Cet article est le septième et dernier épisode du journal de bord d’Anouk Perry sur un voilier queer et féministe. Vous pouvez lire les épisodes précédents ici :
- Episode 1 : Comment j’ai tout plaqué pour partir voyager à bord d’un voilier queer et féministe
- Episode 2 : « Si on coule, tu restes tant que tu peux sur le bateau » : ma première semaine à bord d’un voilier
- Episode 3 : « Et soudain, la voile se déchire » : ma deuxième semaine à bord d’un voilier
- Episode 4 : « On arrive au port suivant et il n’y a toujours pas de toilettes, je craque » : ma troisième semaine à bord d’un voilier
- Episode 5 : « L’ancre s’est détachée, on dérive vers les rochers » : ma quatrième semaine à bord d’un voilier
- Episode 6 : Quand le « Pussy Gate » fait chavirer notre bonne entente : ma cinquième semaine à bord d’un voilier
Après près de 6 semaines à bord, je vois la fin de mon séjour arriver avec sérénité. J’ai passé de très beaux moments, mais le dernier « conflit » (renommé en blaguant le pussy gate) m’a fait me sentir, encore une fois, pas tout à fait à ma place. Les réactions de notre skipper, Hannah, me dépassent parfois, et je remercie alors Léonie, toujours douce et bienveillante de forcer la discussion le soir même pour apaiser ce froid. De toute manière, on n’a pas le choix, il faut continuer à fonctionner en équipe !
Le lendemain, tout semble oublié. Nous sommes fin prêtes pour la suite, et quelle suite…
La malédiction de l’ancre continue…
Nous décidons un soir de jeter l’ancre dans une petite crique galicienne. L’endroit est comme à chaque fois dans cette région magnifique et très peu fréquenté.
Mais moins de 20 minutes après notre arrivée, nous voyons de gros nuages noirs s’approcher. Le vent forcit jusqu’à rugir sur nous. Au début, on prend ça avec légèreté, on se prend même en photo trouvant la lumière créée par cette météo magnifique. Ce n’est que quand l’alarme sonne, signalant que notre ancre a lâché, que l’on se rend compte que nous sommes dans la mouise : nous allumons le moteur mais il n’est pas assez puissant pour remonter le vent qui nous pousse lentement vers des rochers.
Hannah décide de faire un Pan-Pan, c’est-à-dire un appel à l’aide sur la radio, on lui répond que les garde-côtes espagnols ne peuvent pas intervenir avant 45 minutes…
Cela dure comme cela de longues minutes, le moteur permettant de freiner la force du vent sur Triton, jusqu’à ce que la météo nous sauve : moins de 10 minutes après notre appel à l’aide, le vent stoppe soudainement et nous filons nous réfugier dans le port le plus proche. On a du mal à réaliser ce qui vient de se passer. Tout semble si intense parfois sur Triton.
La Corogne, ma dernière destination
Le lendemain, on se dirige vers La Corogne, le plus grand port de la région. Tout se passe bien, on voit même des dauphins. La tempête d’hier semble loin.
Mais à la dernière minute, dans le chenal menant au port, alors que nous venons de ranger nos voiles, notre moteur décide de caler et de ne plus s’allumer DU TOUT. Le vent s’est également arrêté, donc pas moyen de hisser de nouveau les voiles pour se rendre au port… Et évidemment, car ça ne serait pas drôle sinon, nous ne pouvons pas rester là car nous voyons déjà un énorme bateau cargo arriver au loin.
Faute de solution, je pars dans un fou rire nerveux, je suis incapable de m’arrêter, c’en est trop. Tous les jours depuis un mois et demi, j’ai l’impression d’avoir dû vivre des choses inimaginables sur ce bateau. Je crois que là, c’est la fois de trop. Léonie, toujours positive, fait signe à un bateau qui passe par là et le capitaine accepte de nous tracter jusqu’au port (non sans nous photographier, hilare lui aussi de la situation).
Six semaines à bord de Triton, mon bilan
C’est à la Corogne que je passe mes derniers jours sur Triton, là aussi que je fais le bilan de ces 6 semaines d’aventure. Il s’est passé tellement de choses que j’ai du mal à réaliser. J’ai beau râler (Hannah aime dire que c’est mon côté français), je me suis attachée à ce bateau, à Hannah avec qui je vis depuis un mois et demi, ainsi que Léonie et Lilas avec qui j’ai passé mes plus beaux moments à bord.
Pour cette série d’article, j’ai surtout parlé des moments forts, mais le quotidien était surtout fait de belles discussions et de fou rires partagés.
Je ressors de cette expérience avec énormément de nouvelles compétences que ce soit en navigation ou en bricolage. J’en ai aussi tiré des leçons : je ne veux plus voyager pendant aussi longtemps sur un bateau aussi vieux, avec un moteur aussi capricieux et si peu d’intimité.
Ceci dit, je trouve toujours le projet super et je le conseillerais à des personnes qui veulent naviguer mais n’ont pas 600 € à mettre pour une semaine de stage de voile. Ici, le mois et demi à bord m’a coûté, tout compris (transport, logement, nourriture, etc), 900 €.
La suite… Sur un autre voilier !
Il faut rétablir la vérité : j’écris ces lignes alors que j’ai quitté Triton il y a presque un mois. Et oui, j’ai pris pas mal de retard dans ces articles car la vie à bord n’est pas de tout repos… Et que je suis retournée après Triton à bord d’un nouveau bateau 100 % féminin, Styx !
Cette fois-ci, tout est différent : le bateau est plus grand (j’y ai même ma propre cabine), mieux équipé, plus récent. Nous communiquons super bien et après 3 semaines à bord, je n’ai pas décelé la moindre tension… Je réalise maintenant à quel point les conditions étaient difficiles sur Triton, et combien cela compliquait notre quotidien.
En ce moment, nous apprenons à nous connaître et bien maîtriser le voilier en naviguant 3 semaines en Bretagne, mais l’idée est de rejoindre les Açores en août, puis Madère à la rentrée, suivi des Canaries, avant d’atteindre en novembre le Cap vert et faire une transatlantique jusqu’aux Antilles ensuite… Pour la suite, on improvisera !
Et si vous souhaitez suivre ces nouvelles aventures, j’ai lancé un podcast journal de bord, Les Océanides, disponible sur toutes les plateformes d’écoutes, ainsi qu’une page Instagram ! Des bisous, et bon vent !
Pour témoigner sur Madmoizelle, écrivez-nous à :
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On a hâte de vous lire !
Les Commentaires
De plus je trouve ça honteux de faire payer aussi cher pour voyager dans des conditions pareilles, notamment à cause du "seau" qui servait de toilettes et le manque d'une vrai couchette pour dormir...