« On n’arrête pas le progrès ». Cette petite phrase, on l’a toutes prononcée un jour ou l’autre, sans vraiment penser à ce qu’elle veut vraiment dire, et surtout sans jamais la contester.
Forcément irrésistible et positif, le progrès ? Avec François Jarrige, historien des techniques et de l’industrialisation, la journaliste Laura Raim, aux commandes de l’émission Les Idées Larges, revient sur cette idée du progrès comme quelque chose de logique et d’inéluctable. Quelque chose auquel on ne peut pas s’opposer et qui ne nous apporte que du bien.
Retour sur l’histoire de la notion de progrès, et sa contestation
C’est avec l’émergence de deux grandes techniques au 19e siècle que l’expression prend son sens : l’automobile et l’électricité. François Jarrige explique que l’idée même de bloquer ses systèmes techniques apparaît alors comme absurde.
Néanmoins l’industrialisation, l’arrivée des machines vont provoquer du débat : d’un côté la crainte d’effets négatifs, une crainte portée par des ouvriers, et de l’autre un discours qui va justifier ce changement et en faire une condition du progrès .
L’exemple de la 5G
À travers l’interview, la question de la 5G est régulièrement abordée. Pour François Jarrige, si les critiques ont tendance à se focaliser sur la question sanitaire à travers les ondes, le débat est ailleurs.
La question que l’on devrait réellement se poser sur la 5G, ou toute innovation présentée comme un progrès est plutôt celle du « type de société que cela va produire », « quelle forme d’irréversibilité cela va produire ». La 5G, en tant que « technique qui va introduire d’autres techniques » pose selon lui ce débat :
« Est-ce qu’on veut une société remplie d’objets intelligents, et est-ce que c’est compatible avec les enjeux climatiques sachant que tous ces objets intelligents sont énergivores, une source de dépense matérielle considérable, une demande des matériaux, des minéraux très abondants ? C’est ça, la question. »
Le progrès, la solution à tous nos problèmes ?
S’il reconnaît que les technologies actuelles ont des avantages, François Jarrige veut montrer qu’on ne peut pas faire la part entre les problèmes qu’ils soulèvent et les avantages qu’ils apportent. La question est finalement comment « faire la part des choses entre les deux » et dissocier le progrès social du progrès technique.
L’historien analyse aussi l’idée que l’innovation serait la solution à tous les problèmes sociaux, soit le technosolutionnisme. Pour lui, lorsque les hommes politiques s’emparent de ce courant de pensée, ils laissent croire à des solutions automatiques et miraculeuses. Et si, au lieu de se tourner vers la technique pour essayer de répondre à l’urgence climatique, on repensait d’abord complètement notre société et notre manière de consommer ?
Retrouvez Les Idées Larges sur ARTE.tv
À lire aussi : Notre corps, outil de libération ou vecteur d’aliénation ? La philosophe Camille Froidevaux-Metterie analyse notre ambivalence
Crédit photo : Tara Winstead via Pexels
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
Les Commentaires
Il n'y a pas encore de commentaire sur cet article.