Un jour, quelqu’un sur Internet a fait une bande dessinée pour décrire la dépression. Son personnage avait une expression éloquente : « comme si le monde entier était un t-shirt sale ». Churchill, lui, parlait d’un chien noir, Sylvia Plath d’une cloche sous vide où elle respirait toujours le même air pourri.
Eh bien vraiment, cet épisode de Koh-Lanta était aussi une forme de t-shirt sale, un aspirateur agressif à énergie : il s’y passe des choses automatiques et sans saveur. Mais gardons le moral, on va les décoder ensemble en attendant la semaine prochaine — qui s’annonce, par design, plus mouvementée !
La première épreuve, cette semaine, était de survivre au C’est Canteloup de l’entre-deux tours. Hardi petit, plongeons ensemble dans le dernier épisode de cette première moitié de saison, où plus grand-monde dans le casting n’est inspirant.
Koh-Lanta sans Stéphanie, c’est ça qui est MODZI
Avant toute chose, alerte nerd : le résumé a convoqué, quelques instants, l’un des thèmes musicaux historiques de l’émission. Des temps plus heureux, un peu plus fauchés, où le casting était moins sportif (mais un peu plus trashy), où le jeune Denis regardait vers l’horizon, cheveux au vent, et où nous étions tous plus frais et insouciants…
Mais bref. Bienvenue dans le Koh-Lanta Modzi sans Stéphanie. Au moins, je vais pouvoir passer à autre chose, au cas où ça commence à sonner creep.
Pas d’intro, on réfléchit pas, on parle deux secondes de manque de nourriture et ça part en jeu de confort, où les 16 aventuriers restants vont se battre dans un décor toujours aussi sublime pour une nuit à ripailler et à bien dormir. Bastien est super motivé : « J’ai envie de gagner et surtout pas envie de perdre », affirme-t-il. OK.
Le Totem Modzi est remis en jeu, dans Sa Grande Aléatoirité — les gagnants auront le droit de s’entraîner pour l’épreuve d’immunité. Donc c’est un Totem Modzi qui octroie une bénédiction à l’autre équipe, ça n’a aucun sens et c’est visiblement difficile de forger un narratif quand on est une émission à millions.
Concours de plats dans Koh-Lanta
Top pour plonger : c’est la fameuse épreuve où les candidats doivent claquer un petit sprint, monter sur une plate-forme, et faire un joli saut technique pour éclater des pots de plus en plus éloignés du bord (le dernier est environ à quinze mètres).
Hélas, même si l’épreuve, par design, offre des ralentis comiques où les candidats ratent leur cible de peu (Setha arrive même à louper une marche sans même l’existence d’un escalier, c’est fort), raconter des cycles de nage et de sauts n’est pas très intéressant — mon attention est davantage portée sur le concours du meilleur plat dans l’eau.
Olga est médaille d’or, JF est un bon concurrent. Mais c’est très long cette affaire : les deux genres du jour sont Denis qui dit « c’est cassé » et Denis qui dit « c’est manqué ».
On peut difficilement en vouloir aux candidats — la structure est mal fichue et la poutre qui suspend les cibles se balance au gré de la houle, rendant la tâche encore plus ardue. Ça traine tellement que l’émission se permet même des faux suspenses amusants, mais pour de vrai ça tient sur une demi-heure ce délire !
La vraie malédiction, c’était sans doute l’obligation d’utiliser tous les rushes sans montage. Ou alors, l’épisode est affreusement vide derrière… (Oui, un peu.)
Bref, Yannick plie enfin la chose pour les jaunes (qui se dandinent en rythme, c’est une vision d’horreur). Ces derniers auront donc remporté l’intégralité de leurs épreuves de confort. C’ÉTAIT TRÈS LONG !
Denis n’en peut plus et impose un nouveau rituel humiliant aux perdants : c’est le moins bon joueur qui doit venir chercher le Modzi Totem — en l’occurrence un duo, Maxime et son ego. Bientôt les nouilles dans le slip, Denis, attention.
La pause publicité me permet de vider une bouteille d’Umeshu, soit juste assez d’alcool pour ignorer physiquement la danse des jaunes qui rentrent pour faire bombance. Les perdants font la gueule et se moquent de Maxime qui est contrit, mais heureusement, il trouve du manioc.
Eh oui, ces deux phrases sont d’un ennui mortel. Voilà ce qui arrive quand on refuse le contenu stratégique dans son émission.
Le Macumba Club de Palawan
Les jaunes poursuivent leur séjour Pierre & Vacances à bord d’une mini-croisière, où les estomacs se gonflent de smoothies grumeleux et où les hommes s’étreignent virilement (ils doivent puer un peu). Ils sont emmenés vers un buffet Picard qu’ils applaudissent (???), sans doute pour s’abaisser face à la nourriture — rationalité orientale, yep.
Un bon indice pour mesurer à quel point ils sont heureux ? Yannick est content. Il glisse, transcendé par un cinquième de sourire, qu’il passe « un bon moment ».
Attention les aventuriers, la nourriture qui rentre très vite dans un estomac vide a tendance à ressortir tout aussi vite ! Et comment on fait pour aider tout ça ? ON DANSE ! Et ça finit en Macumba Club tout mou à huit. Colin nous inonde alors de son affection gastrique sur la caméra.
J’ai l’impression de décrire un Kechiche qui tourne mal. Heureusement, tout ce petit monde s’endort enfin sur des matelas douillets — mais en plein air sous la pluie, comme ça tu te réveilles la peau fusionnée par l’humidité avec ton pieu, super. Bonne bronchite à toutes et à tous.
Ronpiche et coup de foudre
Au lever, les mêmes jaunes profitent donc de la-malédiction-de-l’autre-équipe-n’importe-quoi-Denis pour s’entraîner à l’épreuve suivante : celle du lancer de poids avec un gros lance-pierre — vous savez, le truc qu’on voit faire Ambre dans la générique (ce qui l’immunisait passivement jusqu’à ce point, d’ailleurs).
Chez les rouges : Maxime est relou, Maxime met les pieds sous la table, bref fallait l’éliminer le round d’avant.
Et soudain, l’orage, la stupeur et la prévention — les caméramen demandent aux jaunes d’appliquer les gestes de prévention pour ne pas avoir une équipe entière foudroyée dans sa cabane. Ça donne un tableau tout droit tiré d’un film du Dogme 95.
Ce sont des jaunes claquées, mouillés et spoilés qui se réveillent pour récupérer l’invitation au jeu d’immunité. Il ne suffira pas de déloger des cibles à coup de catapulte, il faudra aussi chercher les cibles dans l’eau au préalable !
Denis, auguste, rappelle les enjeux — surtout à nous, têtes de linottes : le pire, c’est d’aller au conseil. Et surtout, il faut gagner, et ne surtout pas perdre (je suis réellement en train de faire une sieste devant le dernier tiers de l’épisode mais ces phrases atteignent jusqu’à ma phase paradoxale.)
Setha, Just Dance, le faux collier, tout ça tout ça
En revanche, j’ai loupé à force de roupiller le portrait de Setha, qui joue à Just Dance avec sa « tribu ». OK, ils mettent une petite musique électronique cliché pour illustrer ce propos, mais ça reste moins badant que Géraldine qui doit couper le Web pour que ses ados arrêtent de lire Boruto dans le noir.
(Vous vous souvenez de Géraldine ? Et de Pauline, et d’Anne-Sophie ? Moi non plus, c’est un problème.)
Écoutez, l’entraînement ne suffit pas : les éléments ne sont pas les mêmes, il pleut, l’herbe colle aux crampons, on ne joue pas à domicile, etc. Les jaunes se prennent une raclée et sont envoyés ad patres.
Les voilà donc contraints et forcés de se tourner vers le bas de la hiérarchie tribale — en l’occurrence Setha, qui s’est toujours mystérieusement faufilée.
Son faux collier, maintenant une construction sociale dont l’importance se situe quelque part entre « le genre » et « l’âge », est encore une menace pour tout le monde. Du moins, c’est ce que nous montre le montage ; dans les faits, les jaunes ont eu mille occasion de désamorcer ce quiproquo, et autant de preuves que rien n’est solide dans cette histoire !
Même à la toute fin du conseil, elle se sent, gênée et en plein noeud social, de soutenir le bluff… Bon potentiel pour devenir le meilleur arc narratif comique de la saison : peut-être que si on insiste autant avec c’est qu’il y a un paiement à la fin.
Mais que voulez-vous, Alexandra convoque une réunion audit managérial au conseil, mais ça tourne en entretien préliminaire de licenciement. On ne sait pas trop pourquoi, parce que l’épisode ne nous explique pas du tout les motivations de chacun, ça part en 4-4-2 pour Alexandra et Setha, avec un revote qui ne change rien puisque les seules voix qui se baladaient sont les votes automatiques de Yannick.
Revote et vote bloqué, c’est Alexandra qui perd au tirage et qui subit une rupture non-conventionnelle. Elle pourra se consoler avec le CSP (mais attention, sachez-le, Pôle Emploi est bien plus chiant avec cette option).
Pourquoi ces votes, Alexandra ? À hauteur de cet épisode, c’est un mystère. Une « malédiction » a-t-elle réellement eu un effet après le premier épisode ? Yannick et Pauline diront que non. Dans quel état j’erre ?
C’était un récap affreusement factuel mais il n’y avait pas la moindre trace de sous-texte dans ces trois heures de télévision. Le genre d’épisode qui pompe toute énergie vitale : il n’y a rien de réellement excitant. Même Denis est en pilote automatique, à poser des questions un peu #hallu à la « ça vous fait quoi d’être la seul femme qui… ». J’ai subi une insomnie monstre derrière cet épisode, j’aurais dû le reregarder !
On espère du meilleur pour la seconde phase du jeu. Mais c’est un enfer cet ordre de sortie : on a littéralement perdu tous les personnages du casting…
Ça vous a peut-être échappé, mais pas à moi
- ALP, salle de montage. Des gens triment pour éliminer des dizaines d’heures de rush. Quelque part, quelqu’un se demande : « Bon, cette image de Colin qui claque un énorme rot un peu trop humide pour que ce soit rigolo, je le diffuse devant des millions de spectateurs ? OK, letzguongues j’adore ils auront déjà mangé. »
- PAULINE A CITÉ SURVIVOR ! VOUS AVEZ ENTENDU OU PAS ? MAIS SUR MA VIE ! ALEXA LANCE DESPACITO !
- Bon, le Jeanche il sourit peut-être beaucoup mais ça ne performe pas beaucoup aux épreuves lààààààà.
- Deux « alertes manioc
de la production» dans cet épisode. Ça fait du testing A/B dans le manioc. - Géraldine fait sa seconde apparition de la saison avec un « plus c’est long, plus c’est bon » parfaitement non-sequitur.
- La production qui rajoute des effets sonores « boules qui s’entrechoquent » dans un panier où il n’y en a qu’une seule dans le sac, c’est bien sympathique, mais on vous voit !
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
Les Commentaires