L’histoire aurait pu s’arrêter là : la question pertinente d’une jeune féministe pour mettre un chef d’État face à ses responsabilités dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles et un bain de foule contrarié pour le président de la République.
Mais en demandant le 9 juin 2022 à Emmanuel Macron pour quelles raisons celui-ci met « à la tête de l’État des hommes accusés de viols et de violences sur les femmes », Laura, lycéenne de 18 ans, a visiblement mis en difficulté le pouvoir.
Une « leçon de morale » pour Laura après sa question à Emmanuel Macron
Le 10 juin, soit le lendemain de l’affaire, des gendarmes se sont rendus à son lycée et ont demandé à la voir. En plein cours, Laura a donc dû quitter la salle de classe. Elle a raconté à La Dépêche les raisons de cette visite :
« Ils m’ont précisé d’abord qu’ils étaient là parce que j’avais dit avoir été victime d’une agression sexuelle. Ensuite, j’ai senti qu’ils me donnaient comme une leçon de morale. Genre : on ne parle pas au Président comme ça. Il vaut mieux lui écrire »
Le problème est-il vraiment dans la manière de faire ? N’est-ce pas le jeu du bain de foule que d’être justement pris à partie ?
Que des gendarmes n’aient rien de mieux à faire que d’aller questionner une lycéenne engagée apparaît terriblement disproportionné, et surtout démocratiquement inquiétant.
Car comment l’interpréter autrement qu’un coup de pression déguisé en tentative de recueillir la plainte de la jeune femme ? Une façon d’intimider Laura, voire de museler toutes celles qui seraient tentées de mettre en difficulté la figure présidentielle en posant des questions qui le gênent ? La question de Laura sur la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, mais surtout sur le maintien de deux hommes du gouvernement Borne accusés de viols, posée devant les médias était-elle à ce point intolérable pour le Président ?
La manœuvre a en tout cas déclenché un vif tollé en ce week-end de législatives.
Sur Twitter, une large vague de soutien à Laura, mais aussi une reprise massive de sa question à travers le hashtag #LaQuestionDeLaura, ont déferlé tout le week-end.
Les excuses de la gendarmerie après la visite au lycée de Laura
Du côté des gendarmes, un post sur Facebook a voulu éteindre la colère en affirmant que les gendarmes avaient à cœur de recueillir une « éventuelle plainte ». Car Laura avait déjà mentionné qu’une des motivations de son interpellation du président de la République venait du fait qu’elle avait subi une agression il y a quelques années.
Si telle était leur véritable motivation, n’aurait-il pas été plus opportun de contacter la jeune femme pour lui proposer un accompagnement, plutôt que de faire irruption dans son établissement scolaire, en plein cours, pile au lendemain de l’incident ?
« Oui la présomption d’innocence, c’est important, mais on se doit aussi de protéger les citoyens du moment qu’il y a un doute » affirme Laura à La Dépêche, quand on lui demande ce qu’elle a pensé de la réponse faite par Emmanuel Macron. Celui-ci avait, comme à son habitude, joué la carte de la présomption d’innocence.
Dans le climat actuel, avec un président qui persiste à ignorer les voix des féministes, la méthode employée ressemble à une menace à peine voilée en direction de toutes celles qui n’iraient pas dans son sens après la question de la lycéenne.
Cette simple question, factuelle, limpide, devient une marque de courage et de détermination :
« Emmanuel Macron, vous mettez à la tête de l’État des hommes accusés de viols et de violences sur les femmes. Pourquoi ? S’il vous plaît répondez-moi ».
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Crédit photo de Une : Capture d’écran vidéo de La Dépêche.
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