En février 2023, Maïwenn faisait preuve de violence à l’encontre du patron de Mediapart, Edwy Plenel. Dans un restaurant parisien, la réalisatrice avait saisi les cheveux du journaliste avec violence, renversé sa tête en arrière avant de lui cracher au visage, ce qui lui aura valu de faire l’objet d’une plainte, déposée par le journaliste en mars.
En mai, Maïwenn reconnaissait publiquement l’agression sur le plateau de Quotidien, tout en refusant d’expliquer les raisons de son geste. Elle l’a finalement fait dans les colonnes du Journal du Dimanche, publié le 11 juin, dans un entretien qui dessine à nouveau les contours d’une offensive menée à l’encontre de #MeToo.
À lire aussi : 8 mars : le « backlash », c’est quoi ?
« J’ai ressenti un viol moral »
Dans les colonnes du JDD, Maïwenn a expliqué avoir agressé Edwy Plenel à cause de la publication d’extraits d’une audition réalisée en 2020 auprès de la police judiciaire.
En 2018, Maïwenn avait été approchée par une journaliste de Mediapart dans le cadre de l’enquête visant Luc Besson, son ex-mari et père de sa fille. Le réalisateur était accusé de viols par l’actrice Sand Van Roy. Il a, depuis, bénéficié d’un non-lieu en France. Maïwenn avait alors indiqué à la journaliste qu’elle ne voulait pas « prendre la parole ».
Deux ans plus tard, en juin 2020, la réalisatrice et actrice a témoigné lors d’une audition auprès de la police judiciaire. Ce que Maïwenn reproche à Mediapart est d’avoir publié en 2021 « un article avec des bouts de (son) audition ».
Or, Mediapart a publié ces extraits après de nombreux autres médias, dont Paris-Match, Le Point ou encore Madame Figaro. Sans ces extraits, leur enquête aurait légitimement pu être considérée comme incomplète et partiale, comme ils le précisent dans une réponse publiée sur leur site internet.
Pourtant, Maïwenn a déclaré au JDD à propos du seul article de Mediapart : « C’est un cataclysme. (…) J’ai ressenti un viol moral », poursuivant :
« Si rien ne justifie que l’on s’en prenne à un journaliste, rien ne justifie que l’on viole l’intimité d’une femme. »
Maïwenn
À lire aussi : Jeanne du Barry montre que les films problématiques sont surtout des films mauvais
Maïwenn est en guerre contre #MeToo, et ça se voit
Le 11 juin, Mediapart a répondu à ces déclarations dans un billet de blog intitulé « Maïwenn et Mediapart : des contresens et des mensonges ».
Souhaitant « corriger des contrevérités manifestes », Mediapart a notamment expliqué qu’après la publication par de nombreux médias de l’audition de la réalisatrice, il était « inconcevable de ne pas mentionner à notre tour la version de Maïwenn » :
Si nous ne l’avions pas fait, on nous aurait reproché un article partiel, voire partial. Le reproche aurait pu être justifié.Par ailleurs, Mediapart n’a fait état que d’éléments d’intérêt public, et choisi délibérément de ne pas citer ceux qui étaient sans lien avec l’affaire Besson.
Mediapart
Après avoir déconstruit les mensonges de Maïwenn, Mediapart a mis en lumière ce qui se jouait à travers toute cette polémique, nommant une « offensive médiatique et politique contre #MeToo » à laquelle Maïwenn participe :
En réalité, ce qui se joue va bien au-delà : il s’agit de mettre en cause un journal qui n’a jamais renoncé à enquêter sur #MeToo, dans tous les lieux de pouvoir, dans tous les milieux, y compris dans le cinéma.
Maïwenn ne s’en est pas cachée : elle a souvent critiqué #MeToo ces dernières années, tout en soutenant le principe. Elle a soutenu Roman Polanski, attaqué Adèle Haenel et le mouvement féministe (« radical »). Elle en a même fait un étendard en choisissant Johnny Depp, acteur mis en cause pour des violences conjugales, pour son dernier film et en organisant sa « rédemption » lors du dernier festival de Cannes.
La réponse de Mediapart à Maïwenn est salutaire, un an après la fin du procès Depp/Heard, dont on se demandait s’il sonnait le glas de #MeToo. L’impunité de la réalisatrice, qui multiplie la violence et les mensonges envers un média servant de piliers à #MeToo nous rappelle qu’en France, comme aux États-Unis et ailleurs, nous ne sommes jamais à l’abri de balcklash et de violentes ripostes pour éteindre le mouvement d’émancipation des femmes du joug de la violence patriarcale.
Ajoutez Madmoizelle à vos favoris sur Google News pour ne rater aucun de nos articles !
Les Commentaires
Je suis toujours affligée de voir des femmes tirer une grosse balle dans le pied d'un mouvement nécessaire pour tenter (laborieusement) de faire reconnaître nos droits