Ils furent cinq. Ils ont cherché des repères. Ils ont cherché des balises. Ils ont hurlé, crié, trouvé un poignard et l’ont planté avec vigueur. JC a triomphé. Ambre a perdu. Bastien est maudit. Comme ça, je serai passé pour un con une dernière fois avec mes pronostics : François est maintenant le meilleur placé (on est super à l’aise, ALP aussi sans doute), Géraldine est sur les poteaux et JC est le striker caché après avoir loosé comme jamais.
Hélas, il me sera difficile d’aller plus loin, car pour une fois, cet article est écrit en avance et il me sera difficile de développer des capacités transdimensionnelles, même si votre lecture m’est précieuse. Je ne vais quand même pas vous laisser comme deux ronds de flan ! Je vais me prêter à l’exercice auquel se livre Dalton Ross, l’auteur américain dont cette chronique s’inspire. Il fait des récaps de Survivor depuis des éons, et à chaque avant-dernier épisodes, il classe les saisons et met cette gradation à jour deux fois par an. C’est l’heure de juger et d’estimer le totem môdzi.
Dans l’ensemble, ce n’était pas dingue
Il m’est difficile d’être très enthousiaste face à cette mouture maudite. Cette saison a à la fois joué de malchance, et n’a pas su faire quelque chose de son gimmick principal.
Le thème nodal, le Totem Maudit, aura été un pétard mouillé. La longévité du show est telle que les saisons doivent se reposer sur une mécanique ou un twist de casting (attendez-vous à ça pour l’année prochaine). L’idée d’avoir un second totem qui met le zbeul est un bon narratif, mais il fonctionne un peu plus avec trois équipes – lors des conforts, il y a ainsi une réelle menace pour les derniers. Mais le choix a été fait de rassembler deux équipes bien trop vite. Au-delà des bêtes problématiques de coûts de production, c’est regrettable.
Pourquoi ? Car trois tribus, d’autant plus si vous arrivez à les distinguer facilement (car ils représentent tous un narratif différent, et/ou ont un code couleur vestimentaire, par exemple) peuvent donner des scénarios très engageants.
Trois tribus, mais plus de trois épisodes
Par exemple, une équipe de six perd tout le temps et se voit réduite à deux, mais les survivants ont le cuir tellement dur qu’ils vont très loin par la suite (Survivor : Philippines). Les formats à trois sont toujours efficaces, les tribus sont réduites, il est impossible de se planquer et les narratifs potentiels sont nombreux. Mince, la simple perspective de ne pas avoir du « jaune contre rouge » me réjouissait, et vous avez bien vu que les logiques tribales vert/mauve/bleu dominaient sur la portion finale de la saison.
Mais au-delà de ça, le Totem Maudit aura été un cache-sexe pour des twists répétitifs, pas toujours justes, et n’ayant jamais eu d’incidence sur quoi que ce soit. Avec la révélation du contenu après l’épreuve, difficile de ne pas imaginer que la production ajuste ses scénarios selon le vainqueur. Ç’aura toujours été une rengaine de vote en plus ou un twist déjà inclus dans les saisons précédentes, mais brandé différemment.
Je serais curieux de savoir comment les candidats se sont ajustés avec cette variable, ou à quel point ils ont deviné, à quel stade, ce qui allait leur tomber sur la truffe, n’hésitez pas à lire leurs interviews chez les collègues. Hélas, celui qui aura donné son nom à la saison n’aura aucunement fait avancer la choucroute. Rassurez-vous néanmoins, de pires idées sont testées à l’étranger !
À la fois trop sportif et anti-jeu
Un bon casting peut néanmoins tout sauver. Une meilleure saison de ce jeu de survie est avant tout portée par la qualité de ses profils, leurs interactions, leurs doutes, c’est la guerre psychologique !
Mais ici rien de tout ça, il faut recruter des gens avec la gagne, des ouineures, des sportifs. Tous ceux qui ont un profil qui dévie un tant soit peu n’atteignent pas le jury, et c’est vraiment pas de bol, car c’était les gens les plus intéressants. Souvenez-vous, ma litanie sur Stéphanie en premier tiers de saison ? Elle n’a jamais eu les bonnes cartes en mains, s’est battue comme une diablesse et est sortie deux fois de suite avec le smile s’il vous plaît.
L’ordre de sortie est un cauchemar – littéralement, toutes les personnalités rigolotes, au profil un peu déviant, stratégiques (on attend encore un peu ça pour Benjamin, qui rejoint la longue lignée des gens qui affirment adopter cet archétype mais se plantent) ont été remerciées dans la première moitié.
Reste un top 10 vraiment pas valorisé par le montage final, qui s’installe dans des logiques de majorité (c’est une stratégie) tout en disant refuser les stratégies (c’est opportuniste). Nous rompichâmes. Aussi, après avoir essuyé un revers massif avec le Téhé-Claude-gate la dernière fois, ALP se retrouve avec une saison dont l’intégralité des épisodes fait apparaître quelqu’un actuellement aux prises avec la justice (et présumé innocent, sa décision n’a pas été rendue).
D’ailleurs, 24 têtes de pipe, c’est beaucoup trop. La version australienne s’est installée dans ce format, mais imaginez le délire, il y a plus de 20 épisodes, et ils sont presque aussi longs. Pour tout faire tenir, ça veut dire X faux conseils et mécanismes pour ne pas toujours virer quelqu’un.
Pour nous, ça se traduit sur deux épisodes en plus – parfois étrangement découpés et rythmés – et des gens qui vont loin, mais dont on ne sait rien (Géraldine, Louana, Fouzi, tous réduits à des punchlines trouvées dans leurs portraits caricaturaux). Et c’est plus objectif, mais on pourrait probablement tout faire sans les épreuves éliminatoires, voir les retours sur évacuation médicale. Je reste un apôtre du « toute sortie est définitive ».
Pouce bleu sur les décors et la technique
Les épreuves remontent l’ensemble. Quelques idées nouvelles, dérivées de principes tous pompés aux américains il y a cinq – six ans, quand ils développaient des petits jeux statiques. On aimerait moins d’épreuves mythiques de Koh-Lanta, et des choses plus variées qui, je pense, ne demandent pas beaucoup de moyens.
Des jeux de mémoire (les spectateurs peuvent participer !) un quiz sur la culture locale, des choses qui peuvent aider à donner de l’identité à une saison, à un moment où Koh-Lanta persiste à ne pas vraiment donner de direction artistique à ses saisons.
Le décor, en revanche, a été sublime. Je n’ai pas grand-souvenir de la saison Caramoan de 2008 – sinon qu’il y avait beaucoup d’épreuves dans la gadoue – mais voir ces falaises d’un noir d’ébène en qualité 4K aura toujours été fort réjouissant, surtout lors des tournages en pleine pluie. La pluie qui, petite astuce, est super propice aux jeux en équipes dérivés de vrais sports, un pan que nous n’avons pas encore frôlé.
Bref. Pas jojo. Des épisodes trop longs, au rythme cassé, et dont le contenu n’aura été engageant qu’au tout début (un casting sans Claude et Laurent, on respire) et un petit peu mieux à la fin. Si Jeanche ou Géraldine finissent par casser la timbale, il y aura un petit côté improbable et réjouissant.
Alors, comment classe-t-on les saisons de Koh-Lanta couvertes par Madmoizelle ? Comme le disait ma prof d’allemand de prépa, « la médiocrité n’est pas un concours ».
Du moins pire au moins bon, pour le moment
1) Le Totem Maudit – Le casting aura été intéressant quelques épisodes, et puis soudainement l’ordre de sortie est un cauchemar. Le gimmick principal n’a en rien influencé la choucroute, la seconde moitié nous a fait rompicher comme jamais, les candidats sur la fin sont fatigants d’attitude pontifiante. Bof.
2) La Légende – Tout simplement la pire saison filmée de Koh-Lanta, teintée de scandales absurdes et à tiroirs, où tout le monde déifie des gens désagréables. Les révélations sur les différents scandales de triches ont été tellement zinzins qu’elles ont apporté de l’humour méta.
C’est salé à point ! Et on se donne rendez-vous la semaine prochaine pour la finale.
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
Les Commentaires