Rares sont les réalisateurs à faire rire à grands renforts d’hémoglobine. C’est pourtant ce que réussit toujours Edgar Wright, qui — à l’instar d’un Tarantino mais en plus soft — a fait son beurre des comédies sanglantes, pastiches de films d’horreur.
Surtout avec sa Blood and Ice Cream Trilogy ou Cornetto Trilogy, saga déjantée et sanguinolente qui lui a permis de se faire un vrai nom dans le milieu du cinéma !
Mais depuis Baby Driver, sorti en 2017, Edgar Wright se tourne davantage vers le thriller, certes malicieux, mais plus sérieux que ses œuvres précédentes. Et il continue sur sa lancée avec le très pop mais non moins dramatique Last Night in Soho, actuellement en salles.
Last Night in Soho, de quoi ça parle ?
Last Night in Soho met en scène l’histoire d’Eloise, alias Ellie, passionnée de mode et de design, qui parvient lors d’un rêve à faire un bond dans le passé jusqu’à atterrir dans les années 1960 où elle rencontre une star en devenir.
Mais le Londres de cette époque est bien cruel, et Ellie est rapidement témoin du meurtre sordide de sa nouvelle idole…
Entre présent et passé, elle doit découvrir ce qui est arrivé cette nuit-là et arrêter le meurtrier de celle qu’elle rencontre la nuit, dans ses rêves.
Ce heurt entre deux temporalités plonge notre héroïne dans une époque avec laquelle elle est en total anachronisme, et doit déjouer le temps pour résoudre son affaire.
Last Night in Soho, un film baroque et léché
Si l’intrigue, complexe et souvent peu claire, interroge parfois, ce qui ne mérite pas discussion, c’est définitivement le rendu esthétique de Last Night in Soho, sans doute le film le plus réussi de son réalisateur.
Exit les bars pleins à craquer de zombies crétins, exit les fusillades dans des villages tranquilles, l’action est bien différente, dans Last Night in Soho, que dans les premiers longs-métrages d’Edgar Wright.
Et elle est filmée différemment surtout.
Dans cette maestria visuelle qui a été saluée à la Mostra de Venise, chaque plan est millimétré, chaque action est sublimée par les références horrifiques et grandioses d’un réalisateur qui ne cache pas son amour pour Hitchcock.
Ainsi, Last Night in Soho, avant d’être un thriller psychologique compliqué et parfois un poil obscur, est surtout une splendeur visuelle, qui en explorant le swinging London permet par ailleurs un défilé de costumes et de décors absolument splendides.
Last Night in Soho, un film féministe ?
Ce sont Anya-Taylor Joy, dont raffole actuellement le tout Hollywood, et Thomasin McKenzie (prodigieuse dans Leave No Trace) qui donnent vie aux personnages de Last Night in Soho.
On notera au passage qu’Edgar Wright a troqué ses héros masculins habituels (Simon Pegg, Nick Frost, Michael Cera et Ansel Elgort) contre des actrices, les propulsant dans un conte baroque qui dénonce le sexisme du Londres des années 60.
Si Last Night in Soho évoque les violences faites aux femmes, il pourrait être pertinent de s’interroger sur la sincérité d’une telle démarche dans un contexte post #MeToo où le féminisme est devenu un gâteau dont tout le monde veut se tailler une part.
Opportunisme ou préoccupation réelle pour le sujet qu’il traite, il n’en demeure pas moins qu’Edgar Wright déploie sa thèse sans fausse note, et a ceci de trop rare qu’il évoque les féminicides sans donner dans le sensationnalisme morbide auquel ont recourt les 3/4 des films d’horreur, qui raffolent des mises à mort féminines hard.
Ainsi, si Le Monde a choisi de trouver la démarche d’Edgar Wright opportuniste, nous, on lui laisse le bénéfice du doute, d’autant plus que son film est une belle réussite qui n’a pas joui de la publicité qu’elle aurait méritée.
Qu’à cela ne tienne, il ne tient qu’à vous de donner de la visibilité à Last Night in Soho, en allant le voir ce week-end et en en parlant autour de vous !
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Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
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