Cet article est le cinquième épisode du journal de bord d’Anouk Perry sur un voilier queer et féministe. Vous pouvez lire les épisodes précédents et suivants ici :
- Episode 1 : Comment j’ai tout plaqué pour partir voyager à bord d’un voilier queer et féministe
- Episode 2 : « Si on coule, tu restes tant que tu peux sur le bateau » : ma première semaine à bord d’un voilier
- Episode 3 : « Et soudain, la voile se déchire » : ma deuxième semaine à bord d’un voilier
- Episode 4 : « On arrive au port suivant et il n’y a toujours pas de toilettes, je craque » : ma troisième semaine à bord d’un voilier
Voilà bientôt un mois que je suis à bord de Triton, ce petit voilier se revendiquant queer et féministe et après une semaine tumultueuse, je me sens soulagée d’avoir annoncé mon départ anticipé d’ici une semaine. Je rêve alors d’une nuit dans un hôtel avec un lit, UNE PORTE (je dors avec une autre équipière sur une banquette du « salon » du bateau) et de vraies toilettes (sur Triton, nous n’avons qu’un seau, posé dans la cabine où dorment 2 autres équipier•es).
Mais en attendant, pas le temps de souffler, car le lendemain, Sushi et Claudi qui naviguent avec nous depuis 2 semaines s’en vont depuis Ribadéo, à l’est de la Galice, et il faut encore s’y rendre.
Après avoir regardé la météo, le seul créneau avec un vent suffisant pour atteindre cette ville avec notre voilier est cette nuit, entre 2 et 9 heures du matin. Alors on se couche à 21h30, on essaye de dormir, et quand ENFIN, je réussi à trouver le chemin vers les bras de Morphée, le réveil sonne : il est 1 heures du matin, et nous devons nous préparer à partir.
Une traversée nocturne sans histoire (ou presque)
La nuit, en navigation, tout est plus dangereux : il y a plus de risques de collisions, que ce soit avec un rocher ou avec un bateau, et moins de chance de retrouver une personne tombée à l’eau.
Mais cette nuit-là, tout est tranquille. On a croisé des bateaux au loin, on a longé la côte avec suffisamment de distance pour ne prendre aucun risque… Bref, si on oublie la fatigue assez extrême à l’arrivée, je pourrais en parler comme d’une navigation sans histoire.
À peine arrivé, Sushi et Claudi finissent leur sac et s’en vont. Hannah et moi retrouvons nos couchettes et on se dit qu’on va dormir un bon coup, mais après 20 minutes à peine, Hannah me réveille : les voisins de pontons nous proposent de les suivre pour se rendre « sur la plus belle plage du monde » (dixit l’office de tourisme), à 30 minutes en transport du port. Ok, je suppose qu’on dormira plus tard !
5 jours de dolce vita
Si je suis honnête, je dirai que cette journée a tout changé. On s’est énormément amusé•es, on s’est beaucoup confié•es sur ce qui allait, ou pas, et puis on a profité de la plage les Cathédrales, connue comme la plus belle au monde s’il-vous-plaît !
Les prochaines équipières arrivent 5 jours plus tard, et pendant plusieurs jours, on prend du temps pour se reposer, enchaînant moments détentes, visites et apéros avec les voisins.
Je passe du tellement bon temps que je décide de revenir sur ma décision de quitter le bateau. Je resterai bien les 6 semaines, comme prévu. Hannah souris et me répète une nouvelle fois qu’après la tempête vient le beau temps, et qu’elle est soulagée que j’ai décidé de rester.
Départ sans vent
Mais voilà, on sait qu’il faut aller récupérer deux nouvelles équipières à Viveiro, un peu plus loin sur la côte. Et, après plusieurs jours à guetter la météo, les prévisions ne sont pas bonnes du tout. Presque aucun vent n’est annoncé dans la région dans les 14 prochains jours.
Sans vraiment d’autres solutions, on décide de s’en aller avec un vent très faible. Tellement faible qu’une fois au large, nos voiles flottent dans le vide. C’est alors parti pour la traversée la plus lente de ma vie.
Nous allumons le moteur, mais il ne va pas vite (entre 5 et 6 km/h) et il ne faut pas le faire marcher plus de 2 heures consécutives, car il risque de surchauffer. Alors on alterne avec des phases sans moteur, où l’on passe 2 heures à aller très très lentement (moins de 2 km/h), voir dériver sans vent. Et ainsi de suite jusqu’à l’arrivée.
Hannah en profite pour se baigner au milieu de l’océan, un peu frileuse, je préfère dessiner, bouquiner, écouter de la musique et juste attendre, comme ça, pendant plus de 15 heures. Nous n’avons pas le choix, et finalement, cela reste l’un des souvenirs les plus doux de ce séjour.
L’ancre… Une nouvelle aventure
Pour économiser des sous, nous décidons de ne pas aller au port (payant) ce soir là, mais de jeter l’ancre (ce qui est gratuit) dans une zone assez proche. C’est la première fois que je jette l’ancre avec Triton, et Hannah me prévient qu’on fait ça « comme dans les années 50 ». On balance l’ancre et la chaine en même temps, et après, on prie pour que ça tienne.
Je m’endors plutôt sereine, mais à 2 heures du matin, Hannah me réveille car son GPS sur son téléphone lui indique que l’ancre s’est détachée. On dérive vers les rochers. Il faut donc la ressortir de l’eau (sans aide mécanique, donc une dizaine de kilos à tracter à la force de nos bras), avant de la balancer de nouveau.
Je décide de prendre ça à la rigolade. Toutes ces mésaventures finissent par me glisser dessus. Mais comme le sommeil, c’est important, on ne pas déconne pas non plus : la nuit suivante se fera au port où on est en sécurité !
Et c’est justement là que Léonie, une nouvelle équipière, nous rejoint. Suivie, le lendemain, par Lilas, qui est adorable. Leur arrivée est comme un soulagement : je les adore et je sens qu’à leurs côtés, mes deux dernières semaines à bord de Triton seront les plus belles !
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Les Commentaires
Pour l'ancre, il faut la laisser dérouler petit à petit en bloquant avec le pied pour qu'elle est le temps de s'étaler sur le fond (pas faire un gros tas).