Parler d’argent, en France, c’est encore tabou. Pourtant, c’est un sujet passionnant, et par certains aspects… féministe ! Dans notre rubrique Règlement de comptes, des personnes en tout genre viennent éplucher leur budget, nous parler de leur organisation financière (en couple ou solo) et de leur rapport à l’argent. Aujourd’hui, c’est Laurine qui a accepté de nous ouvrir ses comptes.
- Prénom : Laurine
- Âge : 31 ans
- Métier : en CDI dans le secteur de la culture
- Salaires mensuels : 1 530€ de revenu mensuel pour Laurine, et 1 000€ pour son conjoint, soit 2 530€ par mois à deux
- Famille : son partenaire, avec qui elle est en couple depuis 5 ans, et leur chat de 2 ans
- Lieu de vie : un appartement de 40 m2 en banlieue parisienne
Les revenus de Laurine et de son conjoint
Les revenus mensuels du couple sont relativement disparates : 1 530€ par mois pour Laurine, qui travaille dans le secteur de la culture, et 1 000€ par mois pour son conjoint, qui a lancé son activité d’auto-entrepreneur il y a quelques mois.
Heureuse d’avoir un emploi sur un marché difficile, elle s’estime cependant assez mécontente de son salaire :
« Honnêtement, je m’estime mal payée compte tenu des responsabilités qu’on me confie et des heures supplémentaires qui sont monnaie courantes. Les CDI sont rares dans ma branche, et j’ai de la chance de ne pas être complètement précaire…
Mais j’aimerais qu’on valorise un peu plus mon travail ! Surtout dans la mesure où en ce moment, je suis la seule à avoir un revenu stable dans mon couple. »
En effet, son conjoint gagne en moyenne 1 000€ nets de revenus mensuels en auto-entrepreneur. Il a lancé son entreprise après un burn-out, il y a quelques mois, et même si ce statut est instable, il le trouve préférable à ses dernières expériences de salariat.
« Ce n’est pas un choix agréable pour lui, de travailler seul, sans équipe ou structure à ses côtés. Mais ces trois dernières années, il a enchaîné deux burn-out dans deux structures de référence dans son milieu. Il estime que 1 000€ par mois est un salaire correct pour quelqu’un qui se lance, mais il espère pouvoir dégager un peu plus d’argent rapidement. »
Laurine est aussi éligible à une prime d’activité de 47€, soit un total pour le ménage de 2 577€ par mois.
L’organisation financière de Laurine et de son partenaire
Pour organiser leurs dépenses, Laurine et son partenaire ont chacun leur compte individuel pour leur vie de tous les jours, et un compte commun sur lequel ils versent chacun le nécessaire à leur loyer, leurs factures, et leurs courses alimentaires.
« On a un mode d’organisation qui est à la frontière du pro-rata et du 50/50 : on part du principe que nous payons chacun la moitié du loyer et des factures, mais si jamais il a un moment de creux avec son entreprise, il sait que je mettrai un peu plus sur le compte commun.
Ça lui permet de participer un peu moins, et de respirer un peu. À l’inverse, les mois où il gagne un peu plus, il compense en mettant un peu plus. »
Une manière de faire qui leur convient bien, et qui leur permet de s’ajuster aux revenus pour l’instant fluctuants de son compagnon.
« Les loyers explosent, mais mon salaire stagne… »
Pour un appartement de 40m2 en petite couronne parisienne, le couple paie un loyer de 825€ par mois, soit presque un tiers de leur revenu global. Une somme qui ne paraît pas excessive à la jeune femme, au vu du prix de l’immobilier en Île-de-France :
« Vu la localisation de notre appartement et sa taille, j’estime que c’est un bon plan. Surtout dans la mesure où l’eau, et surtout le chauffage sont compris dans les charges !
Le prix est modéré parce que l’appartement était un peu vieillot quand nous avons emménagé et qu’il se trouve en rez-de-chaussée sur rue, mais ça ne nous dérange pas trop : nous l’avons rafraîchi un peu, et nous sommes habitués aux bruits. »
Seul point noir : Laurine a du mal à s’y projeter à long terme, mais ne voit pas comment elle pourrait le quitter.
« Le temps passant, on accumule des choses et commence à avoir envie de plus grand, plus confortable, d’avoir une vraie cuisine où recevoir…
Mais ce n’est pas possible : les loyers explosent, et mon salaire stagne ou augmente très lentement. Autant dire que si mon propriétaire voulait récupérer son bien demain, ou si mon copain et moi étions amenés à nous séparer, on aurait vraiment beaucoup de mal à trouver autre chose. »
Les dépenses communes du couple
En plus de leur loyer, Laurine et son partenaire se partagent un peu plus d’une centaine d’euros en factures courantes : 50€ mensuels d’électricité, et 60€ d’abonnements pour leur fournisseur d’accès internet, leurs téléphones mobiles, et des services de streaming (Netflix, Amazon prime et OCS). Depuis 2021, ils ne paient plus de taxe d’habitation.
À cela s’ajoutent des courses alimentaires que Laurine considère comme assez chères : 500€ mensuels, soit 250€ chacun. Elle explique :
« Nous mangeons végétarien, bio, et essayons de consommer le plus local et éthique possible. Quand on peut se le permettre, on va faire nos courses dans un supermarché coopératif où tout le monde est rémunéré correctement.
Le problème c’est qu’on fait ça en début de mois et qu’on a tendance à s’enflammer un petit peu… Et on finit le mois dans des supermarchés discount ! Le marché près de chez nous propose aussi des fruits et des légumes de qualité pour peu cher. »
Pour autant, elle ne se voit pas réduire ce poste de dépenses : elle aimerait ne pas avoir à faire de compromis et consommer en accord avec ses valeurs. À cela s’ajoutent une cinquantaine d’euros de frais pour leur chat, entre le vétérinaire, la nourriture et la litière.
En tout, ce sont donc 1 503€ de dépenses communes que se partage le couple.
« Je suis une très mauvaise gestionnaire »
Laurine explique ne pas avoir de méthode pour gérer son argent et suivre ses comptes : elle a du mal à tenir un budget avec rigueur. Elle précise :
« J’ai un rapport à l’argent qui fait souvent crier mon entourage : contrairement à de nombreux profils de cette rubrique, je suis une très mauvaise gestionnaire ! Et malheureusement, mon mec n’est pas meilleur que moi. Parfois, on perd de l’argent parce qu’on gère mal nos affaires administratives…
La chose la plus importante pour moi, c’est que tous les besoins indispensables soient assurés dès le début du mois : le loyer, les factures, les courses… Avec l’argent qui reste, je fais ce dont j’ai envie et ce qui me passe par la tête. »
Elle ajoute :
« Je déteste me restreindre, j’ai l’impression que c’est très injuste de devoir passer sa vie à tout compter. Surtout sachant que je travaille beaucoup ! Mais cette mentalité fonctionne en début de mois… Un peu moins après le 20. »
Un rapport à l’argent qu’elle estime du en partie à son éducation : même dans les moments difficiles, ses parents ont toujours refusé de se priver des petits plaisirs. « Sinon, on ne vit plus », explique-t-elle.
Les dépenses de Laurine
Après avoir placé de quoi payer ses charges fixes sur le compte commun du couple, il reste à Laurine environ 800€ chaque mois pour ses dépenses personnelles.
Elle calcule dépenser une centaine d’euros par mois pour ses déplacements : 35€ pour la moitié de son abonnement aux transports en commun, l’autre moitié étant prise en charge par son employeur, et le reste en frais ponctuels de VTC.
« Même si je vis en banlieue proche, je suis assez éloignée des endroits où j’ai l’habitude de sortir. Je ne me sens pas très en sécurité quand je dois rentrer seule, de nuit, en transports en commun, donc j’ai tendance à rentrer chez moi en VTC, quitte à y mettre le prix. À la fin du mois, ça représente une petite somme… »
Elle paie aussi 15€ mensuels pour l’assurance de l’appartement où elle loge, et 3€ de frais bancaires.
« Je crois que je sors beaucoup ! »
À cela s’ajoutent 300€ de dépenses pour ses loisirs, qu’elle détaille :
« Je fais trois ou quatre sorties culturelles par mois : des concerts, un ciné, une exposition… En fonction des prix, cela représente en moyenne 50€ mensuels. Et après, il y a les sorties plus festives : des verres dans un bar, un restaurant, des soirées ou des repas chez des amis… C’est mon plus gros poste de dépenses plaisir, puisque je fais ça une ou deux fois par semaine au moins soit 250€ chaque mois.
Je crois que je sors beaucoup, mais j’adore passer du temps avec mes amis : je ne me vois pas faire autrement ! »
Elle paie aussi 30€ par mois pour des cours de danse au sein d’une association proche de chez elle.
Côté vêtements et produits de beauté, elle estime ses dépenses à 40€ par mois lissés sur l’année.
« J’essaie d’être attentive à ma manière de consommer des objets — acheter de seconde main, ne rien accumuler d’inutile… Mais c’est très aléatoire : si j’estime que j’ai vraiment besoin de quelque chose, je l’achète sans faire attention au prix. »
Des craquages qu’elle aimerait réduire
Bien qu’elle pense gérer son budget avec légèreté, il y a un poste de dépense que la jeune femme aimerait réduire par tous les moyens : la livraison de nourriture à domicile.
« J’en ai un peu honte, mais je dépense trop d’argent en livraison de nourriture. C’est une grosse dissonance cognitive pour moi : d’un côté, je déteste ce système qui rémunère très mal les livreurs et j’adore cuisiner mes propres plats. Mais de l’autre, je termine souvent assez tard et à la fin de ma journée, je suis épuisée… Au moins une fois par semaine, j’arrive chez moi à 20h, je m’étale sur mon canapé et je commande.
Mon objectif, c’est de réduire ce poste de dépenses : j’estime que si je fais ça par nécessité et non par plaisir, il faut que je change mon mode de vie ! Mais ce n’est pas simple. »
Elle estime ces dépenses à environ 70€ par mois.
L’apprentissage de l’épargne
Une fois ces dépenses faites, la jeune femme calcule qu’il devrait lui rester la somme de 240€ par mois. Mais dans la pratique, c’est rarement le cas :
« En fonction des besoins de la maison, d’un aller-retour en train pour rentrer voir mes parents ou d’une baisse de revenu de mon conjoint, cette somme tourne plutôt autour d’une centaine d’euros en réalité ! J’ai du mal à me rendre compte de ce que je fais avec mon argent… »
Elle explique mettre environ plus ou moins 150€ de côté par mois : une moitié sur un livret A qui lui sert à absorber des grosses dépenses ponctuelles (vacances, week-end ou objet de la vie courante à remplacer), et l’autre moitié sur un PEL.
« J’ai ouvert un PEL il y a peu, pour essayer d’avoir de vraies économies et arrêter de tout dilapider pendant l’été et voir mes économies repartir à 0 en septembre.
Dans la pratique, je ne sais pas si je pourrai m’en servir pour acheter un appartement : pour le moment, mon secteur d’activité est à Paris et les appartements sont beaucoup trop chers pour mon salaire ! Nous n’avons pas de gros projet pour l’instant pour cet argent…
Mais ça me permet d’apprendre à avoir une somme de côté que je ne peux pas toucher. Et peut-être qu’à terme, j’aurai assez pour prendre une année sabbatique et voyager ! »
Merci à Laurine d’avoir accepté de répondre à nos questions !
Pour participer à la rubrique, écrivez-nous à l’adresse daronne[at]madmoizelle.com en indiquant en objet « Règlement de comptes » et en vous présentant en quelques lignes.
Si jamais vous souhaitez commenter cet article, rappelez-vous qu’une vraie personne est susceptible de vous lire, merci donc de faire preuve de bienveillance et d’éviter les jugements.
Crédit Photo : Jack Sparrow / Unsplash
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Les Commentaires
C'est avoir une vraiment piètre image des femmes ça ! Genre on est toutes des imbéciles qui ne réfléchissent pas avant de se mettre en couple ? C'est à ne pas comprendre le harcèlement de rue alors ! Toutes les femmes se mettraient en couple avec le premier qui dirait "hé mamzelle t'es charmante" ? Première nouvelle !
Si on prend en compte le fait que "high value" ne veut pas dire que monétaire mais aussi de la personnalité etc, qu'est ce qui vous dit que le gars que vous considérez comme le premier pequenot venu n'est pas le "high value" de la femme avec qui il est ?