Ça commence par deux portraits croisés, un peu façon Amélie Poulain, moins la naïveté. Bahia Benmahmoud, les yeux bleus, née du mariage d’une française trop heureuse d’avoir troqué son nom franchouillard pour celui d’un immigré algérien. Arthur Martin, dont la mère, fille de Juifs, a pris le nom de son époux français, histoire de tirer un trait sur l’Histoire qui a dicté la sienne et qu’elle ne peut assumer. Bahia est française d’origine algérienne, mais pas musulmane. Arthur est athée d’origine juive, petit fils de déportés. Bahia se dit de culture musulmane, Arthur se dit français, français. Mais dans la France des années 2000, ils sont tous deux en quête d’identité, l’un aussi pommé que l’autre.
Vous avez déjà compris. A travers ces deux personnages et leur famille, Le Nom des Gens
pose avec beaucoup de justesse la question hypersensible de l’identité, celle-là même qui a déchaîné les passions et manqué de déchirer le pays il n’y a pas si longtemps. Véritable thérapie de groupe, ce film lève le verrou des traumatismes collectifs refoulés et dynamite les tabous à grands renforts d’éclats de rire. Effet cathartique garanti, surtout qu’au passage, on purge l’une des plus récentes psychoses identitaires françaises, le 21 avril, réhabilitant non sans humour sa victime collatérale, Lionel Jospin.
Au fil des scènes, on hésite entre rires et larmes comme eux sont tiraillés entre honte et fierté. C’est quand ils ont honte d’être fiers et fiers d’avoir honte que l’on dénonce le « malaise social », que les politiques s’en mêlent, pour le meilleur et pour le pire. Mais sans recul, sans écoute et sans tolérance, c’est pour le pire. En créant un parallèle troublant entre traumatismes personnels et collectifs, on comprend mieux pourquoi toute une génération, plusieurs générations portent ensuite des séquelles. On adresse sans pudeur le pire de l’Histoire Contemporaine, triturant sans ménagement des plaies laissées béantes et dévorées par l’infection, terreau d’Extrêmes nauséabonds. Entre « devoir de mémoire », entre colonialisme et déportation, j’ai envie de dire « C’est pas ma guerre ». Et pourtant, j’ai le dossard « caucasien », comme d’autres ont « Juif » ou « Arabe » tatoué sur leur front. Heureusement, nous serons bientôt trop nombreux à porter plusieurs étiquettes pour qu’on puisse nous renvoyer vers l’un ou l’autre camp. Il ne serait jamais trop temps d’arrêter cet engrenage. Car tant qu’il y aura des équipes, on comptera les points.Concentré de vérités graves envoyées avec légèreté, « Le Nom des Gens » ne fait pas que provoquer, il répond aux questions qu’il soulève. Difficile de se construire sans racines ou sans savoir où elles sont, difficile de construire son histoire quand elle prend une majuscule, mais la morale est pourtant simple. Le passé n’est lourd que lorsque l’on s’obstine à le porter en permanence, l’héritage ne pèse que lorsque l’on omet de le transmettre.
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Je ne m’étais jamais posé la question parce que je suis française. J’ai appris l’Histoire de France de victoires en défaites, de Vercingétorix au Général de Gaulle. Flash News : l’Histoire de France s’est enrichie considérablement depuis la Deuxième Guerre Mondiale. Il serait grand temps qu’elle fasse son entrée dans les manuels, l’Histoire de notre pays, la France Arc-en-Ciel.
« Le Nom des Gens ». Allez le voir.
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
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