Une demande, une robe blanche, un traiteur. Vous pensez connaître le pitch par cœur ? Détrompez-vous, il ne s’agit pas d’un mariage : Alice et Jonathan ont choisi de se pacser. Après un passage en mairie, les deux trentenaires ont loué un bateau pour célébrer leur union avec leurs amis. Pas de famille, mais de la bonne musique et un photographe pour les souvenirs :
« on ne voulait pas mélanger. On a d’abord fait un grand dîner avec nos proches venus de loin, puis une fête avec champagne et musique pour les copains. C’était une jolie façon de transgresser les codes et de montrer qu’on n’est pas obligé de se marier ! »
Le Pacs en constance augmentation
Et ils ne sont pas les seuls à vouloir sortir du schéma nuptial : les PACS sont en constante augmentation. Selon les derniers chiffres de l’INSEE, il y aurait aujourd’hui 9 pacs pour 10 mariages, contre 3 pour 4 dans les années 2000. À l’inverse, les chiffres des mariages ne cesseraient de dégringoler depuis les années 1970. Comment l’expliquer ? « Il y a un fort rejet de l’institution, aussi bien pour ses traditions que pour la connotation religieuse que certains y voient. Le Pacs, à l’inverse, puise sa force dans sa capacité à capter différents publics : ceux qui sont totalement hostiles au mariage, ceux qui n’y sont pas opposés et voient leur pacs comme une première étape moins contraignante sur le chemin de l’engagement, ceux qui cherchent plus de droits qu’en concubinage… » analyse Wilfried Rault, sociologue et chercheur à l’INED.
Emilie, 27 ans, fait partie de la première catégorie. Pour elle, se pacser est aussi bien une preuve d’amour qu’un acte de résistance : « le modèle classique de la robe meringue à l’Église ne nous correspondait pas, nous avions envie d’autre chose ». Pour autant, difficile de s’affranchir de certains codes : « J’attendais vraiment la demande en Pacs. Nous sommes partis dans les Açores, et j’étais persuadée qu’il le ferait à ce moment-là », raconte la jeune femme. Finalement, c’est au retour que les choses se sont concrétisées : « nous fêtions nos 9 ans au restaurant, et il a posé les papiers sur la table ! C’était très émouvant ». Un paradoxe qui n’a rien d’anodin, selon Wilfried Rault : « On observe un retour en force des rituels. Les enterrements de vie de célibataire, venus des États-Unis, se multiplient. Les fiançailles, tombées en désuétudes, sont remises au goût du jour. Le fait de célébrer son Pacs découle aussi de cette logique : on se réapproprie des rituels jugés archaïques pour les revisiter à sa façon ».
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Le Pacs : une alternative économique au mariage
Si les célébrations ne concernent encore qu’une infime partie des pacsés, elles ont le vent en poupe. Noélie, 28 ans, y voit peut-être une raison économique :
« notre pacs était une manière d’officialiser notre union aux yeux de l’État. C’était une étape importante, que l’on a vécu comme nos fiançailles. Nous avons organisé une grande fête avec traiteur, tel un mariage mais en moins prise de tête : il n’y avait pas de dress code, l’organisation était moins complexe et on s’en est sorti pour un budget de 1000 euros tout compris. Le Pacs est la solution idéale pour les jeunes couples qui n’ont pas les moyens de payer un mariage tout de suite, mais qui souhaitent célébrer leur amour »
Une hypothèse qui n’est peut-être pas si loin du compte : « il y a eu une injonction à la célébration avec le mariage. Cela représente un coût économique fort, plus difficilement assumable par certains groupes sociaux ou certaines personnes. Se pacser c’est remettre cette possibilité de se marier à plus tard, sans totalement l’exclure », abonde le sociologue.
« Certains choisissent le Pacs car le mariage a longtemps servi à les exclure »
Les mairies aussi jouent le jeu : à Pantin, là où Noélie s’est pacsée, il était possible de venir avec quelques proches, comme lors d’un mariage civil. « Ce sont des initiatives municipales qui remontent aux années 2000. L’idée à la base était de proposer une alternative au mariage pour les couples de même sexe qui n’y avaient alors pas accès ». Un geste symbolique dont on voit encore les traces aujourd’hui : « ces derniers font davantage usage du pacs que les couples hétérosexuels. Il y a une dimension idéologique forte : certains choisissent le pacs car le mariage a longtemps servi à les exclure » poursuit Wilfried Rault.
Malgré tout, une certaine hiérarchisation demeure : « C’est comme si l’un valait moins que l’autre. Il y a un tabou autour du Pacs, j’avais d’ailleurs peur d’annoncer ma décision à ma famille et mes amis, peur qu’ils ne comprennent pas. J’avais l’impression de devoir à tout prix me justifier » confie Alice. Heureusement, ses peurs se sont vite dissipées, face aux réactions positives de son entourage. Derrière ses premières inquiétudes, des idées reçues qui ont la peau dure : « dans certains milieux conservateurs, le mariage règne en maître sur toute autre forme d’union. Dans d’autres milieux, à l’inverse, le pacs est perçu comme plus moderne, et donc mieux valorisé » poursuit Wilfried Rault.
Contourner l’intrusion parentale
Pour limiter le clash des cultures et des générations, certains comme Jeanne, 32 ans, ont préféré segmenter les festivités :
« Le jour du pacs, nous avions convié nos parents respectifs, qui n’avaient jamais eu l’occasion de se rencontrer. Ils sont tous les quatre venus à Paris au mois d’août, nous ont accompagné à la mairie puis nous avons diné tous les six au restaurant. Quelques semaines plus tard, nous avons organisé deux week-ends, l’un dans ma famille, et l’autre dans la sienne pour célébrer notre PACS avec le reste de nos familles proches qui habitent à des endroits opposés. Enfin, nous avons organisé une soirée avec nos amis dans un bar privatisé à Paris quelques mois plus tard. Certains sont venus de loin pour l’occasion, ça nous a beaucoup touchés »
Car le pacs est aussi l’occasion de célébrer sa famille de cœur : « il permet de contourner l’intrusion parentale que l’on peut subir lors de l’organisation d’un mariage, avance Wilfried Rault. On a moins la pression de devoir inviter tel parent éloigné pour faire bonne figure. De nombreux pacsés valorisent par leurs célébrations les liens horizontaux, c’est-à-dire leurs amis ». Pacs Romana ?
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Les Commentaires
Alors si le facteur numéro 1 de la baisse des mariages au profit des PACS est une méconnaissance totale du mariage, j'ai envie de dire : bwof .
Ni le passage par la case "église" (avec un é minuscule s'il vous plaît), ni la robe meringue ni la fête hors de prix ne sont obligatoires.
Le mariage c'est avant tout un contrat légal qui se signe devant un officier d'état civil. Vous pouvez vous marier en tenue de tous les jours avec 1 témoin chacun et aller ensuite fêter ça au Mcdo du coin.
Tout comme on ne signe pas un contrat de travail ou l'acte notarié de l'achat de sa maison sans tout lire, on ne doit pas se PACSER ou se marier sans lire scrupuleusement le contrat qui nous engage. En ayant donc pris soin de choisir le contrat qui nous convenait le plus.
Lors du décès ou de la séparation, vous seriez surprises de voir combien de personnes mariées ou pacsées ne s'étaient pas renseigné sur ce qu'impliquait leur contrat. C'est mignon de vouloir avoir le sentiment d'être engagé avec la personne que l'on aime et de faire un resto avec sa famille ou ses amis mais ça reste du juridique à la base.
Un PACS n'est certainement pas un mariage moins cher.
Un mariage n'est pas une garantie de protection à 100 %.
Et tous les contrats de mariage ne se valent pas.
Protégez-vous : renseignez-vous !