, je n’ai jamais compris pourquoi ces personnes pensaient que j’avais besoin de leur avis.
Ce que j’aurais aimé qu’on me dise quand j’étais encore vierge
Finalement, je suis allée à mon rythme et je ne regrette vraiment rien. À la réflexion, je pense que si je l’avais fait avant, avec le premier venu, ça n’aurait pas été aussi bien, je ne me serais pas laissée aller comme je l’ai fait.
J’ai voulu ajouter ce témoignage parce que j’aurais aimé trouver un article sur la virginité « tardive » qui ne soit pas culpabilisant, comme les réflexions que j’entendais au quotidien…
C’est à croire que c’est entièrement notre faute si nous sommes toujours vierges à un certain âge, parce qu’on « ne fait pas d’effort », on nous « propose des trucs et on refuse »… Ou alors, comme je l’ai entendu de la part d’un membre de ma famille :
« Tu as déjà été avec un garçon ? Non ?! Pourquoi, tu préfères les filles ? Non plus ? Ah ben je sais pas, on ne t’a jamais vue avec un garçon alors je me disais, peut-être… »
Si j’ai un conseil à donner, un conseil qui m’a manqué pendant toutes ces années où j’étais perdue : personne n’a à juger qui que ce soit sur sa virginité.
Dans mon cas, c’était juste la partie immergée de l’iceberg, l’arbre qui cachait la forêt de souffrances que j’ai dû traverser pour arriver à vivre cette expérience.
Je reste convaincue que j’ai attendu le bon moment avec la bonne personne et je n’ai aucun regret.
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