Le projet de loi sur le pouvoir d’achat est actuellement discuté à l’Assemblée nationale, parfois jusque tard dans la nuit, et c’est dans ce cadre que les députés ont examiné et voté un amendement pour la déconjugalisation de l’Allocation Adulte Handicapés (AAH).
L’Allocation Adultes Handicapés, ou AAH, est une prestation sociale versée aux personnes handicapées en France pour compenser l’inaccessibilité du monde du travail.
D’un montant maximal de 902,70€, son calcul prend aujourd’hui en compte les revenus du ou de la partenaire de l’allocataire : si une personne handicapée vit avec une personne qui travaille, elle verra son AAH diminuer, voire disparaître.
Face à ce calcul qui place les allocataires dans une situation de dépendance économique vis-à-vis de leurs partenaires, une mobilisation en faveur d’une loi amenant à individualiser le calcul de l’AAH dure depuis plusieurs mois.
Un vote sans appel à 428 voix pour et 1 voix contre, qui a été applaudi par les parlementaires.
La fin de la bataille parlementaire pour la déconjugalisation de l’AAH ? Pas si sûr…
Comme quoi, ça n’était peut-être pas si compliqué ?
Madmoizelle a suivi de près la bataille parlementaire sur le sujet durant le dernier quinquennat. Malgré un consensus sur l’ensemble de l’hémicycle, chaque tentative d’instaurer l’individualisation de l’AAH s’est heurtée au refus de La République en Marche, notamment en la personne de Sophie Cluzel, alors secrétaire d’État en charge du handicap. La majorité avait alors opté pour la mise en place d’un abattement forfaitaire de 5 000 euros sur le revenu du conjoint.
Si les députés ont ce jeudi 21 juillet acté que le calcul de l’AAH ne sera plus corrélé à la situation matrimoniale, il faudra attendre la mise en place effective d’une telle mesure… soit en octobre 2023. Impossible de faire plus court selon la rapporteure Charlotte Parmentier-Lecocq, malgré les demandes de la gauche, mais aussi du Rassemblement national.
Comment la majorité est-elle passée en quelques mois d’une opposition frontale à la déconjugalisation à l’adoption de cet amendement ? L’élection présidentielle a-t-elle favorisé un revirement chez Emmanuel Macron, qui a ainsi pu faire la promesse de « bouger » sur la question en avril dernier ?
Toujours est-il que les activistes mobilisés pendant des années sur le sujet, ne comptent pas relâcher la pression. Auprès de Libération, Lili, militante dans la commission antivalidiste de l’association Act Up-Paris, qui s’est beaucoup mobilisée sur le sujet, craint de voir les conditions d’attributions se durcir en contrepartie de la déconjugalisation de l’AAH : « L’AAH risque d’être beaucoup plus difficile à obtenir », affirme-t-elle. Une façon d’amortir les coûts engendrés par cette modification.
Sans oublier que la Première ministre Élisabeth Borne, si elle a suivi la nouvelle ligne du Président, a tout de même rétorqué en juin à une femme ne pouvant plus avoir d’activité en raison de son handicap, qu’elle devrait « reprendre une activité professionnelle. » Un signal à ne pas négliger dans un avenir proche où l’AAH sera certes déconjugalisée mais où il sera plus difficile d’y avoir droit.
Pour Céline Extenso, co-fondatrice de l’association handi-féministe Les Dévalideuses, il s’agit aussi de ne pas s’arrêter en si bon chemin mais d’envisager enfin la déconjugalisation des autres minima sociaux.
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Crédit photo : Cottonbro via Pexels
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Les Commentaires
Mais si c'est pour que cette alloc soit plus difficile à obtenir les militant-es n'ont pas fini de devoir se battre...