En matière de parentalité, nous avons quand même le droit au gouvernement le plus déconnecté des réalités. La dernière preuve en date ? Les propos du Président Emmanuel Macron sur le « droit de visite des pères » lors d’une interview pour le magazine Elle il y a seulement quelques jours.
Et quel est le nouveau poney de bataille du gouvernement pour les mois à venir ? La création d’un congé de naissance, qui semble déjà être à côté de la plaque, en s’attaquant aux mauvais sujets.
Le congé de naissance à la place du congé parental
Sarah El Haïry, la ministre déléguée chargée des familles, a annoncé dans un entretien accordé à La Tribune dimanche 12 mai qu’une concertation allait être lancée avec les syndicats, le patronat et les associations, quant à la création d’un congé de naissance. Ce dernier devrait remplacer le congé parental actuel, et ce, dès 2025.
Dans l’entretien disponible sur Elle, Emmanuel Macron avait déjà donné les grandes lignes de ce nouveau congé :
[Le congé de naissance sera de] trois mois pour les mères, trois mois pour les pères, cumulables durant la première année de l’enfant, et indemnisé à hauteur de 50% du salaire jusqu’au plafond de la Sécurité sociale.
Le président de la République pour le magazine Elle
Actuellement, le congé parental donne le droit à un forfait mensuel de 448 euros par mois, pendant un an, renouvelable deux fois. En gros, on peut être en congé parental jusqu’aux 3 ans de l’enfant maximum, ce que le gouvernement trouve actuellement trop long.
Sarah El Haïry justifie la mise en place de ce nouveau congé parentalité :
Aujourd’hui, le congé parental donne droit à un forfait mensuel de 448 euros. C’est trop peu. Sa durée est longue. Cela éloigne les femmes, souvent les plus précaires, de l’emploi. J’ajoute que le recours à cette aide s’est effondré, ce qui témoigne de la nécessité d’une réforme telle qu’annoncée par le président de la République. Avec le congé de naissance, le père et la mère pourront s’arrêter pendant trois mois chacun, au moment où se noue un lien pour la vie.
Il leur sera versé 50 % de leur salaire et au maximum 1 900 euros. Avec ce plafond, nous créons un droit nouveau pour les classes moyennes. Bien évidemment, les employeurs volontaires pourront abonder le dispositif.
Le congé de naissance, la fausse bonne idée
Mais concrètement, que se passera-t-il au bout des trois mois de congé de naissance ? Retour à la case départ, les indemnités en moins.
Oui, parce que rappelons que si les mères — parce que ce sont elles, majoritairement, qui prennent un congé parental — mettent leur carrière entre parenthèses pendant des mois suivant la naissance de l’enfant, ce n’est pas QUE par plaisir. Certaines le font par choix, c’est vrai. Mais pour d’autres, c’est souvent aussi pour pallier le terrible manque de modes de garde en France. Les places en crèches, les places chez les assistantes maternelles, le coût de ces modes de gardes… Souvent, il n’y a malheureusement pas d’autres solutions pour les familles que la mère (et plus rarement le père) s’arrête de travailler jusqu’à ce que l’enfant aille à l’école.
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Du coup, comment feront les familles au bout des trois mois du congé naissance ? Comment feront surtout les familles les plus modestes, qui comptaient, même s’il était faible, sur le paiement des indemnités du congé parental jusqu’aux trois ans de l’enfant ? Beaucoup de familles, et surtout de mères, vont se retrouver sur le carreau, comme d’habitude. Encore une fois, ce projet proposé par le gouvernement semble surtout être une bonne casse sociale, sur son petit lit d’économie budgétaire. Parce que ce ne sont pas les familles aisées qui vont être lésées, on le sait.
Le congé de naissance, un projet à retravailler
Avant de parler de retour à l’emploi pour les mères qui viennent d’accoucher, de réduction de congés parentaux tout en prétextant une meilleure inclusivité du co-parent en lui permettant aussi d’avoir ses trois mois en famille — non obligatoire, donc on sait bien qu’ils ne vont pas être pris majoritairement — il faut une refonte totale pour intégrer réellement les familles dans la société.
La priorité ici, s’il doit y en avoir une, est le développement pérenne et effectif des modes de garde pour les plus petits. Sur ce sujet, la ministre déléguée chargée des familles annonce un investissement de 6 milliards d’euros supplémentaires d’ici à 2027. Pour une réforme qui est censée être en place en 2025, il y a comme un couac dans les chiffres, non ? Investissez d’abord, et réformez ensuite. Arrêtez de brasser du vent tout en sucrant le peu qu’ont les plus précaires, tout ça pour s’indigner ensuite que les mères, encore elles, n’arrivent pas à éduquer correctement leurs enfants.
Ces tacles permanents ne font avancer personne, ils créent juste des disparités de plus en plus grandes et de plus en plus injustes.
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