Derrière les séries que l’on adore, il y a parfois des comédien·nes et des technicien·nes ayant souffert pendant de longues années. Malheureusement, les conditions de travail toxiques et misogynes sur le plateau de Buffy contre les Vampires sont loin d’être une exception…l’équipe de Lost en a également fait les frais.
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« Je veux le pendre à l’arbre le plus haut. »
Treize ans après la fin d’une série considérée par beaucoup comme l’une des meilleures de tous les temps, l’autrice et journaliste Maureen Ryan s’apprête à mettre la lumière sur les coulisses d’une série rongée par le racisme, la violence et la misogynie. Dans un livre intitulé Burn It Down, Maureen Ryan a rassemblé les témoignages édifiants de comédiens et de scénaristes ayant travaillé sur la série diffusée entre 2004 et 2010.
Comme avec Joss Whedon et Buffy contre les Vampires, les showrunners de la série, Damon Lindelof et Carlton Cuse sont au coeur de ces accusations.
De nombreux témoignages présents dans l’ouvrage et relayés par Vanity Fair évoquent l’écriture d’un scénario guidée par le racisme, la misogynie et un plateau où la maltraitance et la violence était la norme.
L’une des témoignantes, la scénariste Owusu-Breen se souvient avoir écrit un épisode mettant en scène la mort de M. Eko, un personnage noir, au cours duquel le showrunner Carlton Cuse aurait déclaré :
« Je veux le pendre à l’arbre le plus haut. Dieu, si seulement nous pouvions lui couper la b*te et lui enfoncer la gorge ».
La scénariste a également décrir une impossibilité à travailler dans de telles conditions :
« Tout ce que je voulais, c’était écrire des épisodes cool pour un show cool, mais c’était impossible au sein de cette équipe. (…) En partie parce qu’ils n’aimaient pas leurs personnages de couleur. Lorsque vous rentrez chez vous et pleurez pendant une heure avant de pouvoir voir vos enfants pour évacuer tout le stress que vous avez retenu, vous n’allez rien écrire de bon après ça. »
Les personnages racisés au second plan et évincés dans des morts atroces
D’après ces témoignages, les scénaristes avaient pour directive de reléguer les acteurs racisés au second plan, tandis que les personnages blancs (Kate, Jack et Sawyer) étaient considérés comme les seuls héros de la série. Selon l’un des scénaristes, les consignes étaient les suivantes : « personne ne s’intéresse aux autres personnages. Donnez-leur quelques scènes sur une autre plage. »
L’acteur Noir Harold Perrineau aurait dénoncé ces représentations excluantes et racistes aux producteurs, qui lui auraient répondu que les spectateurs s’identifieraient à Jack, Kate et Sawyer – entendez, les personnages blancs. Peu de temps après, on a annoncé à Perrineau que son personnage était tout bonnement supprimé. Le showrunner Damon Lindelof se serait alors alors amusé lors d’une réunion d’écriture :
« Il m’a traité de raciste, je l’ai viré à coups de pied aux fesses ».
Selon le dire des équipes, sur le plateau aussi, le racisme était banalisé et même, encouragé. Le seul scénariste américano-asiatique de l’équipe était notamment appelé le « Coréen » au lieu d’être appelé par son nom. Un second, ayant adopté un enfant asiatique, se serait vu répondre par un autre auteur qu’« aucun grand-parent ne veut d’un petit-enfant aux yeux bridés », selon Monica Owusu-Breen.
Des commentaires « insensibles, inappropriés et offensants » : le mea culpa (tardif) des showrunners
Dans l’ouvrage de Maureen Ryan, Damon Lindelof et Carlton Cuse ont reconnu les faits qui leur sont reprochéss. Ce dernier a déclaré à propos de ces commentaires ahurissants de violence raciste :
« Je regrette profondément que quiconque chez Lost ait eu à les entendre. Ils sont très insensibles, inappropriés et offensants ».
Damon Lindelof a quant à lui reconnu les biais racistes ayant orienté le scénario de la série :
« Évidemment il y avait une concentration disproportionnée sur Jack et Kate et Locke et Sawyer – les personnages blancs. Harold avait complètement et totalement raison de le souligner. C’est l’une des choses pour lesquelles j’ai eu des profonds regrets au cours des deux décennies qui ont suivi. »
Le showrunner a mis en cause son « niveau d’inexpérience fondamentale en tant que manager et patron » :
« Mon rôle en tant que personne censée créeer un climat de danger créatif et de prise de risque tout en apportant sécurité et confort à l’intérieur du processus créatif… J’ai échoué dans cette entreprise. »
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